BMW Série 5, mariage réussi de l'électronique et du plaisir

Publié le 30 mars 2004 dans 2004 par Jacques Duval

L'enjeu était de taille. Sans être le pain et le beurre de BMW (elle recrute 20 % de la clientèle), la Série 5 est celle sur laquelle repose en grande partie l'image de marque du constructeur bavarois. Ce sont en effet les divers modèles de cette série, née en 1972, qui ont pratiquement fait naître l'appellation « berline sport ». La redoutable M5 n'a-t-elle pas obtenu les accolades de tout ce que la presse automobile compte de sommités ? Sa succession et celle de ses cousines moins ambitieuses constituaient donc une étape cruciale pour le sorcier de Munich. D'autant plus qu'après huit ans sans chirurgie majeure, les 530 et compagnie commenÇaient à accuser leur âge. C'est la Sardaigne, au large des côtes de l'Italie, qui a été le témoin de leurs premiers ébats. Bienvenue en classe affaires.

Après avoir conduit la nouvelle BMW de Série 5 dans sa version 530i à transmission automatique à 6 rapports, j'étais prêt à écrire que cette voiture avait tout pour elle, sauf peut-être cette petite étincelle qui allume la passion. L'essai subséquent du même modèle doté d'une boîte manuelle à 6 rapports et du groupe Sport (jantes et pneus de 18 pouces, ressorts plus fermes et voiture surbaissée de 15 mm) m'a rapidement démontré que les gens de Munich maîtrisent toujours avec beaucoup de doigté un savoir-faire dont ils ont quasiment acquis les droits exclusifs et qui s'appelle l'agrément de conduite. Mais ne précipitons pas les choses et voyons comment la nouvelle Série 5 diffère de sa devancière.

Un look discutable et la direction réinventée

S'il est heureux que BMW ait retenu le train roulant tout aluminium de la Série 7 ainsi que sa suspension active à système antiroulis, on applaudit moins fort en constatant que l'on a aussi laissé libre cours au style baroque introduit par Chris Bangle dans les modèles haut de gamme de la marque. Certes, l'effet est moins choquant, mais je n'arrive pas à comprendre le pourquoi de cette partie arrière où le coffre en surplomb semble avoir été oublié dans le design original. Et que dire de ces joints trop larges qui accentuent ce rajout ?

Passons sur ce style pour le moins discutable et arrêtons-nous plutôt à l'innovation la plus spectaculaire de la nouvelle Série 5. En entendant parler de cette première mondiale que constitue la direction active de la voiture, j'ai d'abord cru au gadget ou, à tout le moins, à une dépendance électronique difficilement acceptable dans une voiture prônant le plaisir de conduire. Non seulement le parcours de slalom préparé par BMW m'a convaincu du contraire, mais il a provoqué chez moi une crise d'hilarité admirative. Je m'explique? Ayant d'abord fait le parcours avec une 530 munie de cette option (hélas), je m'étais félicité d'avoir enfilé les cônes avec l'adresse d'un champion de gymkhana. Mon deuxième essai sans ce dispositif a été catastrophique, me laissant croire que la voiture était une horreur et son conducteur un incapable, d'où mon fou rire. Cette direction à gestion électronique, voyez-vous, a ceci de particulier que la crémaillère adopte une démultiplication variable. De trois tours de volant à une vitesse d'autoroute, la direction n'en demande plus qu'un seul au moment des man?uvres de stationnement. Celles-ci deviennent un jeu d'enfant. À vitesse moyenne comme dans le slalom, on n'a qu'à braquer légèrement pour serpenter autour des cônes tandis que l'absence de direction active vous oblige à manier le volant comme un débile pour négocier ces virages serrés. Avec un tel système, plus question de modifier constamment la position des mains sur le volant, ce qui revient à dire que l'on y gagne en sécurité et en maniabilité. Et comme la direction reprend sa démultiplication normale à grande vitesse, la tenue de cap n'est jamais compromise.

Une autre distinction de la nouvelle Série 5 est que l'utilisation intensive (châssis et suspension) de l'aluminium a permis d'alléger le poids non suspendu sur le train avant et de répartir le poids presque uniformément entre les deux essieux. Une telle diète a aussi des effets bénéfiques sur le poids : bien que plus grande que l'ancienne Série 5 tant à l'arrière que dans le coffre, la nouvelle version a perdu 75 kilos à la pesée.

Quant aux autres progrès réalisés sur ces modèles de quatrième génération, ils se limitent à des améliorations de technologie déjà connues comme l'affichage tête haute qui permet de lire certains instruments dans le pare-brise et des pneus à roulage à plat (avec détecteur de perte de pression) qui éliminent la roue de secours. Une nouveauté de plus en plus répandue est celle des phares au xénon directionnels qui tournent avec le volant pour éclairer les côtés de la route. Oui, je sais, Citroën a déjà eu de tels phares il y a des millénaires, mais le système actuel est disons plus? sophistiqué. BM en rajoute avec les feux de freinage adaptatifs dont la surface lumineuse s'élargit si l'on appuie très fort sur la pédale afin d'éviter les collisions arrière. Hélas ! le I Drive piqué à la Série 7 a trouvé son chemin dans la Série 5 et même s'il se veut plus convivial, il demeure une énigme pour tous ceux qui ont dépassé l'âge du Nintendo. Qu'il me suffise de vous dire que j'ai entendu un confrère journaliste qui n'a jamais de toute sa vie utilisé en vain un seul mot d'ordre liturgique en massacrer un ou deux pour se défouler parce qu'il se trouvait incapable de simplement fermer la radio.

Le statu quo sous le capot

Connaissant les exploits de motoriste de BMW et sachant que la Série 5 a toujours été reconnue comme une voiture plutôt performante, on peut s'étonner que l'on ait choisi le statu quo ou presque sous le capot, du moins pour la 530. On y retrouve toujours le légendaire 6 cylindres en ligne de 3 litres développant 225 chevaux alors que de simples Accord, Maxima ou Altima V6 en proposent davantage. En revanche, la 545i bénéficie de la plus récente évolution du V8 de 4,4 litres provenant de la Série 7 et prodiguant un solide 325 chevaux et autant de couple. Ce moteur se prévaut notamment d'une tubulure d'admission à variation continue et des astuces de BMW que sont le VANOS (calage variable double) et le VALVETRONIC (commandes des gaz sans papillon). Quant à la transmission de la puissance aux roues arrière, elle s'effectue via des boîtes de vitesses à 6 rapports, automatique ou manuelle. Bonne nouvelle : la redoutable boîte de vitesse séquentielle SMG de BMW sera offerte dans la Série 5. Que donne tout Ça dans le vrai monde, dans le cas présent sur les routes de la Sardaigne autour de Cagliari ?

Toujours la référence

Ni les 545 ni les versions Touring qui n'arriveront qu'un peu plus tard n'étaient au rendez-vous lors du dévoilement de la nouvelle Série 5. À part cette direction active citée plus haut, la 530i nouvelle mouture n'est certes pas radicalement différente de sa devancière. Même la direction active est suffisamment transparente à des vitesses normales et elle n'oblige pas à modifier ses habitudes de conduite. Elle les simplifie, c'est tout? Avec la boîte automatique, la puissance est certes convenable, mais on en souhaiterait un peu plus. Une lacune que la boîte manuelle arrive à combler même si l'on ne parle que de quelques dixièmes de seconde de différence. La mécanique, comme toujours, est d'une remarquable discrétion, ce qui fait qu'on perÇoit parfois un petit bruit de vent autour de 120 km/h. Sans les avoir conduites l'une après l'autre, je dirais que la nouvelle 530 réussit mieux que l'E320 dans sa tentative d'offrir le parfait compromis entre confort et tenue de route. Surtout avec le groupe Sport, de nombreux allers-retours réalisés pour les besoins de notre cameraman ont permis de négocier des virages assez pointus avec une grande aisance, et cela, avec ou sans le DSC. En plus, la rigidité de la caisse a encore progressé et le niveau de finition est difficile à prendre en défaut. Voilà un bilan routier qui permet à la Série 5 de continuer de revendiquer son titre de berline sport. Toutefois, seul un match comparatif permettra de la juger par rapport à une concurrence qui s'aiguise.

Elle perdra sans doute quelques points à cause de son peu d'espace de rangement et des portières arrière qui ne facilitent pas l'accès mais autrement, il faudra gratter très fort pour ne pas admettre que la Série 5 de BMW constitue toujours la référence dans sa classe. Jacques Duval

Contrepartie

Douée. Très douée, cette nouvelle Série 5. Mais en relisant mes notes, je constate qu'elles n'ont rien de dithyrambique. Suis-je malade, docteur? Rigoureuse, facile à prendre en main, la Série 5 n'est toutefois pas aussi charismatique qu'autrefois. Est-ce la faute de Chris Bangle, le controversé styliste en chef de BMW, apparemment incapable de rendre un dessin homogène d'un pare-chocs à l'autre? Sans doute, mais il y a aussi cette surenchère technologique. Les nouvelles aides à la conduite rendent celle-ci plus sûre, mais plus aseptisée aussi. Si on n'arrête pas le progrès, souhaitons que les artifices électroniques développés par les ingénieurs bavarois soient plus fiables que le modèle essayé en Sardaigne dont le système de direction active a été mis K.-O. après quelques virages? Éric LeFranÇois

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