Buick Park Avenue, une revenante

Publié le 30 mars 2004 dans 2004 par Jacques Duval

Il devait bien y avoir un million d'années (oui, je suis vieux) que je n'avais pas conduit ce que l'on appelle avec une certaine désinvolture « une bonne grosse voiture américaine ». Eh bien ! les retrouvailles ont eu lieu et les constatations sont intéressantes. Car on a toujours l'impression que ces grandes berlines archiclassiques n'ont pas changé d'un iota au cours des 25 dernières années alors que la réalité est tout autre. D'accord, le format est toujours copieux et la clientèle épouse a toujours le même profil, mais ces voitures ont néanmoins suivi le progrès à leur faÇon. Pour étudier le sujet, j'ai conduit le parfait échantillon de ces modèles d'autrefois, la Buick Park Avenue Ultra. Le seul nom de la voiture en dit d'ailleurs long sur son statut. En passant, la marque Buick vient de célébrer son 100e anniversaire, d'où la présence de fausses prises d'air commémoratives en avant des portières. Raison de plus pour renouer connaissance puisque ma deuxième voiture neuve, acquise en 1956, fut justement une Buick Special deux tons grise et bourgogne avec petits hublots.

Si l'on compare la Park Avenue 2004 à son équivalent d'il y a un quart de siècle, force est d'admettre qu'elle accapare moins d'espace sur la route puisqu'elle a effectivement raccourci d'environ 25 cm, sans pourtant perdre du poids. Elle a gagné en revanche une suspension arrière à roues indépendantes en lieu et place de l'essieu rigide d'avant, des freins à disque à l'arrière, des jantes de 17 pouces et une direction à crémaillère. Pas si mal après tout. La plus grosse surprise se cache toutefois sous le capot où le moteur a perdu 2 cylindres mais gagné 80 chevaux grâce à la présence d'un V6 de 3,8 litres à compresseur développant 240 chevaux comparativement aux modestes 160 chevaux du gros V8 de 5,7 litres étouffé par les dispositifs antipollution de l'époque. Dernier détail, moins réjouissant, l'ancienne grosse Buick du milieu des années 1970 coûtait la bagatelle de 8500 $ alors que notre Park Avenue Ultra faisait grimper la facture à 52 945 $.

Rétro quand même

C'est beaucoup d'argent pour une voiture qui, à certains égards, est restée ancrée dans de mauvaises habitudes. Ainsi, les sièges n'offrent aucune espèce d'appui latéral et le coussin d'assise est si profond qu'il coupe la circulation au niveau des cuisses. Pas reposant. Et ce n'est pas le tableau de bord qui va vous faire plonger dans l'ère moderne avec ses formes rectangulaires vieillottes à souhait. Un compte-tours y trouve refuge, mais aucune zone rouge ne vient signaler le régime maximal du moteur. Un joli volant mi-cuir, mi-bois fait de son mieux pour égayer la présentation. Les commandes ne viendront pas non plus vous compliquer la vie, notamment celles de la radio et de l'air climatisé qui sont faciles à manipuler. Aucun angle mort sérieux ne gêne la visibilité sur le monde extérieur et les dimensions importantes de cette Buick Park Avenue Ultra sont bien mises à profit. Autant à l'avant qu'à l'arrière, le dégagement, que ce soit pour la tête, les jambes ou les hanches, est généreux. Et bien entendu, le coffre à bagages est dans la même veine avec ses 541 litres d'espace utile.

Un autre aspect de cette voiture qui fait vieux jeu est sa finition quelquefois bâclée. Dans le cas présent, la console centrale tient du bricolage amateur avec ses porte-verres qui ont l'air d'avoir été oubliés dans le design original. En plus, l'encadrement du toit ouvrant de notre voiture d'essai ne dénotait pas un soin particulier pour le travail bien fait. Pour le prix demandé, on n'a pas tort de s'attendre à mieux.

Du bon et du moins bon

Sur la route, la Park Avenue oscille entre le pire et le meilleur. On y retrouve d'abord le confort typique à ce genre de voiture et un niveau sonore à peine audible à moins qu'on sollicite le moteur à fond. On lui reconnaît la sonorité d'un V6 plutôt que d'un V8 et je n'hésiterais pas à conseiller la version suralimentée qui affiche 240 chevaux contre 205 seulement pour la version à aspiration normale. Même avec le compresseur, les accélérations ne sont pas foudroyantes, mais les reprises s'avèrent très acceptables et la consommation n'a jamais dépassé les 12 litres aux 100 km au cours de mon essai.

Contrairement à de nombreuses tractions japonaises qui ont maille à partir avec un couple moteur trop élevé qui secoue la direction, cette grande Buick n'en ressent presque pas les effets. La transmission automatique à 4 rapports (la seule offerte) continue de prouver que General Motors est passée maître dans la mise au point de ce genre d'équipement. Pas surprenant que même Rolls-Royce et BMW utilisent souvent des boîtes automatiques signées GM.

Alors que l'on pourrait s'attendre à une tenue de route très ordinaire, sachez que la Park Avenue n'a rien d'une BMW mais qu'elle s'applique à négocier les virages avec une certaine aisance dont les acheteurs seront parfaitement satisfaits. Le seul véritable talon d'Achille de cette Buick est sa direction à la fois légère, floue et tout à fait imprécise. Encore là, la clientèle habituelle ne risque pas d'en faire tout un plat.

À certains points de vue, cette grosse voiture américaine typique a conservé des traits de caractère de ses ancêtres. Je pense à son habitabilité, à sa souplesse, à son insonorisation et malheureusement aussi à une finition qui manque de rigueur ou à des sièges qui auraient sérieusement besoin des conseils d'un spécialiste de la bonne tenue. Il serait faux toutefois de prétendre que cette Buick Park Avenue Ultra n'a pas fait un effort pour se mettre au goût du jour. Il s'agit simplement de déterminer si c'est votre genre de goût?

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