Dodge Challenger, de grosses bêtes attachantes
Chrysler a redonné vie à la Challenger, un des muscle cars les plus populaires du début des années 70, après l’immense succès de l’étude de style du même nom qui fut dévoilée au Salon de Détroit 2006. Elle était arrivée la dernière pour profiter de l’âge d’or du muscle il y a quatre décennies, mais cette fois-ci, la Challenger aura devancé d’une bonne année la Camaro, dont le prototype est pourtant apparu au même salon. Dans cette nouvelle bataille rangée, la Challenger assume pleinement sa taille, sa vocation et ses traditions.
La nouvelle Challenger est construite sur les mêmes bases que la berline Charger. On a simplement raccourci l’empattement de 10,2 cm et retranché deux portières. Cette plate-forme LX fut développée durant « l’alliance » avec Mercedes-Benz, en utilisant des composantes et technologies de la Classe E. C’est assurément la meilleure qu’ait utilisée Chrysler. Sa solidité se paye par un poids substantiel et sa suspension arrière à roues indépendantes va à l’encontre de la tradition des muscle cars américains. Les gains en comportement routier et en qualité de roulement compensent toutefois largement cet affront. La silhouette est pur rétro et remarquablement fidèle à l’original, sans avoir l’air vieillotte ou bêtement folklorique. Les versions SE et SXT partagent un V6 de 3,5 litres et la R/T est dotée d’un V8 de 5,7 litres, mais c’est la SRT8 qui mène la meute avec son V8 Hemi de 6,1 litres et 425 chevaux.
Pas de fantaisie à l’intérieur
Même dans la SRT8, le tableau de bord de la Challenger est plutôt banal. Avec ses commandes claires et efficaces, c’est plutôt un produit de l’école de design du gros bon sens. Le volant gainé de cuir est réglable sur les deux axes mais nettement trop grand. Le siège est bien sculpté et offre un bon maintien latéral, mais le pédalier est trop espacé pour le pointe-talon et le repose-pied plutôt étroit. Un tableau électronique au bas de l’indicateur de vitesse permet d’afficher une série de données et même de mesurer l’accélération de 0 à 100 km/h et sur le ¼ de mille, ainsi que le freinage de 100 km/h. Gadget amusant.
Le groupe optionnel SRT II comprend quatre cadrans à fond blanc qui sont clairs et lisibles le jour, mais qui donnent l’impression d’avoir quatre globes phosphorescents dans son champ de vision la noirceur venue. Il s’accompagne aussi d’une chaîne audio Kicker avec un gros caisson de basses installé dans un coffre qui est d’ailleurs de bonne taille, une fois franchi son seuil élevé. On peut aussi replier le dossier arrière en sections asymétriques. Un muscle car pratique, qui l’eût cru? Il n’y a pas de passe-skis, quand même. Les places arrière sont également convenables pour deux adultes, une fois qu’on s’y est installé. Le coussin est cependant un peu court et assez creusé.
Du muscle et des réflexes
L’athlète de la famille est la SRT8 équipée de la boîte manuelle optionnelle à six rapports coiffée d’un levier de vitesses en crosse de revolver, comme sur l’aïeule. Sa forme est inhabituelle mais on y prend goût rapidement. La SRT8 est également dotée d’un différentiel autobloquant, de freins à disque Brembo et d’amortisseurs Bilstein. La boîte manuelle est incluse au groupe « Trak Pak », qui comprend un dispositif d’aide au démarrage en pente, un rapport final de 3,92, un pédalier chromé et des pneus sport de taille 245/45ZR20 à l’avant et 255/45ZR20 à l’arrière, sur d’immenses jantes de 20 pouces en aluminium forgé.
Nos mesures d’accélération ont produit un 0-100 km/h de 5,6 secondes et un chrono de 13,85 secondes pour le ¼ de mille, avec une pointe de 170,1 km/h. Des performances acceptables pour les deux tonnes de la SRT8. Ces mesures permettent d’apprécier la précision et la robustesse de la boîte manuelle, mais il est décevant de constater que celle-ci force parfois le passage direct de la 1re à la 4e à cause du même dispositif exécrable qu’on retrouve sur les Viper et Corvette. La pédale d’embrayage est également moyennement lourde, mais son engagement très progressif compense cette faiblesse.
Mais aussi de bonnes manières
Malgré ses airs de brute, la SRT8 est très civilisée. Elle est agréablement silencieuse sur l’autoroute et offre une qualité de roulement surprenante sur une route défoncée ou bosselée. Nous avons même obtenu une moyenne de 11,6 L/100 km sur un parcours mixte, en conduite normale. Avec sa suspension bien amortie, la SRT8 se débrouille aussi sur un circuit, en dépit de son poids. La direction est peu tactile mais assez rapide et précise. Le train avant s’inscrit facilement en courbe et le sous-virage est limité. On peut l’effacer complètement ou survirer à volonté en jouant de l’accélérateur, une fois l’antipatinage et l’antidérapage désactivés. Avec ce poids, on pouvait s’inquiéter pour l’endurance des freins, même si la SRT8 est équipée de disques rainurés et ventilés qui font 360 mm de diamètre à l’avant et 350 mm à l’arrière, pincés par des étriers à quatre pistons peints en rouge. Or, la pédale a pris un peu de mou dès le premier tour, mais s’est maintenue convenablement par la suite.
Cette nouvelle Challenger n’arrivait pas au meilleur moment et pourtant, elle se vend assez bien et les spécialistes se bousculent pour offrir des pièces et accessoires pour la modifier. Chose certaine, les R/T et SRT8 sont des interprétations réussies de ce muscle car classique. Elles sont solides, confortables, performantes et même raisonnablement pratiques. Quel que soit le succès de leurs rivales rétro, pour l’inconditionnel des produits Mopar, il n’y a qu’un choix à faire : le Hemi en format 5,7 ou 6,1 litres.
Feu vert
Réinvention réussie d’un classique
Moteurs V8 efficaces
Confort de roulement étonnant
Solidement construite
Sièges confortables
Feu rouge
Volant trop grand
Visibilité arrière limitée
Plastiques granuleux à l’intérieur
Poids et encombrement
Version de base déclassée