Formule ETS : une monoplace électrique fabriquée au Québec

Publié le 13 mars 2023 dans Actualité par Julien Amado

L’École de technologie supérieure, en abrégé ÉTS, forme des chercheurs et des ingénieurs dans des domaines variés. Et parmi tous les cursus proposés, il y en a un que nous trouvons particulièrement intéressant : la Formule ETS.

Il s’agit d’une équipe qui fabrique une monoplace qui court en Formule SAE, que l’on appelle aussi Formula Student. Cette voiture ressemble à une Formule 1, mais plus courte et moins puissante évidemment. Il est possible d’utiliser des moteurs à essence ou électriques. Des centaines d’écoles un peu partout dans le monde peuvent courir dans différentes épreuves.

Forte d’une grande expérience dans la construction d’autos de course, l’équipe québécoise a débuté l'aventure en 1988. À l’époque, la voiture était beaucoup moins évoluée qu’aujourd’hui.

Photo: ETS

Elle était dotée d’un châssis tubulaire en acier et d’un moteur à essence. Depuis 2020, un grand changement s’est opéré puisque la monoplace fabriquée dans les locaux de l’ÉTS possède désormais une motorisation électrique. Pour faire un clin d’œil aux barrages d’Hydro-Québec et à la voiture québécoise des années 60/70, les monoplaces électriques portent le nom de Manic. Le modèle 2023 s’appelle logiquement Manic-23.

Quatre moteurs et une monocoque en carbone

En regardant cette petite voiture noire sans trop la détailler, vous pourriez penser qu’elle est assez basique. Mais ne vous y trompez pas. Sa pièce maîtresse est un châssis monocoque en fibre de carbone, identique à celui d’une voiture exotique ou d’une Formule 1. D’abord conçue par ordinateur, la monocoque est ensuite fabriquée par les étudiants eux-mêmes, chez un partenaire de l’école.

Photo: Julien Amado

Travail de la fibre de carbone, pose de renforts à des endroits précis et d’inserts en aluminium pour accueillir certaines pièces, tout doit être exécuté avec précision car il n’est pas possible de revenir en arrière. Enfin, la cuisson dans un four autoclave permet de donner toute sa résistance à la coque.

Fixés à cette dernière, les bras de suspension sont aussi réalisés à l’école. Seuls les amortisseurs (aux réglages déterminés par les étudiants) sont achetés à un fournisseur. La suspension utilise des poussoirs à l’arrière et des tirants à l’avant. Elle est dissimulée derrière des caches qui favorisent l’aérodynamique.

Photo: Julien Amado

Contrairement aux voitures électriques qui circulent sur la route, la monoplace de l’ÉTS est munie de moteurs-roues. Chaque moteur développe 35 kW (47 ch) et est refroidi par eau. Toutefois, le règlement impose une puissance maximale de 80 kW (107 chevaux), c'est un algorithme de contrôle installé au sein de l'ordinateur de bord (VCU) qui veille à ne pas dépasser cette valeur.

Comme vous vous en doutez, mettre des moteurs dans les roues a pour inconvénient d’alourdir le poids non suspendu. Cependant, les jantes en fibre de carbone compensent un peu ce problème. Il faut aussi tenir compte du fait de la petite taille de la voiture et que les moteurs intégrés dans les roues libèrent de l’espace pour l’aérodynamique.

Photo: Julien Amado

Ce choix technique permet aussi de fournir plus ou moins de couple à chaque roue pour améliorer la tenue de route dans les virages, ce que l’on appelle la répartition vectorielle du couple. La régénération d’énergie peut également se faire sur les quatre moteurs indépendamment, ce qui est un avantage.

Effet de sol et DRS

Comme en Formule 1, le soubassement de la monoplace adopte la forme d’une aile d’avion inversée. Contrairement à un avion qui décolle, cela permet donc de coller la voiture au sol. C’est ce que l’on appelle communément l’effet de sol.

L’effet de sol étant proportionnel à la vitesse, il faut aussi de gros ailerons pour procurer beaucoup d’appui à la voiture dès les plus basses vitesses. En effet, la vitesse maximale ne dépasse pas 120 km/h et les circuits étant sinueux, il faut des ailerons fortement braqués pour maximiser les performances.

Le problème, c’est que des ailerons très braqués pénalisent la vélocité dans les lignes droites. Pour pallier ce problème, la voiture est équipée d’un double DRS, un autre équipement que l’on retrouve en Formule 1. Acronyme de l’anglais Drag Reduction System (système de réduction de la traînée), ce système fait bouger une partie des ailerons pour qu’il se placent à l’horizontale. Ainsi, les ailerons sont neutralisés dans les lignes droites puis reviennent à leur place dans les virages lorsque le pilote le souhaite. Pour actionner le DRS, il suffit d’appuyer sur un bouton situé derrière le volant.

Photo: Julien Amado

Petite batterie mais grosses accélérations

Les épreuves étant courtes et le véhicule compact, une grosse batterie n’est pas nécessaire. L’équipe se sert de batteries rectangulaires, de la taille d'une barre de chocolat, qui sont disposées dans des paniers en Kevlar. Le tout est ensuite enfermé dans une enveloppe en carbone.

La capacité totale s’élève à 7,45 kWh, ce qui procure 22 km d’autonomie au véhicule, la distance la plus longue qu’il y a à parcourir. Avec 107 chevaux, la monoplace n’est pas très puissante, mais avec un poids prévu dépassant à peine 150 kg les accélérations sont énergiques. Le 0 à 100 km/h est expédié en 3 secondes et pourrait l’être en moins de deux secondes si la puissance maximale des quatre moteurs pouvait être utilisée.

Photo: ETS

Le modèle que vous avez sous les yeux est la version 2022, le modèle 2023 étant en cours de construction. Les compétitions d’ingénierie qui ont lieu chaque année sont basées sur la performance mais pas uniquement. Il y a des points marqués pour huit épreuves différentes :

- Design d’ingénierie
- Plan d’affaires
- Analyse des coûts
- Accélération
- Skidpad (accélération latérale)
- Autocross
- Endurance
- Efficacité énergétique

Le programme 2023 prévoit la participation à plusieurs compétitions, notamment quatre en Europe et aux États-Unis l’été prochain (Allemagne, Croatie, Hongrie et Michigan). Le coût de ces épreuves étant évidemment élevé, l’équipe est toujours à la recherche de partenaires et de dons.

D'autre part, si vous êtes étudiant et que vous souhaitez intégrer l’équipe, sachez qu’il n’y a pas que des apprentis ingénieurs qui sont recrutés. Les étudiants peuvent avoir des profils très différents et venir de divers horizons. Donc, n’hésitez pas à faire parvenir votre candidature même si votre CV vous semble atypique sur papier.

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