Ford Mustang Cobra 1993 : le meilleur pour la fin

Publié le 25 janvier 2025 dans Voitures anciennes par Hugues Gonnot

Pour célébrer les 15 ans de la Mustang « Fox Body » sur le marché, Ford a sorti une édition très spéciale. Mais pas simplement un modèle avec de jolies bandes décoratives et de belles roues. Non, la marque a écouté les amateurs et leur a donné ce qu’ils demandaient.

On peut dire que la Mustang Fox est née dans des circonstances difficiles : conçue au lendemain du premier choc pétrolier, elle arrive en concessions juste avant le second. Le développement de la plateforme Fox démarre en 1973. À ce moment, elle est pensée pour être utilisée partout dans le monde. Mais dès 1975, l’approche internationale est abandonnée et cela pour 3 raisons : des coûts de conception élevés, des coûts de construction élevés dus à la nécessité d’harmoniser les méthodes de fabrication à travers toutes les usines et enfin des normes gouvernementales complexes et qui, parfois, se contredisant entre les pays. L’Amérique devient alors le point focal. La plateforme Fox doit servir de base à plusieurs modèles mais la priorité des ingénieurs reste la Mustang.

« There is no replacement for displacement » (Rien ne remplace la cylindrée)

Ils vont faire les bons choix (construction monocoque, suspension McPherson à l’avant, suspension à 4 bras à l’arrière avec ressorts hélicoïdaux et direction à crémaillère) pour rendre la Mustang saine à conduire et surtout très adaptable aux évolutions de puissance des années 80. Lorsqu’il arrive sur le marché le 6 octobre 1978, le nouveau pony car est plus léger, plus aérodynamique, mieux équipé et plus habitable que la Mustang II qu’il remplace. Et c’est un succès avec 369 936 exemplaires produits (plus 110 144 exemplaires de sa cousine Mercury Capri, qui sera produite de 1979 à 1986).

Photo: Ford

Côté moteur, le haut du panier est soit le V8 5.0 (un 302 pouces cubes donc en fait un 4,9 litres) de 140 chevaux soit un 4 cylindres turbo de 131 chevaux. Initialement vue comme la voie de l’avenir, la turbocompression connaîtra quelques ratés. Le bloc sera retiré du marché pour le millésime 1982 à cause de problèmes de fiabilité avant de revenir en 1983 avec une injection électronique. Mais le turbo sera définitivement enlevé de la gamme normale (nous y reviendrons) à la fin de l'année modèle 1984. Parce qu’il faut dire qu’en face, le V8 n’a cessé d’évoluer.

Le V8 5.0 est retiré du catalogue dès 1980 pour être remplacé par un 4,2 litres développant 117 misérables chevaux. C’est le fond du baril… Mais 1982 va apporter un important changement : le 5.0 est de retour dans une version « High Output » de 157 chevaux. Ce millésime marque le début d’une nouvelle course à la puissance. Dès 1983, ce bloc passe à 175 chevaux puis 210 en 1985. Entre-temps, Ford a ressorti une version « nomale » du 5.0 avec une injection électronique développant 165 chevaux (seulement pour 1984 et 1985). L’année modèle 1986 est celle du passage à l’injection pour le H.O. (200 chevaux).

Le tournant

Ford a constamment fait évoluer son pony car mais le millésime 1987 est celui où le modèle est sérieusement restylé. Au menu : nouvelles faces avant et arrière, nouvel intérieur, nouvelle planche de bord. Le seul V8 qui reste est le 5.0 High Output. Il est revu et sa puissance monte alors à 225 chevaux. Un tel chiffre obligera GM à doter ses Camaro et Firebird d’un 5,7 litres pour pouvoir suivre. On est loin des 140 chevaux de 1979!

Photo: Ford

À partir de là, les changements vont être limités. Le 5.0 voit sa puissance baisser à 205 chevaux en 1993 et c’est à peu près tout. Mais ces améliorations régulières ont permis de maintenir les ventes d’un modèle vieillissant. La production ne descendra sous les 100 000 exemplaires qu’en 1991, la Mustang a alors 13 ans de présence sur le marché. Reste maintenant à parler des versions spéciales.

C’est quoi la différence entre un « O » et un « T »?

« Gagner le dimanche pour vendre le lundi » dit l’adage. Au début des années 80, Ford fonde SVO (pour Special Vehicle Operations) dans le but de gérer les programmes de course, la distribution de pièces de performance et de créer des véhicules de route utilisant les apprentissages de la piste. Le premier (et le dernier…) modèle présenté par la division sera la Mustang SVO en 1984. Grâce à une injection recalibrée, un échangeur air-air et un contrôle électronique de pression du turbo Air Research T03, elle développe 175 chevaux, soit autant que le V8 High Output. Elle se distingue également par un châssis particulièrement affûté et une esthétique unique (nouvelle calandre, aileron arrière double, nouveaux phares et roues spécifiques). Mais son prix élevé limitera son potentiel commercial et même le boost à 205 chevaux en 1985 n’y fera rien : seules 9 844 SVO seront produites en 3 ans. Au moins, grâce à la SVO, le turbo aura survécu jusqu’en 1986.

Photo: Ford

SVO est mis en veille mais Ford n’abandonne pas l’idée et lui crée un successeur en 1991 : SVT (pour Special Vehicle Team). Les deux premiers véhicules sont annoncés au Salon de l’auto de Chicago en février 1992 : la Mustang Cobra et le F-150 Lightning. Cette fois-ci pour la Mustang, pas question de turbocompression. Ford a écumé les clubs d’amateurs et la réponse a été simple : faites-nous une GT en mieux.

C’est en dessous que ça se passe

Lorsque l’on regarde une Cobra 1993, les différences esthétiques avec une GT de série sont très limitées : grille avant avec un cheval chromé, emblèmes de cobra sur ailes avant, feux arrière modifiés, base de caisse sans écopes en avant des roues et jantes turbine de 17 pouces. À l’intérieur, même histoire où seuls les tapis de sol avec un logo cobra diffèrent.

Photo: Ford

Par contre, pour la partie mécanique, il y a du changement. Le V8 5.0 est copieusement revu : collecteurs d’admission et d’échappement modifiés, papillon des gaz de 65 mm (contre 60 pour une GT), injecteurs à plus gros débit, nouvelles têtes GT-40 avec des soupapes plus larges, nouvel arbre à cames, nouveaux culbuteurs permettant une plus grande levée des soupapes, nouvelle courroie, ordinateur de contrôle EEC-IV recalibré sans oublier une ligne d’échappement moins restrictive. Cela donne un moteur plus puissant qui aime mieux monter dans les tours. Une Mustang GT développe 205 chevaux à 4 200 tr/min et 275 lb-pi de couple à 3 000 tr/min. La Cobra passe à 235 chevaux à 4 600 tr/min et 280 lb-pi à 4 000 tr/min. La ligne rouge est à 6 000 tr/min. La boîte de vitesse est une Borg-Warner T5 renforcée à 5 rapports. Elle envoie la puissance à un différentiel arrière à glissement limité de 8,8 pouces avec un rapport de pont 3,08:1.

Photo: Ford

Le châssis n’a pas été laissé de côté. La suspension a été recalibrée mais les ingénieurs n’ont pas voulu que la Cobra soit trop raide sur la route. Pour compenser les roues de 17 pouces et les pneus à profil bas (des Goodyear 245/45ZR17 directionnels), les ressorts sont un peu plus souples et la barre antiroulis avant plus petite que dans la GT. La configuration de l’essieu arrière reste identique (y compris la barre antiroulis) mais des silentblocs plus fermes (aussi appelés bushings) sont montés. Les amortisseurs (aux spécifications uniques à SVT) proviennent du fournisseur japonais Tokico. Enfin, le freinage est à disque aux 4 roues : 11 pouces de la Mustang GT à l’avant et 10 pouces de la Thunderbird Turbo Coupe à l’arrière.

Photo: Ford

Meilleure… mais pas la meilleure!

Le millésime 1993 marque l’arrivée des nouvelles Chevrolet Camaro et Pontiac Firebird et la presse spécialisée ne va pas se priver de les comparer. Dans son numéro de février 1993, le magazine Car and Driver réalise le 0 à 60 mph en 5,6 secondes (Ford indique 5,7 secondes sur l’exercice et 140 mph en pointe dans sa brochure), le quart de mille en 14,3 secondes à 98 mph et 0,85 g d’accélération latérale. Face à une Firebird Formula et une Camaro Z28, la Cobra finit troisième à cause d’un châssis qui a pris de l’âge et des performances un peu en retrait (les jumelles GM sont dotées du V8 LT1 de 5,7 litres développant 275 chevaux et couplé à une boîte manuelle à 6 rapports). Même son de cloche chez Motor Trend où la Cobra s’incline devant la Camaro Z28 (0 à 60 mph en 6,2 secondes, quart de mille en 14,4 secondes et 0,86 g contre 5,6 secondes, 14,0 secondes et 0,87 g). La Ford est par contre jugée plus confortable.

Mais les amateurs comprennent qu’il s’agit d’une auto spéciale malgré tout et Ford produira 4 993 exemplaires.

Intérieur

Noir

Rouge éclatant sans vernis

Rouge éclatant avec vernis

Bleu électrique métallisé

Total

Gris Opal (tissu)

 327

 1

 414

 368

1 110

Noir (tissu)

 448

 1

 361

 185

 995

Gris Opal (cuir)

1 079

 7

1 000

 802

2 888

Total

1 854

 9

1 775

1 355

4 993

La nouvelle Mustang était en approche pour 1994 mais Ford a décidé de faire un dernier petit cadeau aux enthousiastes…

Photo: Ford

On vous en R-emet encore?

Les ingénieurs de SVT ont concocté une variante Cobra R qu’ils destinaient à courir en IMSA ou SCCA. À l’extérieur, les différences se résument aux roues de 17 pouces peintes en noir. Le moteur n’est pas changé mais son refroidissement est amélioré avec un plus grand radiateur. Les freins avant sont plus gros avec des étriers PBR tandis que la suspension est renforcée et comprend des amortisseurs Koni, des ressorts Eibach et des barres stabilisatrices plus épaisses. Pour réduire le poids, SVT a supprimé la radio, la climatisation, les phares antibrouillard, les lève-vitres électriques, une partie des matériaux insonorisants ainsi que la banquette arrière. Si une Mustang Cobra demandait 19 990 USD, la Cobra R était facturée 25 692 USD!

Les Cobra R étaient assemblées à l’usine de Dearborn avant de partir chez MascoTech, dans le Michigan, pour recevoir des renforts de châssis et les différentes modifications. Ford en produira 107 exemplaires (tous en rouge éclatant avec un intérieur gris) qui seront vendus en moins de 4 heures le 15 avril 1993. Contrairement aux souhaits de SVT, très peu d’entre eux se retrouveront sur une piste de course…

À voir aussi : Antoine Joubert vous présente la brochure de la Ford Mustang 1993

Share on FacebookShare on TwitterShare by emailShare on Pinterest
Partager

ℹ️ En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de cookies telle que décrite dans notre Politique de confidentialité. ×