Honda Accord, benoîtement compétente
On peut se demander, en examinant de près la Honda Accord, si ce constructeur possède deux équipes autonomes de recherche et développement. Une, extravertie, la « broue dans le toupet », qui planche sur des véhicules comme la S2000, l'Insight ou même l'Element, et une autre qui, en serrant les dents et les fesses, bosse silencieusement dans son coin sur les Civic et les Accord.
Franchement, l'arrière de cette septième génération de la berline Accord est encore moins intéressant visuellement que son bloc-moteur, et ce n'est qu'après avoir vu le joli coupé que mon intérêt est réapparu. On peut comprendre la prudence du constructeur qui commercialise une voiture de grande diffusion. Mais autant ses lignes manquent de mordant, autant ce qui se cache en dessous peut séduire les connaisseurs.
Cinq plaisantes versions
La berline Accord se présente en cinq versions qui devraient plaire à tout le monde. Parlons rapidement de la DX qui, à la base de la gamme, offre quand même la plupart des assistances électriques et l'ABS, mais vous fera regretter quelques porte-verres (on en manque toujours dans le Sahara), le siège conducteur avec support lombaire et hauteur ajustables, un système antivol et, plus sérieusement, des coussins gonflables latéraux en avant. Passons outre la LX qui arrive avec cet équipement mitoyen, et arrivons tout de suite à l'EX, celle que je considère comme la mieux équilibrée et la plus satisfaisante. Elle ajoute le cuir, la température automatique en deux zones, les réglages électriques pour le siège du conducteur et le système de distribution électronique de freinage.
Ces trois versions reÇoivent un moteur quatre cylindres très doux, soyeux même, économe d'essence et silencieux, bref, on ne peut qu'en être satisfait. Il s'accompagne d'une boîte manuelle à cinq rapports au maniement extrêmement agréable ou d'une nouvelle automatique à cinq vitesses, qui se classe déjà parmi les meilleures. Ajoutez 500 $ à votre mise et vous vous trouverez devant un cruel dilemme. Cette somme vous donne droit en effet à la LX V6 avec ses 240 chevaux, un moteur qui fait retourner la concurrence sur sa planche à dessin et qui retranche près de 2 secondes au 0-100 km/h. Par contre, vous devrez vous passer du cuir et de l'air climatisé régulé par thermostat. Pas trop difficile jusqu'ici ? Honda complique encore les choses, car le V6 arrive seulement avec la boîte automatique. Pour mettre fin définitivement à votre embarras, vous pouvez toujours retenir la version EX V6 qui incorpore tous les articles du catalogue, et rivalise presque avec une Acura 3,2 TL.
Des matériaux de belle qualité garnissent l'habitacle et leur montage suscite l'admiration. Contrôles et leviers s'actionnent avec précision, et l'ergonomie donne entière satisfaction, sauf que la grosse molette centrale pour la radio demande une certaine adaptation. Les baquets à l'avant soignent confortablement leurs occupants, même ceux qui sont recouverts de tissu, et l'espace à l'arrière rend tout le monde heureux, à l'exclusion de l'éternel mal loti, le passager du milieu, qui devra souffrir dans son dos le couvercle de la trappe qui relie le coffre à l'habitacle. Incidemment, le dossier de la banquette se replie, mais d'un seul tenant, et seulement à l'aide de la clef, ce qui rend le dispositif moitié moins commode. Pas vraiment génial.
Son châssis équilibré et bien rigide et ses suspensions avant à double bras triangulés et à bras multiples à l'arrière assurent à l'Accord stabilité et précision dans ses réactions à vos impulsions, qu'elles soient induites par le volant ou par le pédalier. Elle demeure confortable même sur nos routes défoncées, ne talonne jamais et décroche très progressivement, trop peut-être, mais il faut dans ce cas porter le blâme sur les pneus de qualité seulement passable, particulièrement les petits 15 pouces de la DX. L'EX reÇoit des 16 pouces avec une cote de vitesse V qui font toute la différence. Les versions tractées par le V6 roulent sur ces mêmes pneumatiques, mais les kilos supplémentaires sur l'essieu avant les rendent plus sous-vireuses. Les distances de freinage restent dans la norme, mais l'ABS sonne l'alerte un peu trop souvent dans la DX.
Un beau coup de passion
Venons-en maintenant aux coupés. Pas de DX, mais un LX et un EX à quatre cylindres, et deux EX avec le moteur V6, dont un disposant d'une boîte manuelle à six rapports. Il aura fallu attendre une éternité pour s'offrir cette heureuse combinaison. Cette nouvelle transmission possède un premier rapport plus court pour une meilleure accélération et une sixième vitesse plus longue pour « cruiser » confortablement. En prime, cette version roule sur de belles roues de 17 pouces chaussées de Michelin performants. Malgré les 240 chevaux, la pédale d'embrayage demeure très douce, et le petit levier « clique » comme un charme d'un rapport à l'autre. Autre bonne nouvelle : aucun effet de couple perceptible. Les performances s'avèrent légèrement supérieures, mais le plaisir de conduire demeure au rendez-vous. Pour le reste, les coupés présentent un habitacle aussi réussi que celui de la berline. Les passagers assignés à l'arrière devront se fendre un peu pour y parvenir, mais l'espace disponible est satisfaisant compte tenu de la configuration.
Que dire de plus, sinon que l'Accord représente un bon achat, toujours éminemment rationnel. Ce résultat flatteur représente le fruit du travail inlassable d'une équipe d'ingénieurs compétents, mais parions que le coupé V6 avec la boîte manuelle est l'?uvre du groupe minoritaire des extravertis. Pour en savoir plus, lire l'essai à long terme dans ces pages.