Écrans en auto : où la folie s’arrêtera-t-elle?
Le cellulaire au volant est devenu un véritable fléau.
L’attrait de ce petit écran est si fort que certains automobilistes ne se gênent pas pour détourner leur attention de la route pendant de longues secondes pour le consulter, mettant du même coup leur sécurité et celle des autres usagers de la route en danger.
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Au Québec, on n’hésite pas à condamner le geste. L'année dernière, la fourchette d’amende pour ce type d’infraction est passée de 300 $ à 600 $, une hausse radicale par rapport aux 80 $ à 100 $ imposés actuellement. On serrera la vis encore plus fort pour les récidivistes, qui pourraient voir leur permis de conduire suspendu dès une deuxième offense.
Pendant ce temps, toutefois, les voitures neuves proposent des écrans de plus en plus gros que les conducteurs peuvent consulter dans la plus complète légalité.
Prenez l'exemple de la Tesla Model 3. À bord de celle-ci, les boutons physiques ont été pratiquement exterminés au profit d’un gigantesque écran de 15 pouces trônant au centre de la console. Que ce soit pour régler la climatisation, activer les sièges chauffants ou changer le poste de la radio, tout passe par cet écran gros comme votre ordinateur portable.
Même histoire chez Land Rover, qui repousse aussi les limites du gros bon sens avec son petit dernier, le Range Rover Velar. Un peu moins intense que Tesla, mais la surabondance de commandes tactiles ne peut faire autrement que détourner votre attention de ce qui compte vraiment: la route.
Avec des systèmes d’infodivertissement du genre, pas besoin de vous dire que la distraction est facile à provoquer. Certes, certaines fonctions sont désactivées lorsque le véhicule est en mouvement. Ça aide peut-être à contrôler le problème, mais certainement pas à l’enrayer.
Dans une étude de l’université de l’Utah commandée par l’Association américaine des automobilistes (AAA), des experts ont analysé 30 systèmes d’infodivertissement offerts sur des véhicules vendus en Amérique du Nord. Selon l’étude, aucun de ces systèmes n’a été considéré sécuritaire. Pire encore, 23 d’entre eux requièrent un niveau d’attention «élevé» ou «très élevé».
Les constructeurs automobiles jurent faire tout en leur pouvoir pour rendre le menu de ces écrans le plus convivial possible, question de permettre aux automobilistes de garder leur attention là où ça compte.
Le hic, c’est que même pour quelques secondes, quitter la route des yeux peut être fatal. La Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) l’image clairement en expliquant que détourner notre attention de la route pour seulement 4 à 6 secondes à 90 km/h, c’est l’équivalent de traverser un terrain de football les yeux fermés.
La SAAQ stipule aussi que «l'utilisation d'un appareil muni d'un écran peut vous déconcentrer, même s'il s'agit d'un type d'écran autorisé, comme celui d'un GPS.»
Alors pourquoi bannir l’utilisation d’un cellulaire et permettre celle de ces écrans de plus en plus intrusifs? Certes, c’est le fait de tenir son téléphone en main qui est illégal, mais c’est plutôt la distraction qu’il faudrait enrayer au plus vite.
Ne serait-il pas le temps de légiférer pour réduire l’importance de ces écrans dans la conception des voitures modernes? Au lieu de ça, les constructeurs compensent ces distractions avec un paquet de technologies d’aide à la conduite visant à éviter les accidents avant même qu’ils ne surviennent. Rien contre ces technologies, bien au contraire, mais la voie vers un bilan routier parfait ne passerait-elle pas aussi par des habitacles qui incitent les conducteurs à éviter les distractions?
Au final, il revient aux automobilistes de faire preuve de jugement et d’utiliser ces écrans à bon escient. Mais les gouvernements et l’industrie automobile ont aussi leur rôle à jouer là-dedans.