Route 66, culture américaine comprise

Publié le 1er décembre 2014 dans Événements spéciaux par Alain Morin

La plus ancienne voie de circulation au Québec serait le chemin du Roy, reliant Montréal et Québec. On n’en parle jamais, malheureusement. Il nous faut quelque chose de plus grandiose, du plus marquant, de plus… américain.

Récemment, Nissan Canada et son dynamique représentant, Didier Marsaud, ont permis à une dizaine de journalistes canadiens de participer à un événement pour le moins particulier, « faire » la Route 66, route mythique dans le monde s’il est une! Même si ce n’était pas le chemin du Roy, votre humble serviteur, toujours prêt à en faire plus pour ses lecteurs, a embarqué dans l’aventure avec plaisir!

3 940 km au cœur de l’Amérique

La Route 66 part de Chicago et s’étend jusqu’à Santa Monica en banlieue de Los Angeles. Créée officiellement le 11 novembre 1926, cette route allait permettre à des milliers d’Américains de fuir les misères du Midwest durant la Grande Dépression qui a suivi le krach boursier de 1929 pour aller trouver fortune en Californie. Ou la pauvreté dans la plupart des cas... Ceux qui ont fait de l’argent sont ceux qui ont eu la bonne idée d’installer un commerce (restaurant, garage, motel, etc.) sur la Route 66. Le touriste, captif de la route, n’avait pas d’autres choix que de s’arrêter pour faire le plein d’essence, de nourriture ou de repos.

Vers la fin des années 40, l’automobile se démocratise et l’argent est enfin moins rare qu’avant. Pour attirer le touriste, les commerçants de la Route 66 rivalisent d’imagination en créant des concepts tous plus extravagants les uns que les autres. Ce faisant, et sans doute sans le savoir, ces commerçants créaient un engouement qui allait faire de la Route 66 une des routes les plus connues au monde.

Là où l’on peut coucher dans un wigwam

Le parcours de la Route 66, qui n’a été pavée au complet qu’en 1938, passe par l’Illinois, le Missouri, l’Oklahoma, le Kansas, le Texas, le Nouveau-Mexique, l’Arizona et, enfin, la Californie. Puisque plusieurs parties de la route traversent des réserves amérindiennes, il est normal que la culture des Hualapai, entre autres, soit mise en évidence. C’est ainsi qu’à Holbrook en Arizona, on peut coucher dans un wigwam! J’imagine que dans les années 50 plusieurs enfants devaient supplier leurs parents de les amener coucher là!

En juin 1956 toutefois, c’est le début de la fin. Le gouvernement Eisenhower promulgue l’Interstate Highway Act, un décret qui injecte 25 milliards de dollars pour la construction d’autoroutes, question de vitaliser une économie qui allait pourtant déjà très bien. À partir de ce moment, de moins en moins de personnes fréquentent la 66, les autoroutes les amenant à destination bien plus rapidement. D’ailleurs, le film d’animation Les Bagnoles (Cars), bien que très drôle, raconte la triste histoire du déclin de la Route 66.

L’influence Cars

Radiator Springs, la ville vedette du film est, en fait, un amalgame de plusieurs villages pittoresques qu’on retrouve sur la route 66. À présent, il ne reste plus qu’une petite partie des commerces qui bordaient cette voie historique. Certains sont encore en activité, d’autres sont en état de décrépitude et la plupart n’existent tout simplement plus.

Aujourd’hui, la 66, déclassée en juin 1985, ne subsiste que par bouts. Plusieurs de ces tronçons restants sont encore utilisés – et très bien entretenus – tandis que d’autres sont pratiquement laissés à l’abandon. Bien des portions ont été ensevelies sous les autoroutes. On peut donc passer sur des parties de la 66 sans jamais s’en rendre compte! Dans certains cas, on doit quitter la 66, emprunter une autoroute et revenir à la sortie suivante. Souvent, aussi, la 66 n’est qu’une rue anonyme dans une ville. Il faut alors prêter attention aux panneaux indicateurs qui affichent le logo de la Route 66 avec les directions à prendre pour la parcourir. Pas évident de s’y retrouver, d’autant plus qu’elle est gérée par chaque État qu’elle traverse. Et comme chacun d’entre eux possède sa propre signalisation…

Avec l’événement Altimate Rogue Trip (un brillant jeu de mots basé sur Ultimate Road Trip – le road trip ultime si vous préférez), j’étais dans la meilleure des positions pour parcourir la 66 puisque nous avions un guide juste pour nous. Il y a beau y avoir une panoplie de livres sur cette voie terrestre, n’empêche qu’un guide est un atout majeur : il qui sait où passe la route et dirige son monde là où il le faut, quand il le faut avec moult informations sur la route elle-même ou sur tel édifice ou tel commerce.

L’importance d’un guide

Gary Fleshman, notre guide de 43 ans, exerce ce métier depuis 1999. Selon lui, le meilleur moment de l’année pour faire le trajet complet de la Route 66 est en juin ou en septembre. Sinon, la température est soit trop chaude, soit trop froide. Il ne faut pas oublier que le début de la route est à Chicago où les hivers peuvent être rigoureux et que la fin est en Californie où l’été règne pratiquement à longueur d’année. Bottes d’hiver et maillot de bain requis… mais pas en même temps. En passant, certains peuvent préférer amorcer leur périple à Los Angeles et le terminer à Chicago. D’autres vont parcourir la Route 66 au complet, quelques États par année. Parce que les paysages sont nettement plus beaux dans la partie Nouveau-Mexique, Arizona, Californie et parce que ceux qui ont fait le trajet original pour aller rencontrer leur avenir allaient vers l’ouest, je considère qu’il faut partir de Chicago.

Peu importe où vous êtes sur la 66, l’étonnement n’est jamais bien loin. Ce peut être dans un petit casse-croute typique des années 50, dans un motel en forme de wigwam, chez Angel Delgadillo qui tient une boutique de souvenirs à Seligman, Arizona, et qui, à 86 ans, se bat encore pour que la Route 66 ne soit pas oubliée ou… je pourrais continuer ainsi des heures et des heures!

Depuis quelques années, nous confiait Gary notre guide, la Route 66 connait un regain de popularité, en grande partie grâce au film Cars. Les autorités ne cherchent généralement pas à la restaurer ou à restaurer les commerces qui la jouxtent. Plutôt, elles tentent de préserver ceux-ci tels qu’ils sont présentement.

Plus qu’une route

La Route 66, c’est bien plus qu’une simple route peuplée de personnes bizarres, bordée de commerces uniques et de paysages époustouflants. Avant de « faire » la 66, je l’identifiais aux années 50 et j’aurais aimé la parcourir au volant d’une Thunderbird de première génération ou d’un Bel Air 1957. Maintenant que je connais son histoire, j’ai un immense respect pour les pionniers qui, dans les années 20 et 30, l’ont parcourue au volant de voitures sans toit, sans chauffage, sans radio sur une voie souvent impraticable. Dans ces années-là, la Route 66 était plus qu’une route, elle représentait l’espoir.

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