Nissan LEAF - L'apoptose

Publié le 1er janvier 2024 dans 2024 par Louis-Philippe Dubé

Bien avant qu’Elon Musk fasse constamment les manchettes (et éclate des records de vente) avec sa lignée de véhicules électriques révolutionnaire, la Nissan Leaf ouvrait la voie à l’électrification automobile à grande échelle. Dès son lancement en 2010, la voiture brillait de tous feux sur le plan de la popularité, créant un mouvement d’électromobilistes fidèles et séduits par un modèle électrique abordable. Nissan était dès lors en excellente position pour conquérir le marché « vert » de l’époque.

Ensuite sont venus les scandales, les ennuis financiers et les décisions douteuses qui ont écorché la marque dans les médias, et l’ont également rétrogradée dans pratiquement tous les segments dans laquelle elle opère. Pendant ce temps-là, les rivaux ont pris les devants et se sont armés de technologies avancées au chapitre de l’électrification, rendant la Leaf moins pertinente. À l'heure où les voitures électriques sont de plus en plus dispendieuses, la Leaf a donc toujours un as dans sa manche. La génération actuelle des très accessibles Bolt EV/EUV a été éliminée du catalogue Chevrolet, ce qui fait de la Nissan l’une des voitures électriques les plus abordables sur le marché. Elle peut, de plus, être livrée assez rapidement. Mais sa désuétude vaut-elle son prix compétitif?

Frugalité et écoanxiété (d’autonomie)

La Leaf est offerte en deux configurations de batterie, soit 40 kWh et 60 kWh, d’où les deux niveaux d’autonomie. Les modèles Plus sont équipés de la grosse batterie et ont 342 kilomètres d’autonomie. Celle de 40 kWh réduit cette distance à seulement 240 kilomètres. Sur le plan de la puissance, la Leaf n’est pas, comme vous vous en doutez, la reine des performances. Les modèles abritant la petite batterie développent 147 chevaux, et ceux avec la grosse batterie déploient 214 chevaux. C'est suffisant pour une utilisation quotidienne, mais pas vraiment éclatant.

Côté recharge, la Leaf cache dans son nez deux ports de recharge. Une connectique J1772 pour les recharges de niveau 1 et de niveau 2, mais aussi un port CHAdeMO séparé, qui doit être utilisé pour la recharge rapide. Or, cette configuration témoigne du caractère ancien de la Leaf. Le connecteur CHAdeMO n’est plus populaire chez les concepteurs de bornes de recharge rapide, et les constructeurs priorisent dorénavant le Combo CCS, qui adapte essentiellement le port J1172 pour la recharge rapide. Le connecteur CHAdeMO de la Leaf lui permet tout de même de tirer 100 kW de jus d’une borne de niveau 3 dans des conditions idéales, ce qui est relativement performant pour son époque.

À défaut d’avoir des technologies récentes comme la thermorégulation/préconditionnement de la batterie qui permettent de préparer la batterie pour une recharge et une décharge optimale, la Leaf est d’une fragilité particulière à cet égard. Très vulnérable aux changements de température, son autonomie est constamment en péril, même en été. De fait, il n’est pas rare que l’autonomie stipulée par le bloc d’instrument soit surestimée. Pionnière de la conduite à une pédale, la Leaf sait récupérer l’énergie cinétique du freinage comme nulle autre, une fonction très utile en ville qui peut aider à sauvegarder de précieux kilomètres.

Au chapitre de la conduite, la Leaf démontre une expérience douce et sans accroc qui compenser adéquatement le relief de nos routes accidentées. Et alors que beaucoup de véhicules modernes empilent des systèmes d’aide à la conduite pas toujours bien calibrés, nous apprécions la manière avec laquelle ces systèmes s’harmonisent avec la conduite « humaine ». Ils s’exécutent efficacement sans être trop intrusifs.

Un habitacle confortablement vétuste

Si l’on ne peut pas applaudir la Leaf pour l’espace qu’elle fournit à ses passagers, celui réservé au chargement est considérable pour le segment avec 668 litres en configuration normale. Cela est dû  à un coffre étonnamment profond pour une voiture électrique. Quand on rabat la banquette arrière, c’est 850 litres qui sont disponibles. En plus, cette compacte électrique est vraiment confortable grâce à une suspension bien réglée et des sièges moelleux, même durant les longs trajets. Nous sommes forcés d’admettre que l’interface du système d’infodivertissement est elle aussi vieillissante, et exécuter certaines opérations simples peut entraîner des distractions à cause des menus inutilement compliqués. Heureusement que les commandes analogiques se trouvant sous cet écran viennent à la rescousse la majorité du temps.

Le cycle de vie des feuilles d’un arbre est complexe et inévitable. L’apoptose, c’est lorsque ces feuilles tombent à l’automne pour laisser place à de nouveaux bourgeons. La Leaf est à ce stade depuis un bout de temps, malheureusement. Si l’on se fie à la tendance actuelle dans l’industrie, elle devrait se transformer en petit utilitaire empruntant la technologie motrice de l’Ariya, largement plus évoluée, mais aussi plus dispendieuse. Il est difficile de ne pas regarder les nouveaux venus de l’industrie avec leurs technologies dernier cri. Cependant, les listes d’attente pour ces vedettes de l’électrique ne font que s’allonger. La Leaf peut donc tout de même répondre aux besoins de ceux qui se soucient peu de ses bobos et qui désirent être servis rapidement.

Feu vert

Feu rouge

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