Lincoln Navigator, le monde à l'envers

Publié le 30 mars 2003 dans 2003 par Denis Duquet

La popularité des véhicules utilitaires sport de luxe ne fait pas qu'inciter les compagnies à développer de nouveaux modèles. Elle provoque également des situations fort cocasses. Chez Lincoln, par exemple, la Town Car, la seule berline de luxe encore offerte, est toujours équipée d'un essieu arrière rigide qui semble emprunté à la camionnette F-150. Par contre, le gros Navigator bénéficie depuis cette année d'une suspension arrière indépendante.

C'est le monde à l'envers : le véhicule à vocation utilitaire montre une fiche technique plus sophistiquée que celle de la berline de luxe. Non seulement le Navigator hérite d'un nouvel essieu arrière, mais son châssis est tout nouveau de même que son habitacle. Il est tout aussi surprenant d'apprendre que cette nouvelle suspension arrière n'a pas été développée essentiellement pour améliorer la tenue de route et le confort, mais pour accorder plus d'espace à la 3e banquette !

Ne croyez surtout pas les allégations de la compagnie lorsqu'elle prétend que cette 3e banquette peut accommoder avec confort un adulte de taille moyenne. Non seulement elle est inconfortable pour les gens de taille normale, mais leur tête va continuellement heurter les renflements du système d'activation du hayon placés de chaque côté du pavillon. Par contre, si ce genre de gadgets vous intéresse, sachez que le dossier de cette banquette peut être replié en appuyant sur un bouton. Quelques secondes plus tard, vous avez un plancher de chargement plat. Autre accessoire « songé » : le hayon arrière est à ouverture motorisée comme dans les fourgonnettes Autobeaucoup de Chrysler. Le marchepied est également à déploiement automatique. Dès que l'une des portières s'ouvre, le marchepied se déplace vers l'extérieur pour offrir une plus grande surface d'appui. Refermez la porte, il reprend docilement sa place. Les ingénieurs ont même inclus un détecteur de présence qui empêche leur fonctionnement lorsque le véhicule est embourbé ou qu'un objet repose contre le marchepied.

Des efforts louables

Il ne faudrait pas croire que les changements majeurs apportés au Navigator se limitent à quelques accessoires un peu à part destinés à impressionner une clientèle urbaine. Les ingénieurs ont dessiné un châssis tout nouveau réalisé à partir de poutres hydroformées qui ont amélioré la rigidité en torsion de 70 %. Parmi les autres primeurs, mentionnons la suspension arrière indépendante, la direction à pignon et crémaillère de même que des roues de 18 pouces.

Rien n'a été négligé pour que la mécanique figure parmi les plus modernes de la catégorie. Et pour exorciser les démons du passé et réduire au maximum les risques de capotage, le Navigator est doté du Safety Canopy, un système de protection comprenant des coussins et des rideaux latéraux se déployant en cas d'impact latéral ou de capotage. De plus, en cours d'année, un système de détection des capotages sera offert. Dès que l'angle vertical du véhicule sera trop prononcé, ce système ralentira le véhicule en réduisant la puissance du moteur et en activant les freins de faÇon sélective.

Le moteur V8 de 5,4 litres est de retour. Sa puissance est demeurée la même et ses 300 chevaux ne sont pas de surplus pour déplacer cette masse de 2 718 kg et assurer en même temps une capacité de remorquage de 3 856 kg. Et même si peu d'acheteurs l'utilisent en conduite hors route, la plupart des Navigator sont commandés avec le rouage intégral ControlTrac qui permet de passer en mode 4X2, 4X4 Auto, 4X4 High en actionnant un commutateur rotatif.

Comportement prévisible

Comme c'est le cas de tous les modèles qui ont connu du succès, la présentation extérieure du Navigator ressemble beaucoup à la version précédente. Les phares sont nouveaux, les angles de la caisse plus ronds, l'arrière moins simpliste, mais la silhouette demeure toujours la même. Une fois à l'intérieur, c'est un tableau de bord bien réussi qui s'étale sous nos yeux. Les appliques en bois, la qualité et le grain des plastiques, le raffinement des commandes, tout cela s'accorde au prix et à la catégorie du véhicule. Fini le gros truck déguisé en tout-terrain de luxe. Cette fois, on a l'impression de conduire la « vraie chose ».

Malgré un habitacle d'une finition raffinée et la rassurante présence d'un écran de navigation par satellite encastré entre une horloge à affichage analogique et les commandes de la climatisation, le bruit du moteur qui s'infiltre dans l'habitacle nous fait déchanter. Pourtant, les techniciens de Lincoln nous avaient expliqué avec moult détails les efforts d'insonorisation apportés à ce véhicule. Le niveau de décibels a certainement baissé, mais la qualité du son s'est détériorée.

Si l'insonorisation est en partie loupée, la linéarité de la direction s'avère nettement meilleure. Enfin, le pilote n'a plus la sensation que le volant est relié à des élastiques. L'assistance est juste ce qu'il faut et l'effort est progressif. Sur une route en lacet, les corrections du volant ne sont plus indispensables comme autrefois. Ce pan de mur sur roues se conduit comme une berline ou presque. En plus, une assise de la suspension plus basse et des essieux indépendants à l'arrière garantissent une meilleure stabilité dans les courbes et une tenue de route saine. De plus, les freins sont à la hauteur.

Bref, le Navigator a progressé à tous les points de vue. Le Cadillac Escalade doit même s'incliner devant la présentation intérieure beaucoup plus réussie du Lincoln et se contenter d'une suspension arrière à essieu rigide. Par contre, son moteur de 345 chevaux garantit des accélérations et des reprises plus musclées. Ajoutez à cette équation un système de stabilité latérale qui a fait ses preuves et un comportement routier sain pour que ce Caddy tout-terrain ne soit pas déclassé. Bien au contraire.

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