Les débuts de Tesla et de son premier Roadster

Publié le 18 février 2020 dans Voitures anciennes par Hugues Gonnot

Tesla atteint aujourd’hui des records de capitalisation boursière. Mais les débuts n’ont pas été faciles. Retour sur le démarrage d’une petite start-up californienne.

Avoir de l’Impact

Tout le monde sait que Tesla a été fondée par Elon Musk. Et pourtant c’est faux! L’histoire est bien plus compliquée que cela et il nous faut remonter au début des années 1990 pour comprendre la genèse de la marque. Tout commence au Salon de Los Angeles 1990, où GM expose l’Impact, un prototype de voiture 100% électrique.

Devant la réaction positive, ce prototype deviendra un véhicule de série en 1996, baptisé EV1. C’est Alan Cocconi qui a réalisé le développement du système de gestion électronique des moteurs de l’Impact. Ce dernier quittera GM en 1992 pour cofonder AC Propulsion. En 1997, la compagnie présente le prototype tZero, un engin capable d'abattre le 0 à 100 km/h en à peine plus de 4 secondes. On est loin des autos électriques ennuyantes de l’époque!

Photo: AC Propulsion

AC/DC

Martin Eberhard et Marc Tarpenning ont vendu leur compagnie de liseuses électroniques en 2000 pour la somme de 187 millions de dollars et cherchent de nouvelles possibilités d’investissement. Eberhard aimerait bien se faire plaisir avec une voiture de sport, mais aucun des monstres gourmands en essence sur le marché ne trouve grâce à ses yeux.

C’est là qu’il rencontre les gens d’AC Propulsion et essaye la tZero. Il tombe sous le charme et tente de convaincre la compagnie de la commercialiser. Réponse négative. La technologie de batteries n’est pas encore au point. Et c’est alors qu’Eberhard a l’idée de remplacer les traditionnelles batteries au plomb par des batteries lithium-ion, technologie qu’il connaît bien puisqu’il l’a utilisée dans ses liseuses. Eberhard et Tarpenning incorporent Tesla Motors Inc. en juillet 2003.

Le nom est bien sûr choisi en l’honneur de Nikola Tesla, inventeur connu pour, entre autres, son travail sur le courant alternatif. Le timing est excellent car GM vient de récupérer ses EV1 pour les démolir. Eberhard sent que, devant la réaction fanatique des propriétaires, il y a un marché pour une auto électrique.

Elon!

Commence alors le développement d’une voiture sport. Mais Tesla n’a pas les moyens de développer son propre châssis. La compagnie vise à devenir un assembleur en utilisant la technologie d’AC Propulsion pour le groupe motopropulseur et un châssis existant, modifié pour y installer les batteries. Eberhard porte son choix sur la Lotus Elise, une petite auto sport anglaise.

Le développement commence, ainsi que la recherche de fonds. C’est là qu’arrive Elon Musk. Après avoir vendu PayPal à eBay en 2002, il souhaitait investir dans une compagnie de voitures électriques. Lors de la première collecte de fonds en 2004, Musk contribuera à hauteur de 7,5 millions de dollars. Au début, il ne s’implique presque pas. Il vient voir l’avancée des travaux et donne des suggestions. C’est tout.

L’étoile noire

Le projet DarkStar, nom de code du Roadster, avance. Mais il s’avère que les plans initiaux n’étaient pas bons. Le châssis de l’Elise doit être considérablement revu pour accommoder les batteries et leur système de refroidissement. Les ingénieurs de Tesla modifient tellement la techno d’AC propulsion qu’au final aucun brevet de la compagnie ne sera utilisé. La batterie est composée de 6831 cellules de type 18650, généralement trouvées dans des ordinateurs portables. Elle est arrangée en 11 feuilles, chacune contenant 9 blocs de 69 cellules.

Photo: Tesla

En juillet 2005, Tesla et Lotus signent un accord pour la fourniture de 2500 châssis. En 2006, une deuxième collecte de fonds est organisée.

C’est finalement le 19 juillet 2006 que le premier Roadster est montré au public. Eberhard promet 400 kilomètres d’autonomie, 240 km/h en pointe et un 0 à 100 km/h en 4 secondes pour des prix allant de 80 à 120 000 dollars US. La réaction est enthousiaste et Tesla reçoit ses premiers dépôts.

Mais l’auto est loin d’être prête. Parmi les plus gros problèmes, il y a la boîte de vitesses à deux rapports. Elle ne tient que quelques milliers de kilomètres devant les 14 000 tr/min et la puissance du moteur électrique. Plusieurs fournisseurs sont contactés, mais aucun ne peut livrer une boîte assez solide.

Il faudra se résoudre à n’avoir qu’une vitesse (boîte fournie par BorgWarner) et cela entraînera à nouveau de nombreux changements pour pouvoir tenir les promesses annoncées. Les retards s’accumulent et les fonds commencent à manquer.

La valse des PDG

La tension entre Eberhard et Musk monte alors que ce dernier s’implique de plus en plus. Elle atteint son paroxysme en juillet 2007 et Eberhard se voit retirer son rôle de PDG par le conseil d’administration pour devenir directeur des technologies. Lui et Tarpenning quitteront la compagnie qu’ils ont fondée peu de temps après.

En août 2007, c’est Michael Marks qui devient PDG, avant d’être remplacé par Ze’ev Drori en décembre 2007. Ce n’est qu’en octobre 2008 qu’Elon Musk prendra le poste de PDG. Dans les jours qui suivent, il licencie 25% des employés. La compagnie est proche de la banqueroute. Le développement du Roadster devait initialement coûter 25 millions de dollars, il montera en fait à plus de 140 millions. À ce moment, Musk a mis 70 millions de dollars de son propre argent dans Tesla.

Finalement!

Heureusement, la production du Roadster avait commencé en février 2008. C’est Musk lui-même qui reçoit les clés du premier exemplaire. Baptisé Série 1.5 (en contraste avec les premiers modèles montrés, dénommés Série 1), le Roadster offre un moteur de 248 chevaux, 273 lb-pi de couple, une batterie de 53 kWh, une autonomie de 370 km et un 0 à 100 en un peu plus de 4 secondes.

Photo: Tesla

Il coûte près de 100 000 dollars US. En 2009, Tesla présente la version 2.0 (288 chevaux, 280 lb-pi, 390 km d’autonomie, allègement de 68 kilos) puis la 2.5 en 2010 (288 chevaux, 280 lb-pi en version de base ou 295 lb-pi en version sport, 390 km d’autonomie).

Les premières livraisons au Canada ont lieu en février 2010. La production du Roadster s’arrêtera en janvier 2012 après 2450 exemplaires. Puis Tesla prépare le lancement de la Model S, un véhicule qui propulsera la marque vers de nouveaux sommets. Mais ceci est une autre histoire…

Épilogue

La crise financière de 2008 aura failli faire disparaître Tesla. Deux facteurs vont participer à sauver la compagnie : un investissement de 50 millions de DaimlerBenz contre 10% des actions et un prêt du département d’État américain à l’énergie de 465 millions (qui sera remboursé complètement en 2013). Tesla est introduite en bourse en juin 2010, ce qui permet de lever 226 millions de dollars. C’est le premier constructeur automobile américain à réaliser une telle opération depuis Ford en 1956.

Quant au Roadster, l’histoire ne s’arrête pas là. En 2016, Tesla proposera un ensemble 3.0 (facturé 29 900 dollars US) comprenant des améliorations aérodynamiques et un nouveau pack de batteries de 80 kWh qui fait monter l’autonomie à 640 km.

En 2017, la marque présente un nouveau Roadster, prévu pour 2020, qui devrait avoir des performances époustouflantes (0 à 100 km/h en 2 sec et 1 000 km d’autonomie). Quant au tout premier Roadster, celui d’Elon Musk, il a été envoyé dans l’espace le 6 février 2018 et est maintenant en direction de Mars!

En vidéo : premier contact avec la Tesla Model 3 performance

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