Rolls-Royce Ghost 2014: La reine de l'apologie
Aucun doute possible, la Rolls-Royce est la reine de l’apologie. Mais, parmi la multiplicité de qualificatifs flatteurs que l’on peut lui décerner, il y en aura toujours un qui lui fera rudement défaut. Vous est-il déjà arrivé de vous extasier sur la beauté d’une de ces augustes voitures anglaises? Si l’on est franc, il faut bien convenir que les Rolls-Royce n’ont jamais fait vibrer la fibre esthétique de quiconque. Prenons la Ghost qui, à mon humble avis, ressemble davantage à un frigidaire sur roues qu’à une automobile de grande lignée. On aurait cru que sa version 2 portes – le coupé Wraith, récemment dévoilé – puisse insuffler un peu de charme à ce riche duo, mais il n’en est rien. Imposant oui, élégant non. Ce nouveau modèle ne pratique pas la tempérance non plus avec une cavalerie de 624 chevaux.
Si l’on reconnait qu’il est plus difficile de dessiner une jolie petite voiture qu’une grande, on peut en conclure que les stylistes de la marque n’ont jamais eu la main très heureuse dans l’élaboration de ces prestigieuses limousines. Par ailleurs, si leur mandat était d’en imposer, on peut dire qu’ils ont réussi et, quel que soit le modèle, les Rolls-Royce dégagent dans toute leur lourdeur une allure de supériorité, sinon d’invincibilité. Leur opulence n’impose cependant pas le respect auquel on serait en droit de s’attendre, et au cours des dix jours que j’ai passés au volant de la Ghost, les commentaires soulevés sur son passage ne sont pas toujours dignes des expressions admises derrière les murs de la Cour d’Angleterre. Je vous laisse le choix des injures pour aborder le côté plus sérieux de cet essai.
- À lire aussi: Partir avec classe : le corbillard selon Rolls-Royce
- À lire aussi: Rolls-Royce aura son VUS
Une motorisation signée BMW
Brièvement, mentionnons que Rolls-Royce construit toujours ses voitures en Angleterre, mais qu’une bonne partie des pièces lui sont acheminées à partir de l’Allemagne, plus précisément de chez BMW qui est propriétaire de la marque britannique. Ainsi, le moteur V12 double turbo de 6,6 litres ainsi que la transmission automatique à 8 rapports de la Ghost proviennent de la Série 7 du constructeur allemand. Contrairement à l’ancienne tradition de ne jamais révéler la puissance de ses moteurs, Rolls-Royce avance fièrement 563 chevaux qui se font réellement sentir lors des accélérations enfilées aussi rapidement que si vous étiez au volant d’une Porsche Boxster, soit autour de 5 secondes. Les reprises sont encore plus phénoménales comme le démontrent les 3,3 secondes nécessaires pour passer de 80 à 115 km/h.
Mon calepin de notes déborde d’informations concernant la Ghost, mais, faute de place, je m’en tiendrai aux équipements qui distancent une Rolls des automobiles de masse. On peut retenir en premier lieu la présence d’un parapluie glissé dans l’épaisseur des portes avant. Précisons que celles-ci s’ouvrent dans le sens contraire de la pratique courante, une particularité qui leur vaut le nom de « portes-suicide ». Cette appellation provient du danger qui existait autrefois avec ce genre de porte qui, mal fermée, pouvait s’ouvrir par la force du vent, projetant à l’extérieur un passager qui y serait appuyé.
S’installer sur la banquette arrière de la Ghost équivaut à s’asseoir dans un salon particulier, sinon une salle de concert. Les sièges infiniment réglables, les tapis si riches que l’on se croit obligé d’enlever ses souliers, les tablettes de travail, les écrans vidéo, tout est là pour que les occupants aient l’impression de faire partie de l’élite de la société.
Si l’on veut couper les cheveux en quatre, on peut reprocher à la Ghost la trop grande proximité des leviers pour le lave-glace, les essuie-glaces et le fonctionnement de la transmission automatique. L’instrumentation est réduite à sa plus simple expression, sauf que le conducteur bénéficie d’un cadran (Power Reserve) affichant le pourcentage de la puissance restante à l’accélérateur au moyen d’une aiguille graduée qui se déplace de droite à gauche.
Sur la route, on finit par s’habituer aux dimensions colossales de cette berline d’exception. On ne peut toutefois pas parler d’agrément de conduite tellement l’on doit constamment surveiller les manœuvres des autres conducteurs distraits par la présence de cette chose monumentale dans leur champ de vision. Le comportement routier mérite la note de passage, mais pas beaucoup plus. On ressent une sorte de flottement à haute vitesse même si le bruit du vent n’est audible qu’à plus de 160 km/h. La direction aurait aussi intérêt à être plus communicative et dans un sens, un peu moins légère. Là où la Ghost se surpasse et mérite 5 étoiles, c’est au chapitre du freinage qui n’est rien de moins qu’étonnant.
Au moment d’évaluer cette Rolls-Royce en chiffres, selon la méthode de nos essais, je ne peux m’empêcher de revoir ma notation de sa rivale, la Bentley Mulsanne. Car, la grande question ici, est de savoir laquelle des deux est la meilleure, étant donné que depuis la disparition de la Maybach (un des rares échecs de Mercedes), ces deux anglaises sont sans rivales. Nos deux concurrentes se retrouvent à un seul point l’une de l’autre, ce qui est insuffisant pour faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre. Conclusion : il ne vous reste plus qu’à déterminer quelle est la plus belle des deux, ce qui risque d’être un sérieux casse-tête tellement ces voitures sont dépourvues de charme...