Votre parole contre celle du policier

Publié le 6 mai 2021 dans Juridique par Éric Lamontagne

Chaque jour, des gens m'appellent et me demandent des conseils concernant une contravention qu’ils ont reçue. Très souvent, ils s'adressent à moi pour obtenir mon opinion, et pour savoir s'ils devraient contester ou non.

La plupart du temps, ces derniers viennent à peine d’être interceptés. Ils sont frustrés de leur interception, et sont habités par le désir d’aller se défendre devant le tribunal.

Après avoir pris le temps de leur expliquer le processus judiciaire, ces personnes me posent très souvent des questions du genre :

Voici donc ce que vous devez savoir concernant ces interrogations.

Au moment où vous vous présenterez devant le tribunal, la poursuite débutera en présentant sa preuve. Selon le cas, elle choisira ou non de faire témoigner le policier qui a procédé à votre interception. Si la poursuite décide de faire entendre le policier, vous pourrez ensuite choisir de le contre-interroger.

À défaut de faire entendre le policier, elle peut, en vertu du Code de procédure pénale, choisir de faire sa preuve en déposant tout simplement le constat d’infraction, et le rapport abrégé du policier, qui vaudra témoignage auprès de la Cour.

Or, si la poursuite procède ainsi, elle laissera le tribunal en prendre connaissance, et déclarera sa preuve close.

Ce sera ensuite au tour de la défense. Évidemment, si vous vous présentez au tribunal, c'est que votre avocat et vous aurez déterminé que vous avez une défense susceptible de soulever un doute raisonnable.

Quand vous témoignerez, il est fort probable que votre version des faits soit contradictoire à celle du policier. Par exemple, ce dernier pourrait présenter une preuve comme quoi vous circuliez à 160 km/h, alors que vous prétendez plutôt avoir circulé à 120 km/h.

C’est généralement devant cette contradiction que certains se questionnent à savoir si leur version des faits a des chances d’être crue, alors qu’un policier prétend le contraire.

Tout d’abord, il est important de comprendre qu’un défendeur renseigné sur son fardeau de la preuve  est plus susceptible d’intéresser la Cour qu’une personne qui martèle au juge qu’il a été victime d’une « trappe à ticket ».

Je mentionne cela car, quand viendra le temps pour le juge de prendre une décision, suite aux deux versions contradictoires qu’il a entendues, il ne se dira pas : « J’ai entendu le défendeur, et sa version semblait avoir du sens, mais l’autre version provient de la bouche d’un policier, et par le fait même elle est plus crédible ».

Il appliquera plutôt le test à trois questions que lui impose la Cour suprême du Canada , quand un juge est confronté à des versions contradictoires :  R. C. W(d) 1991, 1 RCS 742.

En effet, cet arrêt représente une décision phare quand la Cour doit trancher dans une telle situation. Voici donc ledit test à trois questions (que je vulgarise pour votre bonne compréhension) :

1- Croit-il le défendeur?

Le juge relira ses notes, et relatera l’essence même de votre témoignage. Il se demandera si votre version est crédible ou non. Si elle l’est, il doit vous acquitter.

2- Même si le tribunal ne croit pas le défendeur, est-ce que sa défense soulève tout de même un doute raisonnable à ses yeux ?

Parfois, le juge ne croit pas le défendeur, mais sa défense soulève quand même un doute dans l’esprit du tribunal. Dans ce cas, il doit vous acquitter.

3- Même en absence d’un doute soulevé par la défense, est-ce que la poursuite a prouvé la commission de l’infraction hors de tout doute raisonnable?

Ici, même si le juge ne croit pas le témoignage du défendeur, et que la défense de ce dernier ne soulève pas de doute raisonnable, il devra s’assurer que la poursuite a su prouver tous les éléments constitutifs de l’infraction, et qu’aucun doute ne subsiste dans son esprit sur le fait que le défendeur a commis l’infraction. Le juge en viendra à la conclusion que la poursuite a prouvé, hors de tout doute raisonnable, la commission de l’infraction par le défendeur et, dans ce cas, il sera reconnu coupable.

Comme vous êtes en mesure de le constater, le tribunal ne se contentera pas de pencher vers le policier simplement parce qu’il est policier. Il va plutôt se pencher sur la crédibilité de votre témoignage et de votre défense. Et, de la manière dont ledit test de 3 questions a été réfléchi, il permet au juge de bien évaluer les éléments de preuve, et la défense présentée par le défendeur.

Le tribunal sait très bien que sa décision ne reposera pas sur les qualités oratoires du défendeur, qui n’a pas nécessairement un vocabulaire « juridique », et qui n’est pas nécessairement à l’aise de témoigner dans un contexte, avouons-le, parfois stressant. Le tribunal considèrera également que le défendeur n’a pas les connaissances juridiques susceptibles de rivaliser avec celles du policier.

En conclusion, je vous précise que la clé du succès dans une démarche de défense au tribunal repose principalement sur la préparation, et aussi sur la connaissance de ce que vous devez démontrer . C’est pourquoi il est judicieux de consulter un avocat pour bien comprendre et bien vous préparer.

Le témoignage que le policier rendra au tribunal sera évalué en fonction de sa crédibilité, et non uniquement parce qu’il est policier. Il en sera de même pour le vôtre. Votre crédibilité ne doit pas être affectée par le fait que vous êtes le défendeur ou l’accusé.

Pour toutes questions, nous vous invitons à réserver une consultation auprès de notre expert, Me Éric Lamontagne en le joignant au 514 578-2982, ou via le site web www.contraventionexperts.ca.

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