Land Rover LR3, un nouveau « canal D »

Publié le 23 mars 2005 dans 2005 par Jean-Georges Laliberté

Alors que la plupart des constructeurs présents sur le marché des véhicules utilitaires sport semblent mettre l'accent sur le facteur « sport » de l'équation, Land Rover qui, rappelons-le, fait partie depuis l'an 2000 du groupe « Premier Automotive » propriété de Ford, a décidé de continuer sur la voie qui a rendu ses produits célèbres de par le monde, soit celle du tout-terrain. Le nouveau LR3 qui remplace le Discovery représente le premier résultat tangible de cette prise de position. J'ai pu m'en rendre compte récemment lors de sa présentation aux médias au nord de l'Écosse, alors que le rude climat et le relief rigoureux de ce pays se sont ligués pour lui faire passer une épreuve des plus sévères.

Châssis original et inédit

À la vue de sa carrosserie à la fois simple, moderne, et résolument fonctionnelle, on comprend immédiatement que l'on a affaire à un battant, et non pas à une automobile déguisée en baroudeur du dimanche. Le capot en aluminium presque horizontal, les portières démunies de la moindre fioriture, et la ligne du toit qui s'élève au-dessus du compartiment arrière, donnent à l'ensemble un aspect qui amalgame la silhouette imposante du Range, et la généreuse partie arrière surélevée du Discovery. Si on pouvait retirer la tôlerie, on serait en mesure de découvrir une nouvelle plate-forme extrêmement résistante à la torsion et au pliage, que ses concepteurs appellent Integrated Body-Frame, en fait, une plate-forme monocoque renforcie par de robustes pièces d'acier hydroformées. Portons aussi à son mérite de généreuses cotes d'habitabilité, puisque sa longueur hors tout s'étire sur 13 centimètres supplémentaires, sa largeur sur deux centimètres, et que son empattement gagne spectaculairement 34 centimètres. Précisons, pour ceux qui craignent que le ciel ne leur tombe sur la tête dans les stationnements couverts, que sa hauteur diminue de cinq centimètres.

En ouvrant la longue portière avant, on découvre avec satisfaction une cabine à l'allure fonctionnelle, luxueuse même, puisque réalisée avec des plastiques moussés de qualité, de cuirs souples et de bon calibre, et quelques touches de plastique/aluminium assez convaincantes. Face au conducteur, une planche de bord très simple et aux formes géométriques, regroupe des commandes commodément agencées, comme si l'équipe responsable des réalisations antérieures et farfelues de la marque à ce chapitre avait été licenciée. La très vaste surface vitrée assure une excellente visibilité à tous les occupants, et la position de conduite élevée permet au conducteur d'anticiper tous les obstacles qu'il rencontre. Les passagers à l'arrière accèdent à leur siège aisément par une grande ouverture, et celui du milieu peut bénéficier d'une assise confortable, bien que la protubérance centrale au plancher le forcera à écarter les jambes. Moyennant supplément, le LR3 peut recevoir deux autres passagers sur une troisième rangée de petits sièges escamotables. Malgré les apparences, leur confort s'avère suffisant pour un éventuel dépannage, mais il faut cependant reconnaître que la soute à bagages devient alors pratiquement symbolique. Lorsque les dossiers de ces petits strapontins sont repliés, formant ainsi un plancher très plat, la capacité du coffre de forme régulière atteint des valeurs considérables. On y accède par une large ouverture asymétrique à l'arrière, la partie supérieure formée de la lunette qui s'ouvre indépendamment vers le haut, et la partie inférieure par un panneau moins large à droite, permettant d'accéder facilement au fond de la soute. Innovant, et vraiment bien conçu !

Le LR3 se décline en deux versions, soit un SE et un HSE. Les deux embarquent un nombre considérable d'équipement et d'accessoires, le HSE se démarquant avec un écran central tactile, un système de navigation à commande vocale, une chaîne stéréo de 600 watts, des roues en alliage de 19 pouces (le SE roule sur des 18 pouces) des phares bixénon qui suivent la route, et des réglages à mémoire pour les sièges antérieurs.

Groupe motopropulseur unique

Alors que le Discovery se contentait d'un vieux V8 de 4,6 litres libérant assez poussivement 217 chevaux, le LR3 propose un bloc ultra moderne cette fois, puisqu'extrapolé du 4,2 litres Jaguar, sa cousine par la fesse gauche. Coiffé d'une culasse DACT à 32 soupapes, et conçu pour offrir un couple abondant sur une longue plage d'utilisation (315 lb-pi à 4000 tr/min), ce V8 4,4 litres délivre avec aisance la puissance de 300 chevaux. Il dispose des services d'une boîte automatique séquentielle ZF à six rapports avec mode Sport, alors que son prédécesseur devait se contenter d'une simple quatre rapports. Un V6 4 litres de puissance encore indéterminée doit faire son apparition au cours des mois à venir. Le LR3 pèse cependant très lourd,

2 461 kilos pour être plus précis, soit 226 kilos de plus que le « Disco », lui même un mastodonte dans son genre. Un peu d'arithmétique nous amène à un rapport poids/puissance de 8,2 kilos/cheval, par rapport à 10,3 kilos/cheval pour son devancier. Ces résultats se traduisent par des accélérations plus vives, puisqu'on retranche facilement deux secondes pour réaliser le 0-100 km/h, et des reprises tonifiées.

Vive l'indépendance !

En empruntant certains éléments mécaniques et électroniques éprouvés du Range Rover et du Discovery, les ingénieurs de Solihull ont réussi à les intégrer au LR3, tout en y ajoutant des caractéristiques nouvelles, pour en arriver à un ensemble qui, à mon humble avis, dépasse en efficacité tous les produits antérieurs de la marque.

Les suspensions traditionnelles à essieu rigide cèdent heureusement le pas à des éléments complètement indépendants, supportés par des ressorts pneumatiques ajustables pour changer l'assiette, et par deux triangles à chaque extrémité. Elles sont reliées transversalement par des conduites à air, afin de permettre à la caisse de conserver son assiette. Les arguments en faveur d'un tel choix technique vont de soi : confort accru, capacité de franchissement supérieures, et guidage précis. Les résultats apparaissent tangibles sur la route, alors que le LR3 démontre un roulement beaucoup plus doux et mieux contenu, et que le roulis reste dans les limites acceptables, sans que l'on puisse le comparer directement à un BMW X5 à ce chapitre. La direction à crémaillère demeure précise en toutes circonstances, bien qu'un peu muette sur ses rencontres, mais cette dernière caractéristique se fait apprécier lorsque la route devient méchante, ou qu'elle disparaît complètement.

Un char d'assaut

Mais c'est vraiment lorsque les choses se gâtent, que le LR3 épate par sa résilience. Son arsenal mécanique et électronique composé d'un antipatinage indépendant sur chaque roue (ETC) d'un système de stabilité électronique (DSC), du système de retenue en pente (HDC), d'un freinage ABS auquel sont joints un répartiteur électronique de la force de freinage (EBD) et une assistance aux arrêts d'urgence, permet d'envisager avec sérénité la rencontre avec les pires éléments naturels du terrain. Sans parler d'une boîte de transfert à gamme basse et des différentiels central et arrière à commande électronique. Conscient de l'extrême complexité de ces systèmes, et, avouons-le, des limites rapidement atteintes par la plupart des conducteurs pour leur utilisation optimale, les responsables de leur application décidèrent sagement de leur adjoindre une unité de commande très simple, leur imposant d'agir en concert en fonction du type de défi à relever. Appelée "Terrain Response", cette interface se compose d'une grosse molette sur la console centrale, permettant de sélectionner: conduite normale, herbe, gravier, neige, boue, ornières, sable, et terrain rocheux. Par ailleurs, le conducteur dispose de deux petits leviers électriques, un pour engager la gamme de rapport court, l'autre pour ajuster la hauteur de la caisse, et aussi d'un interrupteur pour actionner le Hill Descent Control en pente descendante. Résultat de cette débauche technologique ? Après avoir sélectionné le type de terrain ou revêtement vers lequel on se dirige, et chaussé de banals pneus toutes saisons Goodyear Wrangler P255/55R19 111V, le LR3 avance résolument au milieu des surfaces les plus glissantes, monte et descend des pentes impossibles à négocier sur deux pattes, franchit des gués profonds de 70 centimètres, des terrains rocheux à s'en casser les chevilles, tout en requérant un minimum d'interventions de la part de son pilote.

À titre de bilan de mes deux jours d'essai en terrain hostile, sur des routes inconnues, étroites et détrempées, en conduisant dans la voie de gauche avec un volant à droite bien entendu, il m'est permis d'en arriver aux conclusions suivantes : le LR3 corrige de façon convaincante la plupart des irritants rencontrés sur le Discovery, et son efficacité sur n'importe quelle surface apparaît impressionnante, alors qu'il démontre un confort et un comportement routier supérieurs au reste de la gamme du constructeur britannique. Reste à savoir si la fiabilité sera au rendez-vous. Seule l'expérience pourra répondre à cette question, mais le sérieux avec lequel le défi a jusqu'ici été relevé permet d'espérer un constat positif en cette matière.

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