Batteries : Québec obtient l’usine de 7 milliards $ de Northvolt

Par Francis Halin

1,4 G$ de capitaux et jusqu’à 1,5 G$ d’incitatifs à la production si elle va bon train pour un total de près de 3 G$. C’est ce que pourrait mettre Québec dans la méga-usine de 7 G$ de la suédoise Northvolt. Et ce n’est qu’un début. Plus de 50 G$ d’investissements et 16 000 emplois dans la filière batterie sont sur la table, a annoncé le premier ministre François Legault jeudi matin.

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« Au Québec, on parle de jusqu’à 30 G$ d’investissement dans la filière batterie. Il y en a déjà 15 G$ de fait. On parle de minimum 16 000 emplois directs et indirects », s’est félicité le premier ministre du Québec, François Legault, qui attendait ce moment depuis longtemps.

« La totalité des projets présentement sur la table à dessin du gouvernement du Québec atteint presque 50 G$ », est allé jusqu’à dire par la suite son ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon.

À la mi-septembre, Le Journal avait rapporté que Québec pourrait mettre près de 1,4 G$ d’aides de toutes sortes à la méga-usine, qui devrait créer plus de 3000 emplois en Montérégie, soit à Saint-Basile-le-Grand et à McMasterville.

Un 4,6 G$ conditionnel

Or, on a annoncé jeudi avant-midi, à Montréal, que les incitatifs à la production pour les batteries que Northvolt fabriquera et vendra pourraient frôler à terme les 4,6 G$, dont le tiers, ou 1,5 G$, sera payé par Québec.

« Ce 4,6 G$ est très conditionnel parce qu’il faut qu’ils construisent la bâtisse, qu’ils commencent la production et qu’ils vendent les batteries. Et tout cela tient juste si l’Inflation Reduction Act [IRA] est encore en place », a insisté le ministre canadien de l’Industrie, François-Philippe Champagne.

En gros, Québec et Ottawa verseront l'équivalent de l'IRA, soit 35 $ US par kWh.

Selon le ministre Champagne, le contribuable québécois devrait revoir la couleur de son argent d’ici cinq à neuf ans. Il ajoute que Northvolt a opté pour le Québec après avoir étudié plus de 70 endroits pour son projet.

Ce nouveau jalon de la filière batterie québécoise survient alors que Ford vient de suspendre la construction de son usine de batteries de 3,5 G$ au Michigan pour réévaluer la rentabilité de son projet. 

Jeudi, Manufacturiers et Exportateurs du Québec (MEQ) s'est montré optimiste pour son secteur, malgré les défis de main-d'oeuvre.

« Cette annonce démontre que le secteur manufacturier au Québec représente un allié incontournable pour le développement économique du Québec et jouera un rôle important en matière du virage environnemental et énergétique à venir au Québec », a souligné par communiqué sa PDG, Véronique Proulx.

Rencontres au sommet

Selon nos informations, des ministres du gouvernement Trudeau ont eu une rencontre déterminante avec le PDG de Northvolt, le 29 avril dernier, en Suède. Ils ont notamment discuté de l’importance de l’usine de nickel de Vale à Terre-Neuve, qui devrait alimenter l’usine québécoise de Northvolt.

Au Québec, des échanges au sommet ont aussi eu lieu, le 30 juin, avec le ministre québécois des Finances, Eric Girard.

Travailleurs sans permis

En Suède, Northvolt vient d’être blanchie en cours après que des travailleurs hongrois et serbes furent épinglés sans permis de travail sur leur chantier. 

« En 2021, une inspection gouvernementale a découvert deux entreprises de construction, travaillant comme sous-traitants de l’une des entreprises de construction sur place, qui employaient au total 12 travailleurs avec des permis de travail incorrects de Hongrie et de Serbie et avec des salaires inférieurs aux conventions collectives suédoises », avait détaillé au Journal de Montréal Anders Thor, vice-président des communications de Northvolt. 

« Une procédure judiciaire a été engagée pour vérifier si Northvolt avait la responsabilité légale de ces travailleurs sur site, qui s’est conclue le 15 septembre 2023, libérant Northvolt de toutes les accusations », avait-il précisé. 

Montréal accueillera le siège social nord-américain de @northvolt!

Avec la construction de son usine de batteries au lithium-ion, ce sont des investissements totaux d’environ 7 G$ et plus de 3000 emplois qui seront créés au Québec et dans la région métropolitaine.

Cette… pic.twitter.com/Dw6T5K2sE7

— Valérie Plante (@Val_Plante) September 28, 2023

Québec et Ottawa se sont engagés à verser plus de 7 milliards de dollars en subventions à Northvolt, au lieu de laisser cet argent dans les poches des contribuables... C'est très cher payé pour attirer UNE usine. #polcan #polqc #assnat
À lire : 👇https://t.co/lmbZrcDwDb

— IEDM - MEI (@iedm_montreal) September 28, 2023

Valse de milliards de dollars 

Au début du mois, après l’annonce d’un prêt de 150 M$ au projet de 750 M$ de feuilles de cuivre Volta, à Granby, Le Journal calculait que les investissements totaux dans la filière batterie s’élevaient déjà à plus de 1,2 G$. 

À la mi-septembre, Le Journal rapportait que des citoyens de la vallée du Richelieu s’opposaient au projet de Northvolt avant même qu’il ne fût annoncé. 

On apprenait aussi que les 28,2 G$ de subventions accordés à Stellantis-LGES et à Volkswagen ne seraient pas rentabilisés avant 20 ans, selon le Directeur parlementaire du budget. 

- Avec la collaboration de Patrick Bellerose et de Guillaume St-Pierre

Qui est Northvolt ?

Fondation : 2015 

PDG : Peter Carlsson (ex-vp de Tesla) 

Siège social : Stockholm (Suède) 

Site de production principal : Skelleftea (Suède) 

Usine québécoise : superficie de 318 terrains de football américain + de 1,6G$ injectés dans le PIB

Financement récent : 1,6 G$ (Management Corporation of Ontario [IMCO], BlackRock and Canada Pension Plan Investment Board [CPP Investments]) 

Partenariats : BMW, Volkswagen, Volvo, Polestar 

(Source : Northvolt)

Aides publiques à l'usine de Northvolt

• Aide de Québec

1,4 G$ (400 M$ de subvention et 1 G$ de prêts et d’équités)

1,5 G$ (liés aux opérations et à l'IRA, selon les batteries fabriquées et vendues)

Total : 2,9 G$

• Aide d’Ottawa

1,3 G$ (subvention, prêts, équités)

3,1 G$ (liés aux opérations et à l'IRA, selon les batteries fabriquées et vendues)

TOTAL : 4,4 G$

Enjeux

• Accessibilité sociale

Même si un groupe d’opposants refusent de voir la méga-usine dans leur cour, comme l’a rapporté Le Journal, le ministre de l’Industrie, François-Philippe Champagne, est persuadé que la jeune entreprise saura les convaincre de sa bonne conduite.

« Ce sont des gens [Northvolt] qui sont habitués de s’intégrer dans de petites communautés, dans un tissu social », a-t-il assuré. 

• Pénurie de main-d’œuvre

Alors que le Québec est toujours en pénurie de main-d’œuvre, le premier ministre François Legault s'est fait rassurant jeudi.

« Oui, c’est un défi spécial pour les entreprises, mais c’est un énorme avantage pour les travailleurs », a-t-il expliqué, en affirmant qu’il s’agirait d’emplois payants.

• Logements

Malgré le manque criant de logements, Québec estime être capable de trouver les 3000 travailleurs de l’usine d’ici 2027. Pour ce qui est de sa construction, François Legault rappelle qu'un programme accéléré sera annoncé bientôt et que cela pourrait donner un bon coup de pouce à l'industrie, qui en a bien besoin.

• Environnement

Selon Le Devoir, même si le terrain de la méga-usine de Northvolt est boisé et situé près de terres agricoles, l'entreprise pourrait ne pas être obligée de passer par le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE).