Isuzu Rodeo, Au revoir ? Adieu ?
Il y a des signes qui ne trompent pas. Lorsqu'un constructeur n'est pas en mesure de renouveler ses photos de presse année après année, lorsque toute question posée à propos d'un modèle ou de la marque n'obtient pas de réponse, il est presque assuré que ces produits ne seront pas de retour. Et pas besoin d'être Sherlock Holmes pour conclure que la marque Isuzu ne sera pas commercialisée au Canada en 2004 puisque le site de GM Canada réservé aux médias ne contient plus aucune information à propos de cette marque.
Au moment d'écrire ces lignes, les deux compagnies sont en pourparlers, mais les déboires cumulés des produits Isuzu au Canada ne permettent pas de se montrer très optimiste. Ce sera au mieux un au revoir de plusieurs mois afin d'établir une nouvelle stratégie de mise en marché et le développement de nouveaux modèles. Mais tout concorde pour que GM du Canada et Isuzu se disent « Adieu ! »
Autopsie d'un échec
Il serait facile de blâmer General Motors du Canada de ne pas avoir consacré suffisamment d'efforts à la commercialisation des utilitaires sport et camionnettes Isuzu au pays. Mais il faut également souligner que si ces produits sont distribués nationalement par les concessionnaires Saab-Saturn-Isuzu, cette dernière marque est autonome aux États-Unis. Donc, pas d'association corporative, mais des discussions d'égal à égal. En fait, des sources bien informées m'ont affirmé que les représentants d'Isuzu aux États-Unis n'ont jamais fait de concessions pour permettre à GM du Canada de mettre le paquet sur le plan de la commercialisation. Les arrivages de véhicules se faisaient au compte-gouttes, les prix étaient généralement peu compétitifs et les pièces de rechange souvent trop chères. Devant les doléances des représentants canadiens, leurs interlocuteurs leur répondaient qu'il se vendait plus de Rodeo en Californie que dans le Canada tout entier. C'était une faÇon polie de dire à GM du Canada d'aller se faire foutre.
Il faut de plus ajouter que certains modèles plus innovateurs tels que l'Axiom et le Rodeo Sport n'ont jamais traversé nos frontières. Et si Isuzu a toujours snobé le Canada, sa situation sur le marché des États-Unis n'est pas au beau fixe non plus. Ses ventes régressent et la compagnie ne semble pas être en mesure de stopper l'hémorragie, malgré l'arrivée de nouveaux modèles.
Si jamais par miracle Isuzu revenait sur le marché canadien en 2004, les deux modèles qui seraient retenus seraient sans doute le Rodeo et l'Ascender. D'ailleurs, ce sont ces modèles 2003 qui seront écoulés si jamais les deux parties ne sont pas en mesure de conclure une nouvelle entente.
Mauvaise tendance
Il ne faut pas attribuer non plus l'échec de cette marque au Canada à la mauvaise la qualité de ses produits. En général, les véhicules Isuzu sont solides, fiables et d'une finition sérieuse. Et même si sa silhouette et son habitacle ne sont pas d'un modernisme à tout casser, les révisions apportées l'an dernier permettent au Rodeo de soutenir la comparaison avec la concurrence. Sur le plan de la mécanique, c'est également correct puisque le V6 de 3,2 litres produit 205 chevaux, ce qui permet de boucler le 0-100 km/h en moins de 10 secondes. De plus, chose rare, il est même possible de coupler ce moteur V6 à une boîte de vitesses manuelle à cinq rapports. La course du levier est précise et l'étagement des rapports ajoute à l'agrément de conduite. Avec son rouage 4X4 à temps partiel, son châssis de type échelle et une garde au sol généreuse, le Rodeo se tire fort bien d'affaire en conduite hors route.
Malheureusement, la tendance du marché est davantage axée vers des VUS privilégiant le confort sur la route et un habitacle plus luxueux. Le Rodeo, bien que possédant de nombreuses qualités, n'a rien pour se démarquer à ce chapitre, d'autant plus que les efforts de commercialisation ont toujours été assez timides. Insérez le Rodeo dans la gamme Kia et cette compagnie va faire un malheur sur le marché. Dans le giron de GM, il s'agit d'un autre modèle, sans plus.
L'an dernier, l'Ascender devait faire son entrée sur notre marché en remplacement du Trooper, un gros 4X4 de luxe à bout de souffle. Malheureusement, ce modèle ne s'est jamais matérialisé. Si jamais quelques exemplaires ont été distribués dans le réseau canadien, ce fut un secret fort bien gardé. C'est dommage puisque ce modèle avait plusieurs qualités plaidant en sa faveur. Il s'agissait en fait d'une version dérivée des Chevrolet TrailBlazer et GMC Envoy. Il était donc équipé du même châssis autonome, du moteur six cylindres en ligne de 4,2 litres produisant 275 chevaux et d'un rouage intégral Torque on Demand exclusif à Isuzu. De plus, l'équipement de série était plus complet que celui des modèles commercialisés dans le réseau GM du Canada.
Cela n'aurait quand même pas été suffisant pour sortir Isuzu de l'ornière au Canada. Par exemple, pourquoi les gens se procureraient-ils un Ascender alors que les TrailBlazer et Envoy sont pratiquement identiques en plus de jouir d'une plus grande distribution et d'une meilleure réputation ?
Il faut également ajouter que cette marque a tenté à plusieurs reprises de se faire une place au soleil dans le secteur des camionnettes légères. Le dernier modèle en lice étant le Hombre, dérivé des camionnettes Chevrolet S-10/GMC Sonoma. Encore là, c'était trop peu, trop tard puisque ce modèle, à part une appellation quelque peu exotique pour un pays du nord, ne se démarquait en rien des autres camionnettes sur le marché. Du moins certainement pas par le fait qu'il était assemblé au Mexique ! Enfin, le Canada n'a jamais voulu du Axiom qui aurait pu connaître du succès.