Voitures électriques : la recharge rapide, ça fonctionne comment?

Publié le 17 décembre 2022 dans Électrique par Mathieu Bonin

Sur les autoroutes québécoises, il est dorénavant plus commun de rencontrer une borne de recharge rapide du Circuit Électrique qu’un restaurant Tim Hortons (711 bornes vs 655 restaurants selon les derniers chiffres, plus précisément).

Ainsi, aux quatre coins du Québec, le temps de recharge d’une de voiture électrique se compte dorénavant en minutes plutôt qu’en heures, ce qui simplifie les longs voyages. Cela dit, qui dit recharge rapide dit puissance élevée : comment se fait-il que les véhicules électriques puissent encaisser un tel transfert d’énergie sans se désintégrer à chaque fois?

Fonctionnement d’une borne de recharge

En Amérique du Nord, tous les manufacturiers de véhicules électriques (VÉ) et de bornes de recharge doivent respecter le protocole SAE-J1772. C’est un ensemble de normes d’ingénierie qui dictent entre autres la forme du connecteur, les spécifications électriques et les protocoles de communication. Grossièrement, la séquence de recharge d’un VÉ suit un ordre similaire à celui-ci-dessous :

  1. Proximity Pilot (PP): la borne détecte que le pistolet est physiquement bien enclenché sur le véhicule
  2. Control Pilot (CP): la ligne de communication entre la borne et le véhicule; un premier signal est envoyé (le handshake) et les deux dispositifs échangent des informations sur le courant disponible pour la recharge
  3. Le BMS (Battery Management System) évalue la température des cellules, le voltage min/max, le niveau de charge (state of charge, SOC) puis demande un certain nombre d’ampères à la borne
  4. La borne fournit le courant demandé par le véhicule. Selon la tension du chargeur, les terminaux utilisés seront les suivants :
    1. 120 V : L1 (ligne 1) et N (neutre)
    2. 208/240V : L1 et L2 (même terminal que N)
    3. 400V et plus : DC+ et DC-
Photo: Capture d'écran, Wikipedia

La différence entre une recharge à courant alternatif et une recharge à courant continu

La recharge à 120 V (niveau 1) et à 208/240 V (niveau 2) se fait avec du courant alternatif. Puisque les batteries à haute tension d’un VÉ opèrent avec du courant continu, un chargeur embarqué est requis pour convertir le courant alternatif en continu : c’est le principe même d’un AC/DC [insérez ici toutes vos références musicales/calembours au groupe anglo-australien].

Ainsi, la limite de puissance de recharge sera le plus souvent imposée par le chargeur embarqué du véhicule, qui variera selon la marque et le modèle. Ainsi, un Mitsubishi Outlander PHEV a un chargeur embarqué de 3,7 kW, alors qu’un Ford F-150 Lightning peut être livré avec l’option du chargeur double à 19,2 kW. Généralement, on peut s’attendre à une moyenne de 7 kW.

Photo: Antoine Joubert

Dans le cas d'une recharge rapide, le courant continu circule directement entre la borne et les batteries du véhicule : une fois la communication établie, c’est le système de gestion de batterie (BMS) du véhicule qui activera le transfert de puissance. Notons que la tension (voltage) entre la batterie et la borne doit être similaire. Par exemple, la batterie de Chevrolet Bolt a une tension nominale de 350 V; une borne de recharge rapide à 400 V peut s’adapter à cette différence de potentiel. Dans le cas d’une Porsche Taycan avec une batterie de 835 V max, celle-ci est équipée d’un convertisseur DC/DC afin de diminuer la tension en deux pour pouvoir se recharger sur une borne de 400V.

Dans tous les cas, que ce soit lors d’une recharge à la maison ou sur une borne rapide, c’est toujours le BMS du véhicule qui a le dernier mot. Ainsi, même si la borne ultra-rapide est prête à fournir 350 kW, un BMS peut bien décider de limiter la recharge à moins de 10 kW, si le système évalue que la batterie est trop froide, si le pourcentage de charge avoisine les 100% ou selon d’autres paramètres de contrôle décidés par le constructeur. Dans ce cas, vaut mieux terminer sa recharge sur une borne de niveau 2 : c’est bien moins cher et c’est courtois pour les autres électro-mobilistes.

Photo: Hydro-Québec

En quoi la recharge rapide peut-elle être dommageable pour une batterie?

Plus la puissance augmente, plus le courant est élevé : c’est ce que la formule P (kW) = V*I (A) stipule. Un courant élevé génère beaucoup de chaleur et peut endommager de manière permanente les cellules qui composent la batterie. Chaque cellule individuelle n’atteint pas sa tension maximale en même temps que les autres. Un balancement du voltage est donc nécessaire afin de ne pas dépasser cette limite. Le BMS agit donc comme protecteur et contrôle le courant entrant et sortant.

De surcroît, le BMS peut même activer le système de refroidissement (liquide, la très grande majorité du temps) ou des bandes chauffantes afin de maintenir une température optimale. Ainsi, la courbe de puissance lors de la recharge n'est jamais rectiligne; elle va varier selon les paramètres cités plus haut (sans s’y limiter). Dans un billet de l’Association des Véhicules Électriques du Québec, on décortique quelques séances de recharge afin de bien illustrer le comportement de certains véhicules à des bornes de recharge rapide.

Photo: Suncor Energy Inc

Verra-t-on des vitesses de recharge encore plus rapides dans le futur?

En un mot : sûrement! Il suffit de comparer l’offre de véhicules offrant la recharge rapide il y a 10 ans : ça se limitait pas mal à la Nissan Leaf, à la Mitsubishi i-MiEV et à la Tesla Model S.

En termes d’infrastructures, au Québec, la première borne rapide de 50 kW a été installée en novembre 2013. En date de septembre 2022, on comptait 917 bornes de recharge rapide (plus 236 bornes Supercharger de Tesla), dont plusieurs à 100 kW, 150 kW et même quelques-unes à 350 kW (notamment avec Electrify Canada et certaines stations Petro-Canada). Il est incroyable de voir les progrès fulgurants, que ce soit au niveau des bornes ultra-rapides et des véhicules qui puissent accepter une telle recharge.

Photo: Electrify Canada

Du côté des véhicules lourds, les manufacturiers s’entendent pour finaliser le futur standard de recharge ultra-rapide, le Megawatt Charging System. Toujours en développement, le connecteur sera triangulaire et la puissance pourra hypothétiquement atteindre 3500 kW! Évidemment, il n’est pas probable (à court terme du moins) de voir ce système de recharge fonctionner avec une voiture normale, car la tension maximale de 1250 V et le courant maximum de 3000 A surpassent largement les spécifications des VÉ les plus populaires. Quoique, considérant l’avancement rapide des technologies, on pourrait être agréablement surpris!

En vidéo: les camionnettes électriques qui seront bientôt sur nos routes

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