Porsche Cayenne S/Turbo, la quintessence de l'inutilité ?

Publié le 28 mars 2005 dans 2005 par Denis Duquet

Si jamais un véhicule a été créé pour ne rien faire, c'est bien le Cayenne. Mais avant de m'inonder de courriels pour protester contre un tel blasphème envers une marque aussi réputée, laissez-moi au moins vous expliquer ma position. Quelque chose d'inutile est un objet qui ne sert pas. Dans le cas du Cayenne, vous allez me répliquer que ses propriétaires s'en servent. Bien entendu, à moins d'être complètement fêlé, personne ne s'achètera un véhicule dont le prix dépasse les 100 000 $ pour le laisser dans son entrée de garage. Mais sert-il vraiment à défier les obstacles dans la forêt, à vous permettre de franchir les bourbiers les plus intimidants ou à rouler sur des routes archi secondaires de la forêt boréale ?

Bref, les ingénieurs de Porsche ont réalisé un véhicule doté de caractéristiques mécaniques et dynamiques dans une classe à part mais il est peu probable qu'il soit vraiment utilisé en tant que VUS. Tout au plus un véhicule multifonction très doué et c'est pour cette raison que plusieurs publications ou associations de journalistes ont souligné son caractère inutile. Le Cayenne a toutes les apparences et les caractéristiques d'un VUS, il en possède les capacités, mais personne ne l'utilisera comme tel. Il est donc inutile en tant que VUS.

Pourquoi diable ?

Lorsqu'une mode influence un marché, ces tendances se multiplient et se raffinent jusqu'au point de dépasser la mesure. Je crois que le Cayenne a outrepassé les limites de la catégorie. Personne ne viendra me convaincre qu'un VUS propulsé par un moteur biturbo de 450 chevaux est une absolue nécessité en forêt. Par contre, vous vous rendrez sur votre territoire de chasse en un temps record puisque ce bolide peut rouler jusqu'à une vitesse maximale de 266 km. Et en dépit de ses dimensions encombrantes, de son centre de gravité élevé et d'un poids excédant 2 000 kg, il tient la route de façon impressionnante. Mais les lois de la physique sont toujours là, mieux vaut se servir davantage de son jugement que de son pied droit.

Il ne faut pas uniquement se limiter à ce superbe moteur turbocompressé dont les performances seraient appréciées dans bien des berlines huppées. Si le prix exorbitant de la version Turbo vous donne des boutons, le modèle S est propulsé par un moteur V8 atmosphérique de même cylindrée ne produisant qu'un « modeste » 350 chevaux ! Cette puissance est adéquate c'est certain, mais puisque le Cayenne est un véhicule de plus de deux tonnes, cette cavalerie n'est pas superflue. Ce qui m'amène au moteur V6 de 3,2 litres lancé au début de 2004. Cette fois, les origines sont plus modestes puisqu'il provient de chez Volkswagen. Et pas besoin d'être snob pour l'ignorer. Ses 247 chevaux ne sont pas à la hauteur de la tâche. Cette constatation est purement basée sur les lois de la physique puisque ce moteur a pour tâche de déplacer avec un minimum de vélocité une masse de 2 355 kg ! Tous ces modèles sont livrés avec la boîte Tiptronic S fabriquée par Aisin, un fournisseur japonais. Soulignons que la compagnie Porsche a joué un rôle de précurseur dans le secteur des transmissions manumatiques. D'ailleurs, les commandes de passage des rapports montées sur le volant s'avèrent pratiques de temps à autre.

Toujours au chapitre de la sophistication de la mécanique, le Cayenne est doté d'un ingénieux système de contrôle de la traction qui permet, en conditions normales, de rouler avec 62 % de la motricité disponible aux roues arrière. Lorsque l'adhérence s'amenuise, cette répartition du couple varie et peut même se diriger en priorité à la roue qui a la meilleure adhérence. Sans vous décliner l'alphabet de toutes les abréviations des systèmes embarqués dans le Cayenne, sachez que cette Porsche des champs et des sentiers est équipée d'un système de stabilité latérale et d'une suspension active de série sur la Turbo et optionnelle sur la S. Il s'agit d'une suspension pneumatique qui peut hausser la garde au sol jusqu'à 27,3 cm ou encore l'abaisser jusqu'à un minimum de 19 cm. Et si cela ne réussit pas à vous épater, il est également possible de verrouiller les différentiels central et arrière !

Ayoye !

Le Cayenne est donc surdoué à presque tous les niveaux à l'exception de la silhouette qui est l'une des plus controversées qui soit. Si les stylistes du Volkswagen Touareg s'en sont tirés avec les honneurs, ceux de Stuttgart se sont carrément plantés. Les larges ouvertures pratiquées à l'avant pour alimenter en air le moteur turbo lui confèrent une allure de véhicule auquel il manque des pièces de carrosserie. Il semble également que les phares en forme d'amande typiques à Porsche ne font rien pour arranger les choses. En contrepartie, il faut admettre que la section arrière est mieux réussie sur le plan visuel.

Par contre, l'habitacle est beaucoup plus élégant avec un tableau de bord qui fait moins ringard que celui de la 911 et dont la disposition des commandes est impeccable, tandis que les sièges avant sont confortables et offrent un excellent support latéral.

Cette Porsche est vraiment unique à plus d'un point de vue. Ses performances sont impressionnantes bien que les chiffres du constructeur nous semblent optimistes. Sa tenue de route est superbe pour un tel mastodonte et son rouage intégral sophistiqué. Dommage que tous ces efforts ne servent qu'à circuler sur la route !

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