Un pays européen s’apprête à rendre gratuit le transport en commun
Les lettres STM font souvent résonner chez les Montréalais des sentiments de colère ou de désespoir. Bus en retard, lignes de métro fermées, routes barrées, la Société des Transports de Montréal doit offrir un excellent service à ses usagers tout en gérant les obstacles liés au transport urbain. Et s’il y avait moins de voitures sur les routes, son travail serait-il plus facile? En Estonie, on a fait le pari en 2013 que la gratuité des transports en commun partout au pays allait inciter les usagers de la route à emprunter les moyens alternatifs pour se déplacer. Et quel est le résultat?
En 2013, la capitale de l’Estonie, Tallinn, a permis à ses habitants de se déplacer gratuitement à l’intérieur de la ville sans débourser un seul dollar. L’objectif? Permettre aux classes ouvrières de se déplacer à moindre coût, offrir des moyens de transport pour les contribuables sans emploi et désengorger les voies publiques. Un projet ambitieux, n’est-ce pas? Eh bien, cinq ans plus tard, le pays s’inspire largement de ce projet local pour offrir à tous ses habitants le transport en autobus gratuit à l’intérieur de ses frontières.
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Ce qui est embêtant dans cette initiative, c’est le caractère politique de celui-ci. Lorsqu’un Montréalais voit un tel projet, il est probablement soulagé et emballé par cette mesure. La réalité est cependant tout autre. Les résultats d’une étude menée à Tallinn trois ans après l’implantation du projet montrent une croissance de 8% dans l’utilisation des moyens de transport par les habitants de la ville, mais également une augmentation de 31% de la longueur des trajets parcourus par les résidents. Pour le moment, cette initiative n’a donc servi qu’à obtenir des votes dans la ville de Tallinn.
Plusieurs grandes villes ont tenté le coup en rendant les transports en commun gratuits, mais tous ont finalement réinstauré une tarification faute de rentabilité du projet. La conclusion était la suivante : plus les gens utilisent le transport en commun, plus les voies publiques seront dégagées, et plus on peut aller loin avec notre voiture pour un déplacement d’une même durée. Dr Cats, un chercheur de l’université des technologies de Delft aux Pays-Bas, a conclu que ce projet a le potentiel d’être efficace si et seulement si on augmente les coûts liés à l’utilisation d’une voiture. Autrement, l’utilisation des transports en commun par les habitants est faible, les voies publiques sont aussi engorgées et le coût d’un tel projet est gigantesque et sans retombée financière.
Et si la mairesse de Montréal, Mme Plante, décidait de doubler les prix du stationnement et d’augmenter le prix de l’essence, mais également de rendre le transport en commun gratuit, l’utiliseriez-vous davantage?