Carnet de voyage : notre incroyable périple aux 24 heures du Mans 2023
La course des 24 Heures du Mans est une épreuve mythique, que beaucoup de pilotes rêvent de gagner un jour. Avec le Grand Prix de Formule 1 de Monaco et les 500 Miles d’Indianapolis, elle fait partie de la fameuse « triple couronne », que seul Graham Hill a réussi à remporter à ce jour. Fernando Alonso pourrait aussi y prétendre s’il retourne un jour tenter sa chance en Indy. C’est donc une course majeure, qui fêtait sa centième édition cette année. En effet, mis à part un arrêt en 1936, puis un autre à cause de la Seconde Guerre mondiale (1940 à 1948), les 24 Heures ont eu lieu chaque année depuis 1923.
La première chose qui frappe lorsque l’on se rend au Mans, c’est la ferveur du public. À notre arrivée le vendredi, nous avons pu sentir une atmosphère particulière. Le amateurs français sont évidemment venus en nombre, mais nous avons aussi croisé beaucoup de nationalités différentes dans les campings bordant la piste. Allemagne, Espagne, Portugal, Italie, Pays-Bas ou encore Belgique, l’Europe était à l’honneur, les plaques d’immatriculation nous permettant de deviner la provenance des spectateurs. Mais les plus fous demeurent les Britanniques, qui n’hésitent pas à faire le déplacement avec de superbes voitures. Mention spéciale aux trois anglais qui ont stationné leurs Porsche 911, Boxster et Jaguar F-Type dans l’herbe et ont déplié leur tente de camping pour dormir juste à côté!
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La fête au centre-ville
Le vendredi après-midi, nous avons assisté à la parade des pilotes. Dans une ambiance festive, les équipages (trois pilotes par voiture) ont défilé à tour de rôle dans le centre-ville du Mans, assis dans des véhicules qui n’avaient pas toujours un lien avec ceux qu’ils pilotent sur la piste. Si les pilotes officiels Toyota ont logiquement défilé dans une camionnette Hilux, il est plus amusant de voir des pilotes Chevrolet dans une DeDion Bouton du début du 20è siècle ou les pilotes Ferrari lancer des objets souvenir dans la foule à bord d’une Plymouth Valiant.
Les 24 Heures du Mans, c’est aussi l’occasion d’apercevoir des voitures sportives ou antiques en grand nombre. En quittant le centre-ville, nous avons croisé un nombre incalculable de Porsche 911 de toutes les époques, des Ferrari 296, Purosangue et 812, des Lotus Elise et Exige, des Alpine A110, mais aussi une grande quantité de Corvette et de Mustang. Toujours du côté américain, nous avons aperçu une Challenger R/T et même une Cadillac Eldorado du milieu des années 70!
Les anciennes à l’honneur
Suite à ces festivités, nous avons fait un tour au musée des 24 heures, qui a été complètement revu pour l’occasion. Les organisateurs ont fait jouer leurs contacts dans le monde entier pour faire venir une cinquantaine de voitures qui ont marqué l’histoire de l’épreuve (vous pouvez retrouver notre galerie photo complète ici). La puissance modeste des véhicules des années 20 fait sourire, mais la rapidité avec laquelle les performances ont évolué nous a surpris.
Les années 60 et 70, considérées comme un âge d'or, étaient magnifiquement représentées avec notamment deux Ford GT40, une Ferrari 330 P4, deux Porsche 917, une 935/87, trois Matra, sans oublier la Renault Alpine A442-B. La visite continue dans les années 1980 avec les redoutables Porsche 956 et 962, ainsi que Jaguar avec la XJR9-LM. Le voyage dans le temps se poursuit avec les années 1990, où les Mazda 787B, Porsche 911 GT1, BMW V12 LMR et Peugeot 905 tenaient les premiers rôles. Enfin, la période actuelle n’est pas oubliée avec les Audi R8 et R10, la Peugeot 908 HDI-FAP ainsi que les Porsche 919 Hybrid et Toyota GR010 Hybrid qui ont brillé ces dernières années.
Le samedi midi, certaines voitures ont été sorties du musée pour une parade de deux tours sur la piste. Mention spéciale à la Mazda 787B, dont le hurlement strident vous dresse les poils sur les bras, la mythique Ferrari 250 GTO, la superbe Porsche 917K et la Matra 670B dont le V12 chante comme aucun autre. Après le passage de ces mécaniques hurlantes, les modèles hybride des années 2020 nous ont semblé bien silencieux…
Une concurrence féroce
Pour cette 100è édition, beaucoup de constructeurs ont fait le déplacement, avec Toyota, Ferrari, Peugeot, Cadillac et Porsche engagés de manière officielle. En ajoutant Vanwall et Glickenhaus, il y avait 15 voitures inscrites dans la catégorie Hypercar en 2023! Parmi les autres engagés dignes de mention, on peut citer une Chevrolet Camaro ZL1 NASCAR (adaptée pour rouler au Mans), très rapide et qualifiée devant les voitures de la catégorie GT, mais aussi les Iron Dames, un équipage 100% féminin au volant d’une Porsche 911.
Un peu avant 16 heures, nous avons pris place en tribune, face aux Hypercar. Après La Marseillaise, l’hymne national français et le passage des avions Alphajet crachant leurs couleurs bleu/blanc/rouge, c’est enfin le moment du départ. Le choix de pneus a été rendu difficile à cause d’une averse qui a mouillé une partie du circuit mais pas l’autre. Au premier virage, beaucoup de pilotes se montrent très agressifs, ce qui nous a surpris pour une course aussi longue.
Au premier passage devant la ligne des puits, la discrétion des moteurs des Hypercar déçoit un peu...sauf la Cadillac, dont le V8 5,5 litres atmosphérique hurle beaucoup plus fort que les autres. En tout cas, peu importe leur sonorité, la vitesse d’entrée des Hypercar dans le premier virage est époustouflante! Votre serviteur ayant couvert les 24 Heures du Mans moto dans une autre vie, il n’y a aucune comparaison possible tant les repères de freinage et la vitesse d’entrée dans les virages sont différents!
Il est aussi intéressant de constater que parmi les GT, on note des différences de sonorité marquées entre les notes graves du moteur des Corvette, et la tonalité plus stridente des Porsche 911. Mais c’est la Camaro NASCAR qui rallie tous les suffrages, avec un grondement rauque et puissant, qui fait résonner toute la tribune lorsqu’elle passe à pleine vitesse! Une voiture qui s’est rapidement attiré la sympathie du public, qui la reconnaît à chacun de ses passages grâce à la tornade de décibels qu'elle génère.
Une 100ème qui a tenue toutes ses promesses
La fin d’après-midi du samedi a été marquée par de nombreux incidents et neutralisations. Plusieurs pilotes sortent de la piste, certains étant contrains à l’abandon avant même la première heure de course. L’arrivée d’un véritable déluge sur une seule portion du circuit tandis que l'asphalte qui borde les puits est parfaitement sec est un vrai casse-tête pour les pilotes et les stratèges.
Cette incertitude se poursuit dans la soirée, ce qui occasionne de nombreux changements en tête de la course. Lors d’une pause dans l’hospitalité Porsche, nous avons pu voir les caméras embarquées en continu des voitures 5 et 6. En plus du grand nombre d’insectes écrasés sur le pare-brise, les pilotes devaient composer avec une forte averse dans la ligne droite des Hunaudières que leur essuie-glace peinait à contenir. Confortablement assis sur notre chaise, on ne peut qu’avoir un immense respect pour ces pilotes et pour les risques insensés qu’ils prennent avec une visibilité aussi réduite.
Avec une météo plus clémente par la suite, la course s’est résumée à un duel entre Ferrari et Toyota pour la victoire finale. Une erreur de la voiture japonaise à deux heures de l’arrivée va offrir un écart suffisant à l’Hypercar italienne pour lui permettre de s’imposer. À la fin des deux tours d’horloge, c’est la Ferrari N°51 pilotée par Antonio Giovinazzi, Allessandro Pier Guidi et James Calado qui a gagné, devant la Toyota N°8 de Sébastien Buemi, Brendon Hartley et Ryō Hirakawa.
Cadillac grimpe sur la troisième marche du podium après une course solide. De leur côté, Peugeot et Porsche ont fait face à des sorties de piste et des problèmes de fiabilité qui ont entravé leur marche en avant. Seule dans son segment (catégorie Innovative Car) la Chevrolet Camaro ZL1 NASCAR a également vu l’arrivée.
Au moment de conclure ce périple, nous vous conseillons vivement de vous rendre aux 24 Heures du Mans au moins une fois si vous prévoyez un voyage en France au mois de juin. Vous ne le regretterez pas!