Honda Accord, la championne faiblit
La Honda Accord, c’est un peu comme en patinage artistique. L’étoile de la compétition a beau faire moins bien que prévu, on lui octroie malgré tout de bonnes notes, par habitude ou peut-être par aveuglement devant des faux pas pourtant évidents. Depuis sa refonte, la berline intermédiaire ne mérite plus un 9,5 sur 10 parce qu’elle rate le coche en termes de prix, de style et d’aménagements intérieurs. Certes, ses performances sur route sont toujours aussi irréprochables, mais cela ne suffit pas pour la médaille d’or. Ni d’argent, même…
Jusqu’à il n’y a pas si longtemps, c’était fort simple : besoin d’une berline intermédiaire fiable et durable? C’était la Honda Accord ou la Toyota Camry. Mais la compétition s’est affinée avec l’arrivée des Chevrolet Malibu, Ford Fusion, Mazda 6 et Hyundai Sonata, pour ne nommer que celles-là. Toutes ces voitures allient de belle façon le rapport qualité-prix, le design et le bon comportement routier. Sans contredit, l’Accord conserve ses acquis de toujours en ce qui a trait à la tenue de route. Mais côté style, voulez-vous bien me dire ce que ses designers ont pensé ? Si le passage générationnel est plutôt réussi pour le coupé, il a failli avec la berline. Les lignes manquent de charme et le coffre, proéminent, rompt la fluidité de la silhouette, comme s’il avait été intégré à la dernière minute. Aussi, les mensurations accrues (76 mm en longueur, 26 mm en largeur et 23 mm en hauteur) font que l’Accord ne pourra plus prétendre encore très longtemps à la catégorie des intermédiaires.
Faux pas intérieurs
Vrai que la voiture gagne en espace intérieur : 95 litres depuis sa dernière génération, ce qui la rend plus logeable que la Toyota Camry, la grande rivale. Mais voilà qui est gâché par une banquette qui ne se rabat que d’un bloc. Il y a bien un « laissez-passer » pour les objets longs et minces, mais pour plus gros, il faut sacrifier soit l’espace de chargement (avec 397 litres, ce n’est d’ailleurs pas la mer à boire), soit toutes les places arrière. Soulignons que les voitures ne proposant pas la configuration 60/40 sont très, très rares sur le marché...
Par contre, les sièges avant de l’Accord sont confortables, le dégagement est généreux à toutes les places (bien que celles arrière ne soient qu’occasionnelles dans le coupé) et la finition est impeccable, sauf quelques plastiques durs ici et là. Lorsque le cuir et le système de navigation montent à bord, on se croirait au volant d’une Acura. Malheureusement, les commandes se font trop nombreuses et souvent nébuleuses. Celles de la climatisation sont disposées à l’extrémité droite de la planche de bord, obligeant le conducteur à s’étirer pour les rejoindre. Aussi, l’insonorisation est très moyenne. Les bruits de pneus envahissent beaucoup trop l’habitacle – la faute pourrait incomber à ce hayon de coffre que l’on n’a pas tapissé, oh ! sacrilège, d’isolant. Notez que la sécurité de série est complète, dispositif de stabilité y compris.
Reine de l’arène
Cela dit, on ne peut que décerner à l’Accord le titre de « Reine de la catégorie » pour cet équilibre entre confort et comportement sportif auquel elle parvient. Assemblée sur la plate-forme reconnue des Acura TSX et TL, elle offre une solide tenue de route, relevée d’un beau zeste de sportivité lorsque jumelée avec le V6 de 3,5 litres, le plus puissant V6 jamais octroyé à la berline. Les accélérations sont athlétiques et la boîte automatique ne handicape en rien les 271 chevaux même si, oh! sacrilège encore, elle n’a que cinq rapports et pas de mode manuel. La tendance est pourtant aux boîtes six rapports avec, pour certaines, les commandes au volant… Vous dites « ouch » pour la consommation de carburant ? Non, puisque ce V6 désactive jusqu’à quatre cylindres quand la voiture est lancée. La manœuvre s’effectue en toute transparence et un « Eco » s’illumine régulièrement au tableau de bord. Résultat : 6,7 litres/100 km sur l’autoroute, soit nez à nez avec l’Accord quatre cylindres. Notez que le coupé V6 n’offre pas la désactivation des cylindres, mais il se rachète avec la manuelle six vitesses.
Même si elle est moins puissante, la variante de base de l’Accord (moteur quatre cylindres de 2,4 litres) n’est pas piquée des vers pour autant. Le moteur de 190 chevaux (une version de 177 chevaux est également proposée) est souple et il aime révolutionner dans les hautes sphères – genre 7 200 tours/min. La puissance est plutôt impressionnante pour un quatre cylindres, surtout lorsque transigée par la boîte manuelle (cinq vitesses). Cette dernière se manipule sans effort avec une course rapprochée du levier, ce qui fait d’elle l’une des manuelles les plus plaisantes du marché non-luxe. Autre petit bonheur : la direction. Toute légère, elle se commande du bout des doigts, dans des manœuvres précises et réactives, dictées par un volant sport agréable en main. Le freinage est dans la bonne moyenne (42,3 mètres de 100 à 0 km/h) et la suspension constitue un parfait compromis entre la fermeté et la conciliation avec les cahots de nos routes. Le châssis, rigide, ne bronche même pas lorsque la voiture est malmenée et cette dernière s’attaque aux virages sans frémir – et beaucoup plus agilement que ne le laissent supposer ses grandes dimensions.
Suprématie mise à mal
Au-delà de tous ces beaux qualificatifs routiers et cette fiabilité qui lui est légendaire, l’Accord pêche par un élément qui lui fait perdre d’importants points au classement : son prix. C’est qu’elle est dispendieuse, l’Accord. Comparaison pour comparaison, elle se classe toujours au sommet des plus coûteuses à l’achat... Si on la place nez à nez avec la Chevrolet Malibu – qui, ne l’oublions pas, a allègrement supplantée l’Accord comme « Meilleure nouvelle voiture nord-américaine » avec le double de points en 2008 –, la berline de Honda paraît plutôt mal. À prix égal avec la Malibu, elle n’offre ni les sièges chauffants, ni le revêtement en cuir, ni les pédales ajustables, ni le démarreur à distance… alouette ! Dans un marché ultra concurrentiel où les ventes d’intermédiaires sont en chute, une telle arrogance pourrait mettre fin à une longue suprématie.
Feu vert
Belle sportivité
Finition impeccable
Direction et suspension : un charme
Désactivation des cylindres (berline V6)
Feu rouge
Pas de mode manuel (boîte automatique)
Fourchette de prix arrogante
Insonorisation moyenne
Pas de 60/40 pour la banquette arrière
Certaines commandes difficiles à rejoindre