Pagani Utopia - Le fils du boulanger

Publié le 1er janvier 2024 dans 2024 par Hugues Gonnot

Des centaines d’entrepreneurs se sont essayés à la construction de voitures de sport depuis des décennies. Au cours des 30 dernières années, de très rares marques ont réussi à émerger et à se forger une place parmi les grands noms du secteur. On pense à McLaren, Koenigsegg et enfin Pagani. Il est difficile d’imaginer la force de caractère, la détermination et le talent requis pour créer une automobile capable de passer à la postérité. De ces trois qualités, Horacio Pagani n’en a jamais manqué.

Né en 1955 à Casilda, un petit village d’Argentine, fils de parents boulangers, il montre dès son plus jeune âge une passion pour l’automobile en construisant des maquettes de sa création. Après avoir suivi des cours de design industriel et de mécanique, il s’établit à son compte à l’âge de 22 ans. Là, il réalise toutes sortes de projets, y compris une Formule 2 à moteur Renault en 1979. C’est en voyant cette auto que Juan Manuel Fangio, cinq fois champion du monde de Formule 1, décide d’aider le jeune Pagani. Il écrit plusieurs lettres de recommandation. Lamborghini répondra favorablement. En 1983, il arrive en Italie presque sans le sou et commence à travailler au bas de l’échelle.

Quand un département de matériaux composites est ouvert, il saute sur l’occasion. C’est là qu’il œuvrera sur la Countach Evoluzione, un prototype entièrement en fibre de carbone qui sera dévoilé en 1987. Pagani voit le futur de ce matériau, mais pas les dirigeants de la marque. Alors, il achète son propre four autoclave (qu’il utilise encore aujourd’hui). Après avoir travaillé sur différents projets, y compris la Countach 25e anniversaire, il quitte Lamborghini en 1991 pour fonder Modena Design, une compagnie spécialisée dans les pièces en fibre de carbone pour la Formule 1 et l’aéronautique.

Dès 1992, il commence à développer sa propre supercar, qui devait s’appeler Fangio, en hommage à son pygmalion. Le décès de ce dernier en 1995 mettra fin à l’idée. À la place, elle s’appellera Zonda, nom d’un vent de la cordillère des Andes. Elle sera présentée au salon de Genève en mars 1999. Facturée 325 000 USD à l’époque, elle intègre déjà un V12 d’origine Mercedes-Benz (grâce aux contacts de Fangio). Sous toutes ses formes, et il y en aura, la Zonda sera fabriquée jusqu’en 2022 à 140 exemplaires (la dernière, la HP Barchetta, coûtant près de 15 millions USD). Présentée en 2011, sa « remplaçante », la Huayra, sera construite à un peu plus de 300 exemplaires. Avec 440 et quelques Pagani fabriquées en 25 ans, c’est… exclusif!

Un projet titane…esque

La seconde usine, inaugurée en 2016, va permettre à la marque d’augmenter ses cadences. La nouvelle Utopia sera produite au rythme quasiment infernal d’un exemplaire par semaine! L’Utopia a été en développement durant six ans. Visant toujours l’efficacité aérodynamique maximale, Horacio Pagani a pourtant été chercher une partie de son inspiration dans les années 50 avec les scooters Vespa ou les bateaux Riva. Mais tout ce qui est technique n’a rien de nostalgique. L’auto a passé des milliers d’heures en soufflerie et utilise deux ailerons actifs, situés de chaque côté de la quadruple sortie d’échappement en titane, signature de la marque.

Le titane est aussi présent dans la structure, associé à de la fibre de carbone (un matériau développé en interne qui offre plus de rigidité) avec des sous-châssis en acier au chrome-molybdène. Le châssis de l’Utopia est 10,5% plus rigide en torsion que celui de la Huayra. Le moteur est une nouvelle évolution du V12 M158 fourni par AMG. Les ingénieurs de la marque à l’étoile ont suggéré à Pagani de passer au V8 hybride mais ce dernier a refusé. La puissance est transmise aux roues arrière via une boîte à 7 rapports (soit robotisée à simple embrayage développée par la compagnie anglaise Xtrac soit une toute nouvelle manuelle). Sous les pneus Pirelli PZero Corsa exclusifs, on retrouve des freins Brembo en carbone-céramique (6 pistons à l’avant et 4 à l’arrière). Pagani a fait un remarquable travail d’optimisation du poids qui, à 1 280 kilos, est réduit de 70 kilos par rapport à la Huayra originale.

Des sensations analogiques

Contrairement à la mode, l’Utopia se passe d’un grand écran central tactile et utilise des boutons. Le seul affichage numérique se trouve derrière le volant, usiné à partir d’un bloc solide d’aluminium.

L’Utopia ne sera produite qu’à 99 exemplaires. Et malgré les plus de trois millions de dollars demandés, ils sont tous réservés. Étant au fait des habitudes de la maison, gageons qu’elle connaîtra une longue carrière et de très nombreuses éditions limitées… au plus tard jusqu’en 2035. Pagani passera ensuite à l’électrique. La marque travaille déjà sur cette alternative et devrait continuer à faire appel à la technologie Mercedes. À notre époque, la véritable utopie, ce n’est pas la performance, c’est encore d’utiliser un V12!

Feu vert

Feu rouge

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