Bentley, performances et prestige avec un grand P

Publié le 30 mars 2003 dans 2003 par Jacques Duval

Gêné de devoir se faire conduire dans une vulgaire Passat au lieu d'une limousine digne de son rang lors de ses déplacements en Amérique, le Dr Ferdinand Piëch, alors PDG du groupe Volkswagen, avait tout simplement décidé d'acheter le duo Rolls-Royce/Bentley. Évidemment, l'histoire de cette acquisition va bien au-delà de cette petite pointe de vanité et est beaucoup plus complexe qu'il n'y paraît. Pour ne pas vous ennuyer avec des détails que vous connaissez sans doute, rappelons simplement que VW s'est retrouvée dans de beaux draps lors de cette mémorable transaction. Croyant acquérir une compagnie regroupant deux grandes marques de prestige (Rolls-Royce et Bentley), la firme allemande a appris à ses dépens que la plus connue des deux, Rolls-Royce, ne faisait pas partie de l'entente. Celle-ci avait été cédée à BMW selon un contrat intervenu plus tôt et dont Volkswagen ignorait les modalités. M. Piëch pouvait garder Rolls-Royce dans son giron mais pas au delà de 2003, date à laquelle BMW devenait la seule propriétaire de la marque des rois.

Chez VW, on s'est donc employé à étoffer la gamme Bentley et surtout à lui donner une autonomie qu'elle ne possédait plus depuis des lustres puisqu'elle ne servait que de « duplicata » à des modèles Rolls-Royce. La nouvelle direction allemande a aussi voulu redonner à ce label tout le prestige de ses antécédents sportifs. D'où l'apparition en piste de voitures sport-prototypes spécialement construites pour les 24 Heures du Mans, une épreuve d'endurance que la marque britannique a gagnée à maintes reprises dans les années 20.

Un coupé GT Continental

Dans cette optique, il ne faut donc pas s'étonner que les nouvelles Bentley mettent l'accent sur la haute performance, sans pour autant abandonner leur vocation de voitures de très grand luxe. Le plus bel exemple de cette approche est le coupé GT dévoilé dans sa version finale au récent Salon de l'auto de Paris. Le fait d'appartenir au groupe VW a permis aux ingénieurs britanniques basés à Crewe, en Angleterre, d'utiliser le fameux moteur 12 cylindres en W que le constructeur allemand installe également dans les Phaeton et Touareg ainsi que dans l'Audi A8. Pour les besoins de la cause, le W12 de 6 litres voit sa puissance passer au-delà des 500 chevaux grâce à l'apport de deux turbocompresseurs. Il en résulte un temps de passage de moins de 5 secondes entre 0 et 100 km/h et une vitesse de pointe excédant 300 km/h.

La plus performante des Bentley peut aussi compter sur une transmission automatique à 6 rapports contrôlée à partir du volant par des palettes semblables à celles que l'on retrouve dans la Ferrari 575 Maranello. Une puissance aussi élevée ne pouvait être gérée adéquatement que par la présence de quatre roues motrices et le coupé Bentley bénéficie conséquemment de la traction intégrale. Son châssis hérite d'une suspension à essieu arrière multibras avec des leviers triangulaires doubles à l'avant et des amortisseurs à réglage variable contrôlés par électronique.

Par rapport aux coupés 2+2 dont les places arrière sont souvent réservées à un excédent de bagages, le coupé Bentley est un vrai quatre places doté d'un coffre d'un volume raisonnable de 355 litres. Ce nouveau coupé GT qui adoptera le nom de Continental arrivera sur le marché au cours de la seconde moitié de 2003.

Arnage, Continental et Azure

Les autres modèles de la gamme restent proches parents de ce que l'on trouve chez Rolls-Royce et il faudra attendre encore quelques années avant que Bentley puisse offrir des voitures qui lui seront exclusives.

Pour l'instant, l'offre se compose de la berline Arnage R qui a pris le relais de la version Red Label et dont le moteur est un V8 de 6,75 litres développant 400 chevaux grâce à l'apport d'un double turbocompresseur Garrett T3. En faisant appel à deux turbocompresseurs plus petits, on a réussi à éliminer une bonne partie du temps de réponse associé habituellement à ce type de suralimentation. Plusieurs seront surpris d'apprendre que Bentley utilise une transmission automatique General Motors à 4 rapports seulement. Il s'agit de la 4L80-E qui a été modifiée afin de réduire de 0,4 seconde le temps de passage des rapports. Quand on dit que GM fabrique les meilleures transmissions automatiques au monde, en voilà une autre preuve concluante. Dans l'Arnage T, le même moteur développe 450 chevaux tandis que le couple s'affiche à 645 lb-pi, ce qui est nettement suffisant pour faire de cette limousine la berline la plus rapide au monde. C'est aussi la plus véloce de toutes les Bentley jamais produites.

Dans les coupés Continental R et T, un niveau de mise au point différent du gros V8 de 6,75 litres donne des puissances respectives de 400 et 420 chevaux. Dans ce dernier cas toutefois, on a réussi à faire progresser le couple à 650 lb-pi, un chiffre qui éclipse celui de moteurs aussi en forme que le V12 d'une Ferrari 575 Maranello ou celui encore plus déchaîné de la Lamborghini Murciélago. Précisons que les Bentley Continental offrent eux aussi quatre places comme le nouveau coupé GT.

La plus rare et la plus chère des Bentley est le cabriolet Azure qui se fait appeler Corniche dans la gamme Rolls-Royce. Il partage son châssis et son empattement avec les coupés Continental et est animé par le moteur le plus « sage » de la marque britannique, le V8 de 6,75 litres d'une puissance de 400 chevaux.

Les marques Bentley et Rolls-Royce étant en pleine réorganisation, il ne nous a pas été possible de faire l'essai de l'un ou l'autre des modèles décrits plus haut. Si ces voitures vous intéressent, vous trouverez bien un milliardaire quelconque qui pourra vous dire si le mariage germano-britannique d'une fille du peuple (Volkswagen) avec un aristocrate (Bentley) est une réussite.

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