Un « 48 heures » pour un silencieux qui fume?

Publié le 6 octobre 2020 dans Juridique par Éric Lamontagne

Une dame se fait intercepter par un policier parce que, selon ce dernier, une fumée semble provenir du dessous de son véhicule, et son système d’échappement serait bruyant.

Le policier lui remet alors un « 48 heures » qui est en fait une demande d’inspection mécanique du véhicule en vertu des articles 521 et 524 du Code de la sécurité routière.

La dame a donc 48 heures pour se rendre dans un centre d’inspection approuvé par la SAAQ, pour subir une inspection mécanique de son véhicule.

La dame, qui avait préalablement pris un rendez-vous, a finalement décidé de ne pas se présenter à celui-ci, désirant plutôt se défendre en Cour.

Devant le juge

Dans ce contexte, la dame s’est retrouvée devant le tribunal, pour défendre le fait de ne pas avoir procédé à l’inspection commandée par le policier. En effet, quand une telle demande est faite par les policiers, le fait de ne pas la respecter résulte en un constat d’infraction. Et donc la possibilité pour la dame de présenter une défense.

Mais tout d’abord, dans une telle situation (où une demande d’inspection mécanique est exigée par les policiers), quel est le fardeau de preuve de la poursuite ?

Dans ce type d’affaire, le poursuivant doit démontrer que l’agent de la paix avait des motifs raisonnables de croire que le véhicule de la défenderesse constituait un danger pour la sécurité des usagers de la route, ou pour sa propre sécurité.

La défenderesse, quant à elle, prétend que ce matin-là, toutes les voitures « fumaient », à cause de la température, et que son silencieux n’était pas la provenance du bruit, mais que c’était plutôt sa voiture qui était bruyante, venant à peine de démarrer quelques secondes auparavant.

Qu'en pensez-vous?

Or, je fais appel à votre juge intérieur, et je vous demande votre opinion. Qu’est-ce que le juge a décidé dans cette affaire?

Pour vous aider, voici les faits tels pertinents relatés dans la décision en question :

« [4] Le 17 novembre 2017, un agent de la Sûreté du Québec intercepte un véhicule de marque Hyundai Sonata de l’année 2002, sur le chemin Lavigne à Rouyn-Noranda. La défenderesse vient à peine de quitter son domicile, et se range devant le stationnement d’un voisin.

[5] Le policier fait le tour du véhicule, et demande les documents d’usage à la conductrice. La défenderesse est identifiée avec son permis de conduire.

[6] L’agent lui remet à 16 h 39, un document avec l’inscription en entête : Avis de vérification d’un véhicule routier. Le conducteur ou le propriétaire du véhicule doit le soumettre à la vérification mécanique dans un délai de 48 heures après la délivrance de cet avis.

[7] Le policier indique qu’il a des motifs raisonnables de croire que le véhicule en question est visé par le paragraphe 10 de l’article 521 du Code de la sécurité routière. Dans la section description des motifs, il inscrit : Fumée qui se dégage sous le VR, Système d’échappement bruyant. »

Donc, avec l’information que vous possédez, comment jugeriez-vous cette affaire?

Voici la décision du tribunal :

Le juge de première instance a donné raison à la défenderesse et l’a acquittée de l’infraction reprochée.

Concernant la fumée, il s’est posé les questions suivantes :

Or, toutes ces questions demeurant sans réponse, faute de précisions sur le rapport policier, le juge conclut ainsi sur la question de la fumée :

« À elle seule, la mention de présence de fumée sous le véhicule ne peut convaincre le Tribunal que l’agent a exercé sa discrétion conformément aux dispositions du Code de la sécurité routière. »

Et concernant le bruit du véhicule, le tribunal n’a pas retenu cet argument de la poursuite car, si le bruit remarqué par le policier provenait bel et bien du silencieux ou du système d’échappement de la voiture de la défenderesse, le recours approprié n’est pas l’inspection mécanique mais plutôt une contravention à l’article 258 du Code de la sécurité routière, qui est libellé ainsi :

« 258. Tout véhicule automobile, à l’exception d’un véhicule qui n’utilise aucun carburant comme source d’énergie, doit être muni d’un système d’échappement conforme aux normes établies par règlement. »

Donc, il est inutile de demander une inspection mécanique à un véhicule qui aurait un système d’échappement non conforme, le remède étant à l’article ci-haut.

La dame fut donc acquittée sur toute la ligne.

(Les faits de la présente, proviennent de la décision :« DIRECTEUR DES POURSUITES CRIMINELLES ET PÉNALES c. CHANTAL CORSWAREM ET YVES AUCLAIR, 2019 QCCQ 5864 »)

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Pour toutes questions, n’hésitez pas à consulter notre expert, Me Éric Lamontagne par courriel à : e.lamontagne@contraventionexperts.ca, ou par cellulaire au 514-578-2982.

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