Rolls-Royce Phantom, le goût des riches

Publié le 30 janvier 2006 dans 2006 par Denis Duquet

La Phantom nous apparaît fort étrange en photo et je puis vous affirmer qu’elle paraît encore plus bizarre lorsqu’on a l’occasion de l’examiner de plus près. Avec sa grille de calandre ultra massive, ses angles aigus et un encombrement digne d’un camion d’éboueur, cette Rolls de la dernière cuvée semble être la résultante du croisement d’un corbillard avec un camion Freightliner. Et je devrais changer de marque de camion par rectitude politique puisque Freightliner appartient à Mercedes et Rolls Royce à BMW.

Depuis des décennies les Rolls-Royce étaient reconnues pour le manque d’attrait de leur silhouette, et la Phantom conserve la taille de beluga des modèles antérieurs et fait presque l’unanimité par son manque d’élégance. Mais le démoniaque Chris Bangle, le styliste en chef de BMW à l’époque, en a rajouté une couche en laissant ses designers y aller d’une calandre monstrueuse encadrée par deux petits phares de route rectangulaires qui offrent tout un contraste. Et cette présentation excentrique est accentuée par l’absence d’un pare-choc visible et de phares antibrouillard circulaires. Toujours pour assurer le contraste, la partie arrière est tout ce qu’il y a de commun.

Bref, Monsieur Bangle, vous avez trouvé une autre occasion de vous faire des ennemis ! Pour la petite histoire, rappelons que Chris Bangle est le responsable de la transformation du design chez BMW, et plusieurs ne lui pardonnent pas encore les nouvelles silhouettes de la Série 7 et de la Série 5.

Lourdeur et contreplaqué

Mais il n’y a pas que l’extérieur qui fasse jaser. Sur cette voiture, tout est plus lourd que la moyenne. Ouvrir une portière par exemple procure la même sensation qu’ouvrir un coffre-fort tant elle est lourde et épaisse. Et puisque les gens riches et célèbres sont allergiques aux gouttes de pluie, on y retrouve un porte-parapluie dissimulé. Comme à la belle époque, les portières arrière sont du type suicide : elles s’ouvrent donc vers l’arrière afin de faciliter l’accès à la banquette arrière. Bien entendu, celle-ci est aussi confortable que le davenport de votre grand-mère et ça fait toujours un petit effet que de glisser son postérieur sur les cuirs les plus fins utilisés pour la sellerie de tous les sièges. Sachez qu’une version allongée sera offerte en 2006, comme si la version ordinaire n’était pas assez encombrante… Cette nouvelle venue assurera encore plus de prestige à son propriétaire, tandis que le dégagement pour les jambes à l’arrière sera maintenant hors norme puisque la voiture est allongée de 25 cm derrière le pilier B. Et si ce détail vous intéresse, il est possible de commander la Phantom avec deux sièges arrière individuels. Les multiples réglages vous feront croire que vous êtes à bord de votre avion privé. D’autant plus que des écrans individuels sont nichés dans le dossier des sièges avant. Vous serez en mesure d’y écouter vos DVD préférés ou encore de jouer à des jeux vidéo. Cette dernière éventualité sera cependant considérée comme « very shocking » par la majorité des gens bien.

Si les occupants des places arrière sont choyés, le conducteur et son passager sont moins bien traités. Les sièges sont corrects, mais ces occupants ne jouissent pas d’autant d’espace qu’à l’arrière car ils ont sous le nez une planche de bord - avec de multiples appliques en bois exotique - qui a certainement coûté quelques billots à la forêt amazonienne. Pour le reste, c’est quasiment copié sur un camion lourd avec un volant de type industriel, trois cadrans circulaires sans flafla et une foule de boutons de commandes empruntés à des accessoires ménagers de Grande-Bretagne.

Traditionnellement, les Rolls étaient faites pour être conduites par un chauffeur et, bien entendu, ce dernier n’avait droit qu’au strict minimum. Avec la Phantom lancée en janvier 2003, la tradition a été respectée. Une astuce toutefois, le panneau accueillant la montre de bord bascule pour faire place à un écran multifonctionnel. En passant, si quelqu’un veut s’attaquer à la statuette montée sur le radiateur, celle-ci se rétracte comme par enchantement.

Moins de six secondes !

Avec un empattement presque équivalent à la longueur hors tout d’une sous-compacte et un poids de deux tonnes et demie, la Phantom ne fait pas dans la subtilité. Il n’est donc pas surprenant de retrouver sous le capot un imposant moteur V12 de 6,8 litres produisant 453 chevaux et un couple de 531 lb-pi. Contrairement aux anciens gros moteurs V8 fournis par Chrysler dans les années d’après-guerre, ce moteur est fabriqué par BMW, le propriétaire actuel de la marque. Couplé à une boîte automatique à six rapports reliée aux roues arrière, ce groupe propulseur permet de boucler le 0-100 km/h en moins de six secondes. C’est toute une sensation que de rouler à haute vitesse avec un véhicule de ce gabarit, de ce poids et de ce prix ! Heureusement que la puissance de freinage a été bien mesurée. Il est même possible d’immobiliser cette grosse chose en moins de 40 mètres.

Si les performances sont de la partie, l’agrément de conduite n’est même pas une option puisque le pilote a l’impression d’être aux commandes d’un char d’assaut déguisé en voiture de luxe! Le sous-virage est important et les changements de voie semblent être le fait d’un pachyderme et non d’une voiture vendue plus d’un demi-million de dollars.

Mais, que voulez-vous ? Les riches ont le droit d’afficher leur mauvais goût et de se procurer des objets roulants hors norme. C’est la seule façon de justifier l’existence de la Phantom.

Feu vert

Matériaux sans faille
Moteur bien adapté
Prestige assuré
Version allongée
Performances surprenantes

Feu rouge

Silhouette délirante
Prix exhorbitant
Roulis important
Portières très lourdes
Tableau de bord dépouillé

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