Chevrolet Camaro ZL1 et Chevrolet Corvette ZR1, la consonne qui change tout
Malgré un monde où le politiquement correct a préséance, où la sécurité prime sur le plaisir et où le litre d’essence commence à être dispendieux, la course aux chevaux-vapeur a repris de plus belle, comme du temps des muscle cars des années 60 et 70.
En ces temps comme aujourd’hui, Chevrolet proposait des versions ultrapuissantes de sa Camaro et de sa Corvette, déjà suffisamment puissantes! Par exemple, la Corvette 1970-1971 et 1972 offrait une version ZR1. Puis cette appellation est revenue entre 1990 et 1995. Et, depuis 2008, la ZR1 est la Corvette la plus puissante jamais produite. En 1969, la Corvette ZL1 disposait d’un moteur tout aluminium de 427 pouces cubes développant 430 chevaux. On chuchote que la puissance réelle de ce monstre mécanique était plutôt de 485 chevaux… La ZL1 revient, cette fois en tant que version la plus puissante de la Camaro 2012.
ZR1 et ZL1, deux dénominations populaires associées depuis longtemps à Chevrolet. D’ailleurs, lors du dévoilement de la récente Camaro ZL1, les ingénieurs de la marque au nœud papillon n’hésitaient pas à comparer cette dernière avec la ZR1.
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Certes, ces deux bêtes ne s’adressent pas au même public. L’une est une voiture biplace, l’autre en offre quatre. La ZL1 est une brute de puissance, un muscle car moderne, tandis que la ZR1 est une sportive aguerrie qui se frotte aux Porsche Turbo S et autres Ferrari 458 Italia à une fraction du prix.
Les ZR1 et ZL1 partagent plusieurs éléments techniques (moteur, transmission, suspension magnétique et, surtout, équipe d’ingénieurs) mais elles vivent différemment leur passion…
Chevrolet Camaro ZL1
Retour en 1969!
En réponse à la fabuleuse Shelby GT500 2012 de 550 chevaux, Chevrolet vient de dévoiler la Camaro ZL1 de 580 chevaux. Pour 2013, la GT500 produira 650 chevaux. Je serais prêt à parier un vieux 5 $ que chez Chevrolet, on regarde déjà comment « booster » la ZL1 actuelle!
Mais avant d’augmenter la puissance de la ZL1, pourquoi ne pas profiter de la version actuelle? Cette nouvelle Camaro, c’est d’abord un moteur. Et pas n’importe lequel. C’est celui de la Corvette, un peu moins puissant, cependant. Il s’agit d’un 6,2 litres à tiges de poussoir (push rod en bon français de garage) doté d’un surcompresseur qui n’a sans doute pas la sophistication d’un moteur de Porsche 911 mais qui en a la puissance. Quand on parle de 580 chevaux et 556 livres-pied de couple, le respect est de mise. General Motors n’a toujours pas dévoilé la consommation, toutefois, le 15,1 L/100 km obtenu en conduite pépère sur des routes secondaires incite à prendre une seconde hypothèque pour payer quelques tours de piste à haute vitesse… En passant, la vitesse maximale de la ZL1 est de 296 km/h.
Entre le générateur d’équidés et les roues arrière se trouve une boîte manuelle Tremec à six rapports tout simplement géniale. Les amateurs de puissance seront déçus d’apprendre que la ZL1 peut aussi être dotée d’une transmission automatique. Ben oui, une automatique dans une voiture de performance. Et, comme c’est devenu la norme, les tours de circuit les plus rapides ont été enregistrés avec cette boîte... qu’on le veuille ou non!
Lancée sur le circuit très technique du Virginia International Raceway, cette nouvelle Camaro nous a prouvé qu’elle a le côté brute des muscle cars d’antan et qu’elle a le côté civilisé des voitures d’aujourd’hui. Le châssis s’avère très, très solide, les freins Brembo − les mêmes que sur la Cadillac CTS-V − sont d’une puissance inouïe (heureusement puisque la voiture est loin d’être légère avec ses 1 850 kilos!) et le ratio de la direction a été revu pour être encore plus serré que dans la SS. La suspension magnétique Magnetic Ride 3.0, comme dans la Corvette ZR1, est d’une nouvelle génération et réagit avec une vitesse jusque-là inégalée. La ZL1 affiche un équilibre étonnant et attaque les courbes avec aplomb. Un bon pilote peut, en jouant de l’accélérateur, faire pivoter l’arrière en sortie de courbe. En freinage extrême, cependant, l’arrière devient un peu plus « léger ».
Merci PTM
Là où cette Camaro marque des points par rapport à la Shelby, c’est au niveau du PTM (Performance Traction Management). Ce système de contrôle de la traction et de la stabilité latérale propose cinq modes. Le niveau 1 convient pour la route, alors que toutes les aides veillent au grain. À l’autre bout du spectre, le niveau 5 est réservé aux pilotes expérimentés, capables de maîtriser la puissance et le couple phénoménal. Les pilotes du dimanche seraient avisés d’expérimenter les limites d’un niveau avant de passer au suivant.
La ZL1, aussi sportive soit-elle, est, d’abord une Camaro. La visibilité tout le tour est, au minimum, pourrie, les places arrière sont pénibles et le coffre est aussi tourmenté qu’un artiste en peine d’amour. Cependant, le volant n’est pas le même que dans les autres versions, une excellente nouvelle. Et, curieusement, la ZL1 est plus confortable qu’une SS, merci à la suspension magnétique.
Cette brute pas trop épaisse se détaille 58 000 $, une aubaine. Mais le problème n’est pas son prix. Au moment d’écrire ces lignes (fin mars 2012), la production de la ZL1 a été stoppée pour un problème dont GM refuse de dévoiler la teneur. Il y a donc fort à parier que les modèles 2012 seront peu nombreux puisque la production des 2013 débutera bientôt. D’ailleurs, la ZL1 cabriolet sera dévoilée en tant que 2013.
Corvette ZR1
Fusée de calibre olympique
La Corvette ZR1 porte un code d’option et une appellation légendaires aux yeux des fanatiques de sportives américaines des années 60 mais elle n’a rien de rétro. L’équipe qui l’a développée a utilisé au contraire les techniques et composantes les plus modernes. Elle a créé une Corvette capable de concurrencer les plus grandes voitures sportives et exotiques pour un prix de 100 000 $ (US).
La ZR1 a été lancée comme modèle 2009. Elle est propulsée par un V8 compressé de 638 chevaux qui pouvait boucler le 0-60 mi/h (0-96,5 km/h) en 3,4 secondes et atteindre 330 km/h (ou 205 mi/h) en vitesse de pointe. Assez pour rosser une Lexus LFA au quart du prix!
Mieux encore, cette Corvette affiche une tenue de route impressionnante et une civilité rare pour une grande sportive, grâce à des amortisseurs à variation magnétique d’invention américaine comme en portent les Audi R8 et Ferrari 458. La ZR1 était également équipée de freins carbone-céramique Brembo qui réduisent le poids non suspendu de 5 kg pour chaque roue, ne grincent pas, résistent à tout et ne souillent jamais de poussière noire ses grandes jantes d’alliage.
Valeur sûre
À son lancement comme modèle 2009, la nouvelle ZR1 se vendait 103 900 $ US et 125 000 $ chez nous. Ce fut avant tout un succès de critique puisque les ambitions de Chevrolet n’ont jamais été démesurées en termes de ventes. La marque plus que centenaire a cependant fait son boulot et la réputation de la ZR1 est telle que les modèles 2009 ont conservé environ 85 % de leur valeur, selon Kelley Blue Book, le grand spécialiste américain en valeur de revente.
La reine des Corvette était réussie dès le départ, surtout côté mécanique, performance et tenue de route. Elle a du reste très peu changé depuis. Pour son deuxième anniversaire en 2010, elle a reçu un bidule électronique baptisé Performance Traction Management (PTM) qui s’accompagne d’un mode départ-canon. Elle le prête d’ailleurs à la nouvelle Camaro ZL1.
Il s’agit en fait d’un logiciel qui gère simultanément l’antipatinage, l’antidérapage, les amortisseurs à variation magnétique mentionnés plus haut et la servodirection électrique. En plus de moduler le couple moteur un millier de fois par seconde pour exploiter au maximum la motricité en accélération longitudinale, le PTM permet des sorties de virage sans infarctus sur un circuit, même en enfonçant l’accélérateur au plancher!
Étalon en piste
Parlant circuit, la Corvette ZR1 est fascinante, excitante et parfois un brin terrifiante à piloter sur piste. C’est ce que j’ai découvert lors du lancement sur un diabolique parcours asphalté qu’on a baptisé Lutzring en l’honneur de l’ex-patron du développement chez GM, Robert Anthony Lutz dit « Bob ».
Mes premières sorties m’avaient déjà permis de goûter la musique envoûtante et les performances féroces du 6,2 litres compressé de la ZR1. Le son est plus aigu qu’avec cette brute atmosphérique de 7 litres (le mythique 427 pouces cube) qui rugit sous le capot de la Z06 et le V8 LS9 de la ZR1 est moins rugueux, mais il vous plaquera quand même sans pitié contre votre dossier en pleine accélération. Sur la route, c’est un gros matou qui ronronne et se réveille seulement lorsque l’aiguille passe le cap des 3 000 tr/min et que s’ouvrent les deux derniers embouts de l’échappement quadruple, doublant du coup la note d’échappement.
Mes deux tours avec l’ingénieur Tony Rifici m’ont fait découvrir le potentiel de la ZR1. De retour au volant, j’ai chargé les pneus avant au maximum en amorce de virage et la ZR1 a pivoté ensuite doucement et je n’ai eu qu’à doser la dérive des quatre roues du pied droit. J’ai même désactivé progressivement les systèmes électroniques sans avoir de sueurs froides. Sur la route, on oublie ça et on laisse ces systèmes activés.
De calibre mondial
Le groupe Corvette en a remis une couche pour 2012 en offrant l’option PDE qui comporte une version évoluée du système PTM et de nouveaux pneus Michelin Pilot Sport Cup Zero Pressure presque lisses, montés sur des jantes encore plus légères. Tout ça a permis de retrancher une demi-douzaine de secondes du précédent chrono de la ZR1 sur la célèbre boucle nord (Nordschleife) du Nürburgring. Elle l’a complétée en 7:19.63 minutes. À titre de comparaison, la Camaro ZL1 a inscrit un chrono de 7:41.27 minutes.
Les acheteurs de ZR1 peuvent également se réjouir des nouveaux sièges plus sculptés qu’on y installe désormais. Voilà qui devrait corriger le pire défaut de cette grande sportive : le manque de maintien latéral. La ZR1 a été critiquée aussi pour l’aspect décevant de son habitacle, même si ses créateurs avaient fait appel à des spécialistes très cotés. Malgré les retouches apportées, il faudra attendre la 7e génération de la Corvette pour avoir mieux.
De toute manière, ce sont les performances hors-normes, la tenue de route affutée, le moteur fabuleux et le raffinement étonnant de la ZR1 en conduite normale qui en font une sportive d’exception. C’est plus qu’assez pour se faire aimer.
Ce match comparatif a déjà été présenté dans le Guide de l'auto édition magazine de mai-juin 2012.