Économique l'électrique?

Publié le 20 décembre 2011 dans Technologie par Guy Desjardins

Selon un récent sondage CROP, seulement 28 % des acheteurs sont prêts à faire le saut vers un véhicule électrique d'ici trois ans. Deux critiques sont récurrentes dans les commentaires des personnes sondées. On note tout d'abord une autonomie insuffisante pour les besoins (surprenant puisque d’après Statistique Canada, 90 % des Canadiens parcourent moins de 60 kilomètres par jour), mais surtout un coût d'achat trop élevé pour le produit. On est alors en droit de se demander si cette nouvelle venue, tout électrique, est vraiment trop chère. Afin d'en avoir le cœur net, le comparatif qui suit tentera d'élucider la question.

Que le magasinage commence!

Pour faire une comparaison juste et équitable, nous comparerons deux modèles à la carrosserie et à la mécanique similaires et vendus par le même fabricant, Nissan. Proposant un moteur thermique, la Nissan Versa 1.8 S avec boîte automatique vendue actuellement à un prix de base de 14 678 $ affrontera la Nissan Leaf SV, purement électrique et se détaillant à 38 395 $.

Après avoir ajouté les frais de préparation de 1 467 $, la boîte automatique à 4 rapports et appliqué le rabais du constructeur, la Versa 1.8 S affiche un prix de 15 260 $ avant taxes. Quant à la Leaf SV, il suffit d’appliquer le crédit d’impôt de 8 000 $ du gouvernement et d’ajouter les frais de préparation de 1 620 $ pour en arriver au total de 32 015 $ avant taxes. Le crédit d’impôt émane du dernier budget provincial. Il est applicable lors de l’acquisition ou la location d’un véhicule autre qu’un VBV (véhicule à basse vitesse) n’utilisant aucun carburant. Toutefois, ce chiffre est décroissant avec les années et passe de 8 000 $ si l’acquisition se fait en 2011 et 2012, à 6 000 $ pour 2013, 4 000 $ pour 2014 et 2 000 $ pour 2015.

Or, en ajoutant la TPS de 5 % et la TVQ de 9,5 % (dès janvier 2012), la Versa 1.8 S verra sa facture passer à 17 545 $ alors que la Leaf SV coûtera 36 809 $. Il s’agit donc dès le départ d’un déboursé additionnel de 19 264 $ pour l’acquisition d’une Leaf.

Et le coût de l’électricité?

Le deuxième point sur lequel les gens critiquent la Leaf est son autonomie limitée. Et pour éviter de tomber en panne, il ne faudra pas oublier de recharger la voiture. Alors, combien en coûtera-t-il en électricité? Pour tenter d’y répondre, il faut se servir des données de l’EPA. Et heureusement, la Nissan Leaf est le premier véhicule à passer le nouveau système de notation de l’EPA américain pour donner une équivalence à la consommation d’essence pour les automobiles électriques. Il a été déterminé que 33,7 kilowatts-heures d’électricité sont équivalents à une distance de 160 kilomètres. En faisant une simple règle de trois, on en conclut que la batterie de la Leaf est capable de stocker un maximum de 26 kilowatts-heures puisque son autonomie moyenne tourne autour de 125 km si l’on combine l’utilisation hivernale (autonomie d’environ 100 km) à celle estivale (autonomie de 150 km).

L’utilisation de la Leaf, à raison de 125 km par jour pendant 365 jours, permet un kilométrage de 45 635 km. Toutefois, aux fins de nos calculs, établissons le kilométrage annuel à 24 000 km. Pour établir ce kilométrage, la Leaf devra théoriquement être rechargée au minimum (24 000 km / 125 km ) 192 fois. À 7,51 sous le kWh, la facture s’élève à 375 $ par an (192 charges X 26 kWh/charge X 7,51 cents).

Bien que le kilométrage annuel soit de 24 000 km et que pour atteindre ce kilométrage, il ne faille recharger techniquement sa Leaf que 192 fois durant l’année, l’hypothèse la plus plausible veut que le propriétaire connecte sa voiture tous les soirs, question de toujours repartir à pleine capacité. On établit donc le nombre de charges à 365. Selon Hydro-Québec, la charge de la Leaf sur une prise de 240V consomme au maximum 30 kWh. Au Québec, le prix maximal de l’électricité s’établit à 7,51 cents le kWh. Ainsi, une charge coûte au maximum 2,25 $ (30 kWh X 7,51 cents) puisqu’elle ne sera pratiquement jamais faite à partir d’une batterie complètement déchargée. En fin de compte, on obtient pour nos 365 charges, un montant annuel maximal de 821 $ (2,25 $ X 365 charges). La Leaf consomme donc entre 375 $ et 821 $ d’électricité par année.

Une ivrogne!

En ce qui a trait à la Versa, malgré sa consommation combinée ville/route de 7 litres aux 100 km, elle donne l’impression d’être une ivrogne en comparaison à la Leaf. En considérant un kilométrage annuel de 24 0000 km et un prix de l’essence à 1,25 le litre, la Versa consomme pour 2 100 $ de carburant par année, et ce, sans considérer les augmentations hebdomadaires du prix de l’essence. C’est donc dire que sur ce point, la Leaf électrique remporte la palme haut la main puisqu’elle ne consomme absolument aucune goutte d’essence. Il est clair que l’avantage du coût d’utilisation reste à la Nissan Leaf avec une dépense maximale en « carburant » de 821 $ par an comparativement à 2 100 $ pour la Versa.

Bien que les économies de carburant annuellement soient de l'ordre de (2 100 $ – 821 $) 1 279c$, il ne faut pas oublier que le manque à gagner à l’achat était de 19 264 $. Pour combler ce manque à gagner, il faudra utiliser la Leaf durant au moins 15 ans (19 264 $ / 1 279 $), période pendant laquelle, il faudra changer la batterie au moins une fois!

Encore plus chère la Leaf?

La comparaison s’est arrêtée à l’achat initial et la consommation de carburant pour les deux véhicules. Toutefois, au niveau de l’entretien, plusieurs points sont également à évaluer. Notamment les visites de routine chez le concessionnaire pour l’entretien préventif. Pas de changement d’huile pour la Leaf et aucun souci pour le remplacement du système d’échappement. Par contre, lorsque la batterie aura atteint sa durée de vie maximale (on parle de 8 à 10 ans), que sera sont coût de remplacement? Il est actuellement question d’un chiffre au-delà des 5 000 $, ce qui augmente considérablement le coût d’utilisation de la voiture électrique.

Et puisque la majorité des propriétaires de Leaf ne voudront pas mettre leur voiture sous charge pendant près de 20 heures (en utilisant le système de charge fourni à l’achat), ils devront se procurer un chargeur rapide opérant sur le 240V. Ce chargeur permettra de la recharger en moins de 8 heures mais demandera un déboursé additionnel d’au moins 2 000 $. Heureusement, il semble que le gouvernement accordera une subvention pour l'achat d'un système de charge sur le 240V.

Et le dernier point à considérer, la valeur de revente de la Leaf au bout de 4 ans. Qui voudra acheter un véhicule en milieu de vie sans aucun crédit d’impôt?

En conclusion

Strictement sur le plan financier, l’achat et l’utilisation d’une Leaf n’est pas plus avantageux que de se procurer une Versa. Mais outre les aspects financiers élevés et l'autonomie limitée de la Leaf, elle aura toujours le mérite de n'émettre aucun CO2. En contrepartie, si l'électricité est produite par une centrale au charbon, la Leaf perd tous ses avantages.

Sources :
http://www.vehiculeselectriques.gouv.qc.ca
http://canmetenergy-canmetenergie.nrcanrncan.gc.ca
http://www.budget.finances.gouv.qc.ca
http://www.nissan.ca
http://www.hydroquebec.com/fr/

Share on FacebookShare on TwitterShare by emailShare on Pinterest
Partager

ℹ️ En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de cookies telle que décrite dans notre Politique de confidentialité. ×