Kia Forte5 2020 : au-delà du talent

Publié le 21 avril 2020 dans Essais par Antoine Joubert

Oui, Kia propose depuis plusieurs mois déjà une nouvelle Forte à hayon, en l’occurrence la Forte5, qui était disparue du catalogue en 2019, au moment où le constructeur lançait la troisième génération de sa berline du même nom.

L’abandon du modèle à hayon nous semblait d’ailleurs curieux puisque ce dernier connaissait chez nous un succès honnête, et ce, même si les Soul et Sportage le surpassaient au chapitre des ventes.

Il faut comprendre que cette décision d’abandonner momentanément la Forte5 ne provenait pas du Canada, qui insistait pour la conserver au catalogue, mais plutôt des Américains, chez qui les compactes à hayon affichent toujours des ventes très marginales.

Ceux-ci ont justement choisi de passer leur tour face au modèle de nouvelle génération, ce qui explique pourquoi Kia Canada a eu un peu plus de mal à l’offrir à sa clientèle.

La Forte5 est désormais une exclusivité canadienne. Du moins, en Amérique du Nord. Car la voiture est vendue ailleurs dans le monde, notamment en Australie où elle est commercialisée sous le nom de Kia Cerato Hatch. Cela la rend donc un peu plus exclusive. Or, a-t-elle ce qu’il faut pour réellement se distinguer?

Dans l’ombre du Seltos

Une fois passé le sombre épisode du COVID-19, le cœur sera à la fête chez Kia, qui débarque en ce moment avec le Seltos. Un multisegment urbain, proche cousin du Hyundai Kona, et qui risque certainement de raviver le trafic chez les concessionnaires. Ce dernier pourrait non seulement affecter négativement les ventes du Niro, mais aussi de cette Forte5, que les concessionnaires ne semblent pas trop vouloir pousser.

Il faut dire qu’à l’inverse de la berline, la Forte5 n’est offerte qu’en trois versions, pour un prix de départ de 24 005 $, transport inclus. Remarquez, il en va de même pour la plupart des voitures rivales, qui ne proposent pas non plus de modèles d’entrée de gamme pour leurs versions à hayon.

Le prix d’entrée de la Forte5 2020 est donc directement comparable à celui des Honda Civic Hatchback, Hyundai Elantra GT, Mazda3 Sport, Subaru Impreza, Toyota Corolla Hatchback et Volkswagen Golf. Des modèles qui, vous l’aurez compris, ont tous l’avantage d’une réputation qui les précède.

Voilà le principal obstacle de la Forte5. Une concurrence aussi forte que bien établie, mais qui malgré tout faiblit en raison du raz-de-marée causé par les VUS et multisegments. Il suffit de penser à la récente Mazda3 Sport, pour qui les ventes sont 35% moins élevées qu’il y a cinq ans, en dépit de la traction intégrale offerte en option.

Photo: Antoine Joubert

Comme toujours, la Forte5 joue ici la carte du rapport équipement/prix. Un point intéressant puisque même la version EX propose une longue liste de caractéristiques très courues des acheteurs : tout ce qui est chauffant, le chargeur de téléphone à induction, l’application Apple CarPlay/AndroidAuto et j’en passe. Hélas, on demeure sur notre appétit côté look! L’auto n’est pas laide, mais son manque flagrant de personnalité est déplorable.

D’autant plus qu’au trois quarts arrière, les airs de Subaru Impreza sont indéniables. On perd donc le petit caractère européen si charmant de l’ancienne génération, ce qui est dommage. On se serait également passé de cette ceinture de fenestration chromée, trop classique, ce que l’on a pourtant pris soin de modifier sur la nouvelle berline Forte GT, qui adopte un pourtour noir lustré.

Des reproches à faire à son bord? Un seul. Celui d’une assise encore trop élevée pour le conducteur. Celle-ci a beau être réglable électriquement, ce n’est pas encore assez. Un jour, peut-être que les Coréens (généralement de plus petite taille) comprendront! Du reste, le poste de conduite est conçu avec minutie.

Belle finition, ergonomie impeccable, ainsi qu’une présentation particulièrement charmante à bord du modèle GT, qui profite de sièges sport à surpiqûres rouges très bien dessinés, de garnitures métallisées et d’un volant sport à base plane. Extérieurement, celle-ci hérite également de jantes de 18 pouces (au lieu de 16), d’une calandre à rainures rouges et de phares à DEL.

C’est au volant d’une version GT Limited que j’ai pu parcourir quelque 400 kilomètres, début mars. Et je dois admettre que ma première impression au démarrage était favorable. D’une part, parce que la sonorité mécanique est inspirante et juste assez révélatrice, mais aussi parce que le fait de m’installer à bord d’une petite bagnole dynamique et bien équilibrée me changeait de tous ces VUS gris-noir-blanc mis à l’essai au cours des semaines précédentes.

Il faut savoir que si la Forte5 EX propose comme motorisation un quatre cylindres de 2 litres produisant 147 chevaux, la version GT hérite pour sa part du moteur turbocompressé de 1,6 litre que l’on exploite aussi dans la Soul GT-Line (États-Unis seulement). Générant 201 chevaux, ce moteur fait carrière sous le capot de plusieurs Hyundai, comme la Veloster et l’Elantra Sport (berline) et GT N-Line.

Les bobos du turbo

D’abord, un mot sur cette mécanique dont le bilan n’est pas sans tâche, puisque plusieurs problèmes relatifs à la turbocompression ont été répertoriés. J’ai moi-même fait face à un épisode de ce genre en conduisant l’été dernier une Soul GT-Line 2020 prêtée par Kia  dans le sud de la Floride. Malheureusement , l’essai fut de courte durée puisque le turbocompresseur a lâché sans avertissement, alors que la voiture affichait à peine 2 000 miles au compteur.

Préalablement offert avec le Hyundai Tucson (dans une livrée moins performante de 175 chevaux), ce moteur a aussi fait l’objet de nombreuses plaintes de la part des propriétaires, relativement au manque de chauffage à bord du véhicule. Or, la Forte5 GT ne semblait aucunement affectée par ce problème, la température dans l’habitacle étant tout à fait convenable.

Photo: Antoine Joubert

Nerveux et fort en couple, ce moteur turbo fait équipe avec une boîte séquentielle à double embrayage et sept rapports, laquelle peut s’avérer amusante dans certaines circonstances. Or, le mariage de cette boîte, en relation avec une turbocompression et un potentiomètre de pédale qui met du temps à réagir, engendre parfois des creux de puissance qui deviennent vite agaçants. Comme si le moteur manquait de souffle, ce qui n’est pourtant pas le cas.

Évidemment, une boîte manuelle aurait peut-être pu régler ce problème, mais Kia n’a pas cru bon l’offrir, tandis que Hyundai la rend disponible dans l’Elantra GT N-Line, de laquelle la Forte5 dérive directement. Même la version EX est livrée de série avec l’automatique, une boîte baptisée IVT (Intelligent Variable Transmission) qui vise à recréer l’effet d’une automatique conventionnelle, pour ainsi éliminer l’effet d’élasticité tant détesté de ce type de boîte. Bref, pas de boîte manuelle avec la Forte5!

Bonne nouvelle, la Forte5 est très solide et construite avec attention. Elle a prouvé sa grande rigidité structurelle, dans le contexte de cet essai hivernal, alors qu’elle était chaussée de pneus d’hiver Yokohama, très efficaces, mais qui ne contribuent pas nécessairement à relever le niveau de confort. Disons, en termes clairs, que ces roues de 18 pouces ainsi chaussées ne faisaient pas bon ménage avec les nids-de-poule québécois, et qu’il serait donc sage de songer à des jantes hivernales de 16 ou 17 pouces.

Photo: Antoine Joubert

Maintenant, malgré les chocs, la caisse a prouvé sa solidité, ne démontrant aucun signe de faiblesse. Le train avant semblait cependant léger en accélération, affichant un certain effet de couple, et ce, malgré des accélérations modérées. Heureusement, la direction s’est beaucoup améliorée ces dernières années.

Un pas de géant par rapport à celle de l’ancienne génération, aussi imprécise que peu communicative. Désormais, cette direction à assistance électrique permet ainsi de mieux corriger la trajectoire et de gagner au chapitre du plaisir au volant, comme de la maniabilité.

Rivale de la GTI?

Soyons clairs, la Forte5 GT n’a pas l’âme d’une GTI. Loin de là. La puissance est honorable et le plaisir au volant est palpable, mais il est clair que Kia n’a pas 45 ans d’expérience derrière la cravate pour pouvoir se mesurer à celle qui a ouvert le bal chez les compactes sport. Ainsi, comprenez que cette Kia n’est pas une routière comme la GTI et que la tenue de route et les accélérations ne sont pas aussi relevées.

Puis, à ce compte, pour celui qui cherche une conduite réellement sportive, vaut mieux se tourner vers sa proche cousine, la Hyundai Elantra GT N-Line. Celle-ci propose un caractère dynamique plus poussé ainsi qu’une suspension assurément plus inspirante pour attaquer des virages.

La Forte5 GT livre néanmoins ce bel équilibre entre confort et performances, proposant juste un peu plus de punch que la Civic Hatchback Sport ou que la Mazda3 Sport à moteur de 2,5 litres. On boucle à ce propos le 0-100 km/h en 7,6 secondes, ce qui est plus rapide que la plupart de ses rivales… sauf pour la GTI!

Parlons chiffres

Alors non, notre Kia n’est pas aussi onéreuse que la GTI. Heureusement. Environ 5 000 $ de moins si vous comparez un Forte5 GT de base à une GTI avec boîte DSG. Un écart suffisamment considérable, mais qui ne fera néanmoins pas pencher l’acheteur d’une Volkswagen pour celle-ci. La Forte5 vient donc réellement se mesurer à des voitures plus conventionnelles comme la Corolla Hatchback. Parce que la gamme s’y compare et parce que la clientèle visée est très semblable.

Il reste à attirer le client en concession et à le convaincre que cette Forte5 fait mieux, ce qui n’est pas évident. Puis, il faut aussi mettre un peu de poudre aux yeux de l’acheteur, car la location n’est hélas pas compétitive. On parle ici d’une valeur résiduelle de 41% au bout de 4 ans et d’un taux de location plus élevé (au moment d’écrire ces lignes) que chez Hyundai, Mazda, Toyota et Volkswagen.

En somme, un montant mensuel en location de 517 $ par mois sur 48 mois (transport et taxes inclus), pour un modèle GT Limited vendu à 32 005 $ plus taxes, avec une valeur de rachat de seulement 13 115 $ plus taxes. Manifestement, Kia souhaite vendre plutôt que de louer. D’ailleurs, il ne vous en coûterait que 100 $ de plus par mois et un an supplémentaire en paiements pour l’achat de cette voiture, ce qui en dit long…

Photo: Antoine Joubert

Finalement, la Forte5 est-elle un bon choix? Pas vilain. Sauf qu’elle n’apporte rien que la concurrence n’offre pas déjà. Surtout en comparaison avec l’Elantra GT, qui propose plus d’options mécaniques, un choix de modèles un peu plus étoffé, une version GT N-Line plus sportive, le tout avec une mensualité en location légèrement moindre.

La carrière de la Forte5 qui, rappelons-le, n’est pas offerte au pays de l’Oncle Sam, pourrait ainsi être compromise parce que le public ne la connaît guère, par un manque d’intérêt de la part des concessionnaires ainsi que par le succès déjà garanti du Seltos. Beaucoup d’obstacles pour une voiture qui devrait être vouée à un meilleur sort. À présent, voyons si le constructeur mettra les efforts nécessaires afin que les Forte5 se multiplient sur nos routes.

En vidéo : notre essai routier du Kia Seltos 2021

Fiche d'évaluation
Modèle à l'essai Kia Forte 2020
Version à l'essai 5 GT Limitée
Fourchette de prix 22 245 $ – 29 995 $
Prix du modèle à l'essai 29 995 $
Garantie de base 5 ans/100 000 km
Garantie du groupe motopropulseur 5 ans/100 000 km
Consommation (ville/route/observée) 8,9 / 6,9 / 9,1 L/100km
Options n.d.
Modèles concurrents Honda Civic, Hyundai Elantra, Mazda Mazda3, MINI Clubman, Nissan Sentra, Subaru Impreza, Toyota Corolla, Volkswagen Golf, Volkswagen Jetta
Points forts
  • Confort et aménagement
  • Construction sérieuse
  • Bonne garantie
  • Puissance intéressante (GT)
Points faibles
  • Fiabilité du moteur turbo (voir texte)
  • Pas de boîte manuelle
  • Ligne qui manque de punch
  • Peu compétitive en location (valeur résiduelle)
Fiche d'appréciation
Consommation 3.0/5 La consommation enregistrée a déçu mais le contexte hivernal de l'essai l'explique.
Confort 3.5/5 Le confort serait encore supérieur avec des jantes de 16 ou 17 pouces.
Performances 4.0/5 La puissance est remarquable et les accélérations sont vives.
Système multimédia 3.5/5 Le système de navigation est complexe et inefficace. Vaut mieux utiliser AppleCarPlay ou AndroidAuto!
Agrément de conduite 3.5/5 Pas tout à fait aussi relevé qu'avec la Hyundai Elantra GT N-Line.
Appréciation générale 3.5/5 Une voiture honnête, qui possède de belles cordes à son arc, mais qui ne réussira pas à se démarquer face à ses rivales déjà bien établies.
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