Guide Auto: Louer ou acheter? Là est la question...

Publié le 9 décembre 2013 dans Conseils: Protégez votre auto par Nadine Filion

« Ceux qui veulent conserver leur voiture ne devraient jamais la louer, ils devraient dès le départ l'acheter. » Ce conseil, vous l'avez déjà entendu? Et vrai qu'il a du sens. Mais pas dans toutes situations...

Alléché par cette location d'une voiture à « seulement 199 $ par mois », alors que son achat demande presque le double? Attention : c'est une grossière erreur de penser que la location ne coute pas cher. « Même que c’est là l’une des illusions les plus dévastatrices », dit Éric Brassard, planificateur financier chez Brassard, Goulet, Yargeau et auteur du livre Finance au volant.*
Certes, la location rend les modèles plus « accessibles » – et c'est logique : on ne paie qu'un temps déterminé (généralement trois ou quatre ans) d’utilisation du véhicule. Mais « petit paiement » n’est pas synonyme de faible cout pour autant.

D'abord, en fin de bail, le « petit paiement » en question aura représenté des milliers de dollars versés pour une voiture qui ne nous appartient toujours pas. On veut la conserver? Il faudra débourser la valeur résiduelle – une somme qu'il faudra bien trouver quelque part (marge de crédit? prêt personnel?) et ce, à des taux habituellement plus élevés que chez le concessionnaire.

On veut la rendre, cette voiture? Attention que les éraflures et les pneus ne soient pas en deçà de l'usure normale et que le kilométrage alloué ne soit pas allègrement dépassé...

Le plus important : le taux!

Au-delà de la « petite mensualité », il faut analyser l'ensemble de l'équation, à commencer par le plus important : le taux d'intérêt. D'ailleurs, avez-vous noté que les faibles mensualités de la location cachent souvent des taux... plus élevés que ceux de l'achat? Règle générale, la meilleure transaction est celle qui mise sur le plus petit taux d'intérêt possible (et le plus court terme de financement possible).

Ce qui a encore plus de sens, économiquement parlant? C'est de conserver longuement sa voiture. Car on aura beau triturer les chiffres, un fait demeure : plus que l'entretien, bien plus que le carburant et même plus que l'entretien et les réparations, c'est la dépréciation qui coute « automobilement » le plus cher. « Ce n'est pas un mythe, dit Dennis DesRosiers, grand manitou de la statistique automobile au pays : selon les modèles, un véhicule perd la moitié de sa valeur après trois à cinq ans. »

C'est dire que celui qui troque son véhicule pour un neuf tous les trois ou quatre ans contracte chaque fois une nouvelle dette, paie de sempiternels intérêts et subit encore et toujours la couteuse dépréciation. « La seule manière d'amoindrir le choc, c'est de répartir la dépréciation sur le plus grand nombre d'années possible », dit le planificateur Éric Brassard.

L'actuaire financier Dany Provost (Desjardins Sécurité Financière) a fait le calcul : L'acheteur qui, pendant 12 ans, fait durer sa Honda Civic (la voiture la plus vendue au Canada), entretien et réparations compris... versus l'automobiliste qui, pendant cette même période, loue trois Honda Civic neuves, épargnera sur plus d'une décennie presque le cout de la voiture elle-même, soit 16 000 $ en dollars de 2013.

Quand la location devient intéressante

Quand même : la location peut, dans certaines situations, être avantageuse, et plus sensée que l'achat.

1) Quand le taux est plus avantageux
Les taux d'intérêt varient grandement, selon les termes, mais aussi selon les marques, et aussi les différents modèles d'une même marque. Et il arrive en quelques occasions que le taux à la location soit le même, voire meilleur qu'à l'achat.

Et alors, ça devient intéressant : « Car à taux semblables, la location et l'achat sont deux options qui s'équivalent, dit M. Brassard. De fait, la location constitue un mode d'emprunt comme un autre, mais dont le solde n'est pas nul à l'échéance. » Ce mode d'emprunt, il faut néanmoins l'utiliser intelligemment. L'argent dégagé pourrait ainsi être versé dans un RÉER, ce qui fera épargner de l'impôt, ou placé dans un CELI, afin d'avoir sous la main de quoi racheter la voiture en fin de bail.

Attention : avec ses faibles mensualités et ses tours de passe-passe du genre « paiements hebdomadaires », la location ouvre la porte à la tentation d'une voiture plus grande, mieux équipée, plus luxueuse... et plus chère. C'est bien beau, une « BMW pour seulement 150 $ par semaine », mais rappelez-vous que plus on monte en gamme, plus le véhicule coutera cher d'entretien...

2) Quand le budget est très serré

La location peut être profitable dans le cas d'un budget très limité, où quelques dollars peuvent faire la différence.

Le taux d'intérêt est plus élevé en location qu'à l'achat? Oui, mais peut-être que la mensualité de 146 $ en location est le maximum que peut payer l'automobiliste au budget serré – et que les 67 $ de plus par mois pour son achat sont hors de prix pour lui. Mais alors, il faut se discipliner : l'argent épargné devra servir à rembourser des dettes à taux plus élevés – une carte de crédit, par exemple.

Attention à la valeur résiduelle : plus le concessionnaire la fixe basse, plus les mensualités seront élevées et le client défrayera alors une trop grande part de l'utilisation du véhicule. (Obtenez une estimation de la valeur de revente des véhicules, tant neufs qu'usagés, sur le site de Canadian Black Book).

3) Quand on veut changer de voiture comme de chemise
Pour ceux qui aiment changer de voiture comme de chemise, la location a l'avantage, versus l'achat, d'établir à l'avance ce que vaudra le véhicule à la fin du bail.

Il s'avère un citron ou il a dû être réparé après une collision? Un propriétaire assumera fort probablement une perte lors de sa revente, alors qu'un locataire pourra au contraire s'en débarrasser simplement en rendant les clés – et sans se soucier de le mettre en vente, rencontrer les acheteurs, en négocier le prix... De même, pour les travailleurs autonomes, la fiscalité entre en ligne de compte et « on doit alors faire des simulations incluant les paramètres fiscaux avant de prendre une décision éclairée quant au meilleur scénario », dit l'actuaire Dany Provost.

Reste que ceux qui louent à répétition contractent des dettes automobiles pour l'éternité.

Et comme disait Woody Allen : « L’éternité, c’est long. Surtout vers la fin. »
 

* Finance au volant, par Éric Brassard (Brassard, Goulet, Yargeau), février 2003, 25,95 $, www.ericbrassard.com

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