BMW et Debrecen : du positif dans la filière batterie
Les projets avortés de la filière batterie ne se comptent plus au Québec. EcoPro, Lion Électrique, Taïga, Northvolt, FLO, nommez-les! Les nuages s’assombrissent même du côté d’Ultium Cam et de Lithion, ce qui pourrait engendrer des pertes d’emplois supplémentaires. Et puisque Québec a investi des sommes colossales dans l’ensemble de ces projets, inutile de vous dire que les contribuables ont payé très cher pour ce qui est aujourd’hui considéré comme un véritable « show de boucane »...
Il faudra prendre le temps d’analyser, cas par cas, les raisons ayant mené à la perte de ces contrats ou entreprises. Pour celles qui restent, il s’agira de trouver une certaine viabilité financière sans que le gouvernement soit encore obligé d’y investir des montants supplémentaires. Parce que la farce a assez duré, mais aussi parce que les contribuables sont en droit d’obtenir des explications pour justifier chacun de ces échecs.
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Si au Québec on a l’impression d’être le dindon de la farce dans toute cette aventure, il n’y a pas qu’ici que les choses tournent au vinaigre. Ainsi, Honda Canada retarde, pour une durée indéterminée, la fabrication d’une ligne de batteries de véhicules électriques, alors que Stellantis annonçait cette semaine que son usine de batteries située à Windsor allait changer de vocation. Et puis, il y a Volkswagen qui, dans la ville de St. Thomas, prend son temps pour accoucher de son usine de batteries pour véhicules électriques, pendant que General Motors ferme son infrastructure d’Ingersoll, qui fabrique depuis trois ans des fourgons BrightDrop 100% électriques. GM a même annoncé tout récemment la fermeture temporaire de l’usine Zero de Detroit, coûtant le poste à près de 2 000 travailleurs. Et pour cause, une chute de la demande dans le domaine de l’électrification, combinée à des objectifs devenus caducs depuis l’arrivée à la présidence de Donald Trump.
C’est indéniable, l’électrification représente aujourd’hui un sérieux défi pour les manufacturiers, surtout pour ceux qui n’y ont pas cru dès le début. Or, parce que les règles diffèrent à travers le monde et que les constructeurs bien préparés peuvent aujourd’hui y trouver leur compte, certains projets attirent plus l’attention que d’autres. C’est le cas de BMW, qui a investi massivement dans un projet d’envergure - à Debrecen, en Hongrie - pour la fabrication d’une nouvelle génération de véhicules électriques.

Le maire, le président, le recteur…
BMW nous a donc conviés à découvrir non seulement ses nouvelles installations, mais également la ville de Debrecen, dont la population a doublé depuis quelques années. Accueillis par le maire qui nous a entretenus sur le développement économique de la ville et sur l’importance de BMW pour la prospérité de l’endroit, nous avons ensuite été invités dans la grande bibliothèque de l’université où le recteur allait notamment souligner l’ajout de nouvelles formations permettant l’obtention de postes qualifiés au sein de l’entreprise. L’idée étant bien sûr d’illustrer à quel point l’arrivée d’une telle usine dans la ville a un impact sur la population et sur le développement des environs.
Naturellement, nous attendait aussi Milan Nedeljkovic, membre du comité de direction de BMW et responsable du projet. Il nous a renseignées sur les différents éléments permettant à cette usine d’être efficace au chapitre de la productivité et sur le plan environnemental. Cette visite aurait sans doute été bénéfique pour les nombreux gestionnaires de projets ratés dans le domaine de l’assemblage de véhicules électriques ou de leurs pièces. Il faut dire qu’à Debrecen, tout y est fait : des pièces de carrosserie jusqu’aux batteries, et même les cellules servant à leur assemblage. Il s’agit de la première usine BMW 100% dédiée à la voiture électrique. Depuis peu, le nouveau iX3 y est monté. Cette manufacture se dresse sur un site de 400 hectares et comporte 22 bâtiments, permettant entre autres l’entreposage de plus de 80% des pièces nécessaires à la fabrication du iX3.

Bien que l’on fasse en partie appel à l’hydroélectricité et à l’éolienne, l’usine est principalement alimentée par l’énergie solaire. En effet, des panneaux occupent l’espace de 71 terrains de football, permettant ainsi une énergie verte et renouvelable. BMW innove en proposant une formule au chapitre de la chambre de peinture, fonctionnant sans énergie fossile. Celle-ci permet de réduire de 12 000 tonnes les émissions de dioxyde de carbone annuelles, constituant une révolution en la matière.
Autre surprise, BMW fait aussi appel à CATL et EVE Energy, deux entreprises connexes et situées à proximité, qui fabriquent certains composants essentiels à l’assemblage de la nouvelle batterie Gen6 qui équipe le BMW iX3. Il en découle une meilleure facilité de fabrication, via une association naturelle et au diapason, permettant aussi une plus grande flexibilité dans la fabrication des véhicules. Ne soyez d’ailleurs pas étonné d’apprendre que d’ici peu, d’autres modèles exploitant cette technologie sortiront de cette usine d’à peu près 2 000 employés et qui pourrait en accueillir davantage.

Association gagnant-gagnant
BMW n’aurait sans doute pu fabriquer de tels véhicules en Allemagne, où les coûts de production auraient été exponentiellement plus élevés. Et il fallait aussi qu’il puisse innover en fabriquant des véhicules électrifiés dont l’impact environnemental initial serait réduit de façon significative. De son côté, la ville de Debrecen n’attendait que cela :qu’une telle entreprise cogne à sa porte pour la servir le plus efficacement possible et pour que les deux partis en tirent de grands avantages. Debrecen rayonne donc au pouls de l’entreprise bavaroise qui semble avoir trouvé la formule pour rendre financièrement viable la vente de véhicules électriques. Un projet innovateur, vert et inspirant, qui peut sans aucun doute servir de modèle à l’industrie qui, en ce moment, cherche des solutions. Mais encore faut-il y croire! Pour l’instant, l’optimisme ne fait pas partie du vocabulaire de ceux qui ont appris, à la dure, que l’industrie du véhicule électrique ne pouvait exister qu’avec l’appui des gouvernements.
En terminant, la demande pour le iX3 pourrait ne pas atteindre le niveau anticipé, comme c’est actuellement le cas pour le Porsche Macan EV. Pour l’heure, BMW compte assembler environ 150 000 iX3 par an, mais pourrait rapidement revoir sa production en modifiant l’approche. En fabriquant par exemple d’autres modèles de véhicules reposant sur cette plate-forme modulable, puisque l’usine a été pensée en conséquence. Le constructeur se met donc à l’abri de changements soudains de stratégies ou à l’obligation de répondre à de nouvelles normes, contraintes ayant un impact immédiat sur les plans manufacturiers.
