Plafond à 64 999 $ : uniquement chez Hyundai, Kia, Lexus et Volvo
Suivant la publication d’un récent article concernant des changements apportés à l’admissibilité aux subventions de certains véhicules électriques, j’ai reçu plusieurs messages de la part de constructeurs et de concessionnaires me mentionnant que j’étais dans l’erreur.
Il m’a donc fallu approfondir la question, puisque cet article avait été écrit après avoir consulté une page web du site du gouvernement du Québec. Sur cette page, on comprend clairement que tout véhicule électrique vendu à plus de 64 999 $ – incluant avec l’ajout de groupes d’options ou d’éléments mécaniques distincts – serait dorénavant exclu de la liste des modèles admissibles.
- À lire aussi: Véhicules électriques : vivement la fin des subventions
- À lire aussi: Dans mon garage : la subvention fédérale et la situation chez Nissan
Voici en clair ce qu’indique la page en question : « À partir du 10 novembre 2025, afin de déterminer l’admissibilité d’un véhicule au programme et le montant du rabais, le prix des composantes suivantes sera additionné au prix de détail suggéré par le fabricant (PDSF). Groupes d’options proposés par le manufacturier et ajouts liés à une composante intrinsèque, telle que la motorisation ou la batterie, directement ou par le biais d’un logiciel. Par exemple, pour un véhicule dont le PDSF initial est de 64 000 $, auquel on ajoute une batterie à rayon étendu ou un ensemble d’options provenant du manufacturier au coût de 6 000 $, le PDSF sera réputé être de 70 000 $ pour déterminer l’admissibilité du véhicule. »

On comprend ainsi que tous les véhicules vendus avec des options et dont le prix de détail suggéré dépasse 64 999 $ (ou 54 999 $ pour une voiture) seront exclus et ne pourront donc pas bénéficier de la subvention pouvant atteindre 4 000 $ jusqu’au 31 décembre 2025 et 2 000 $ à partir du 1er janvier 2026.
Certains concessionnaires m’ont écrit pour me mentionner que leurs véhicules étaient toujours admissibles. Ils n’ont pas caché être dans l’incompréhension la plus totale, quoi qu’heureux de ne pas faire partie de cette courte liste de véhicules qui ne se qualifient désormais plus.
Par exemple, un concessionnaire Audi m’a indiqué le Q4 e-tron quattro 2026, dont la facture peut atteindre plus de 88 000 $ uniquement avec les groupes d’options et options individuelles installés en usine, était toujours admissible. Son prix de détail suggéré par le fabricant est de 64 990 $, mais personne n’achète sans choisir un minimum d’options.

Même chose du côté du Jeep Grand Cherokee 4xe, auquel peut s’ajouter un groupe d’options de 15 600 $ ou 18 400 $ (pour atteindre près de 80 000 $), ou encore du Mercedes-Benz GLC 350e. Des exemples comme ceux-là, on en compte plusieurs. Même le controversé Tesla Model Y peut encore avoir droit au rabais.
Le comble, toutefois, c’est la Dodge Charger Daytona, qui demeure toujours admissible alors que le fait de la subventionner constitue une mauvaise blague depuis son arrivée sur le marché. Parce qu’elle est catégorisée comme une voiture, elle doit se vendre sous le seuil des 54 999 $ afin de conserver son admissibilité. Or, la version de base R/T à 54 990 $ n’est même plus produite. Oui, Dodge l’affiche toujours sur son site web, mais il est aujourd’hui impossible de la commander. Ça nous amène au modèle Scat Pack, faisant grimper la facture de 32 000 $ d’un coup sec!
Stratégiquement, Dodge propose l’ensemble Scat Pack comme un groupe d’options, bien qu’il permette d’obtenir une puissance accrue, des moteurs électriques plus performants et un équipement beaucoup plus luxueux. Mais ce n’est pas fini. On peut ensuite ajouter plusieurs ensembles et options individuelles installés en usine, faisant grimper la facture à plus de 107 000 $. Et malgré tout, la Charger demeure admissible à ce rabais de 4 000 $ octroyé par nos fonds publics.

Concurrence déloyale
En fait, quelques modèles à peine sont retranchés du programme Roulez vert. Pour commencer, il y a l’Ioniq 6 de Hyundai avec l’ensemble Ultimate, les deux versions les plus luxueuses de l’Ioniq 9 de même que les trois versions les plus huppées du Kia EV9. Ensuite, les Lexus NX 450h+ et RZ 350e, dès l’ajout de groupes d’options, de même que plusieurs déclinaisons des Volvo EC40, S60 PHEV et XC60 PHEV cessent d’être subventionnés. C’est tout.
À la suite d’une demande de la Corporation des concessionnaires automobiles du Québec (CCAQ), le ministère de l‘Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP) a apporté quelques précisions supplémentaires par voie de communiqué. Or, ces informations ne se trouvent pas sur le site web public, semant la confusion.
Par exemple, on affirme dans ce communiqué que les versions retirées du programme « ne sont pas disponibles à la vente sans l’ajout du groupe d’options ». Or, ceci est faux, puisqu’il est possible d’acheter ou de commander l’entièreté de ces modèles sans choisir d’options, alors qu’il en va autrement pour la Dodge Charger, qui demeure admissible. On peut facilement comprendre la grogne chez les concessionnaires des marques concernées.

D’autre part, on peut s’interroger sur la pertinence d’avoir mis en place cette règle le 10 novembre plutôt que le 1er janvier à venir, et ce, sans l’avoir médiatisée. L’économie réalisée par ce plan d’action en apparence étanche (puisque le MELCCFP ne reviendra pas sur sa décision) est effectivement symbolique par rapport à l’étendue du programme, qui s’achèvera le 31 décembre 2026.
De son côté, la CCAQ a réagi en mentionnant ceci : « Cette mesure de resserrement a soulevé un grand nombre de questions chez les concessionnaires. Nous comprenons l’importance d’une gestion rigoureuse, mais les annonces ponctuelles rendent difficile la compréhension de la vision d’ensemble du gouvernement pour la transition électrique. »
Le président de la CCAQ ajoute également que l’objectif de ventes de véhicules zéro émission, fixé à 22% pour 2025 et à 32,5% pour 2026, est inatteignable. Il réitère donc au Gouvernement de réduire ses cibles de moitié, ce qui serait plus en harmonie avec la réalité du marché actuel.

Quelle sera la suite?
Une fois de plus, nous sommes à même de constater que les décisions prises hâtivement par certains fonctionnaires ont été prises sans grande réflexion ni recherche approfondie. Il en découle une concurrence déloyale : certains constructeurs se retrouvent du jour au lendemain désavantagés, alors que d’autres se trouvant dans la même situation ont un passe-droit.
Est-ce que Hyundai, Kia, Lexus et Volvo feront appel de ces décisions? Et pourront-ils avoir gain de cause? Autrement, est-ce que l’erreur commise par un gouvernement qui communique mal ses intentions pour ensuite prendre des décisions inéquitables pourra être réparée? De toute évidence, on tente à Québec de gratter des fonds de tiroir en effectuant des actions malhabiles auprès d’une industrie qui a déjà beaucoup souffert.
Consolons-nous en rappelant que les subventions tirent à leur fin et que les impacts des décisions ne seront dorénavant que symboliques. Sauf bien sûr en ce qui concerne les objectifs de ventes de véhicules zéro émission qui, on le sait, sont beaucoup trop agressifs. N’oublions pas qu’en ne rencontrant pas les objectifs, les constructeurs s’exposent à des pénalités pouvant atteindre 20 000 $ par véhicule excédentaire.
