Échec électrique

Publié le 7 juin 2025 dans Blogue par Antoine Joubert

Le renforcement des normes VZE (véhicules zéro émission) oblige les constructeurs automobiles à multiplier leurs offres en matière de véhicules électriques. Quelques-uns le font parce que l’électrification fait partie de leur stratégie, mais d’autres sont réfractaires et prennent leur temps. Et il y a toujours cette question de viabilité financière d’un véhicule électrique développé à grands frais, alors qu’un camion pleine grandeur à essence demeure probablement la formule la plus rentable du monde automobile.

Si certains fabricants tirent très bien leur épingle du jeu avec l’électrification, d’autres vivent des échecs. Parfois plus d’un. Et ça coûte cher. De plus en plus, on voit des marques lancer des véhicules qui n’auraient même pas le mérite d’être qualifiés de feux de paille. Parce qu’ils ont été la tendance du jour, peut-être de la semaine, mais pas du mois!

D’entrée de jeu, je pense évidemment au Volkswagen ID. Buzz. C’est un véhicule que l’on attendait depuis un bon nombre d’années, d’abord dévoilé au Salon de l’auto de Detroit en janvier 2017. Il a finalement été lancé en 2022 en Europe, puis presque trois ans plus tard chez nous. Un produit désirable, magnifiquement dessiné et arborant un style rétro-moderne bien dosé, ce qui expliquait d’ailleurs l’engouement du public à son égard. Des dizaines d’acheteurs sérieux avaient donné un dépôt chez leur concessionnaire local, priant pour pouvoir obtenir l’une des premières unités. Le château de cartes s’est toutefois effondré lorsque Volkswagen en a révélé le prix : grosso modo, entre 80 000 $ et 90 000 $ pour un véhicule n’ayant même pas 400 km d’autonomie dans les meilleures conditions.

Photo: Julien Amado

Il n’en fallait pas plus pour que le rêve de plusieurs devienne un cauchemar pour les concessionnaires, lesquels fondaient beaucoup d’espoir dans ce modèle. À ce jour, à peine 200 à 250 ID. Buzz ont trouvé preneur au pays, alors que plus de 700 exemplaires sont disponibles pour livraison immédiate chez les concessionnaires. Et savez-vous combien ces derniers en ont commandé? ZÉRO! Dire que ce véhicule avait aussi pour objectif de redorer l’image de la marque...

La même chose s’est produite chez Stellantis, d’abord avec la Dodge Charger Daytona, ensuite avec le Jeep Wagoneer S. Deux véhicules partageant la même plateforme et donc la même technologie, et sur lesquels le constructeur avait misé gros. Il va de soi que le retour de la Charger était attendu de pied ferme par les amateurs. La voiture arbore un design très aguichant, ne donnant aucunement l’impression d’une auto électrique, et sa force de caractère rappelle les déclinaisons de précédente génération renfermant de gros moteurs V8. Or, l’arrivée très tardive d’un modèle 2024 en décembre de la même année fut incompréhensible. Tout comme l’absence de la variante R/T plus abordable, que Dodge a choisi d’abandonner pour 2026 afin de ne conserver que des modèles dont le prix oscille autour des six chiffres.

Photo: Antoine Joubert

Certes, la Charger Daytona Scat Pack offre de la performance, mais elle s’accompagne d’une facture à ce point indécente que la clientèle n’a pas mordu à l’hameçon – surtout en considérant une autonomie annoncée à 388 km et en sachant qu’un équivalent à essence se pointera bientôt le bout du nez. N’oublions pas non plus que la multiplication des problèmes de fiabilité de la voiture fait déchanter la clientèle et décourage les concessionnaires.

Idem pour le Jeep Wagoneer S, avec lequel je suis tombé en panne cet hiver, le dispositif de recharge ayant gelé. Impossible de reprendre la route. Étiqueté à 92 000 $ et lui aussi introduit juste avant les Fêtes alors qu’il s’agissait d’un modèle 2024, le Wagoneer S était déjà vendu avec de gros rabais quelques semaines après son introduction. Certains concessionnaires ont même refusé d’en commander, jugeant qu’ils n’avaient pas besoin d’un boulet au pied supplémentaire.

Photo: Dominic Boucher

Il faut mentionner que tout ne tourne pas rond chez Stellantis et que les concessionnaires peinent déjà à sortir la tête hors de l’eau. Autant le dire : ces deux véhicules électriques constituent de véritables échecs commerciaux. Et pour renflouer les coffres, Stellantis a annoncé le retour du V8 dans la camionnette Ram! Voilà qui dit tout.

L’Acura ZDX, le Lexus RZ 450e, la gamme EQS de Mercedes-Benz et le VinFast VF9 sont d’autres exemples de véhicules qui ne connaissent pas le succès escompté. Pour quelques-uns d’entre eux, les ambitions du constructeur étaient modérées. Cependant, ce n’est clairement pas le cas pour Mercedes-Benz, qui admet s’être joyeusement planté, au point de vouloir revoir sa stratégie.

Alors, quel sera le prochain « échec électrique » de l’industrie? Difficile à dire. Toutefois, nous savons aujourd’hui que la clientèle n’est pas dupe, que l’offre est de plus en plus grande et qu’un prix trop élevé combiné à une trop faible autonomie réduit de beaucoup les chances de succès.

Dans mon garage : Antoine vit une mésaventure avec le Jeep Wagoneer S

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