L’histoire de la Porsche 917 : véritable légende sur quatre roues

Publié le 29 novembre 2019 dans Voitures anciennes par Julien Amado

La Porsche 917 est sans aucun doute une des voitures de course les plus mythiques de Porsche toutes époques confondues. Née au moment où le Championnat du monde d’endurance ne connaissait pratiquement aucune limite, elle incarne la conquête de la performance ultime. Voici l’histoire de sa construction.

Tout commence avec la modification d’un règlement qui pouvait sembler anodin au premier abord. En 1968, la Commission sportive internationale (CSI) revoit les procédures d’homologation pour s’engager en catégorie « Prototypes ». Auparavant, il fallait fabriquer 50 véhicules pour pouvoir courir dans cette catégorie. Désormais, il suffira d’en produire 25 pour mettre une auto sur la piste légalement.

Porsche comprend rapidement que c’est une occasion en or de concevoir une voiture nettement plus performante pour gagner les 24 Heures du Mans. À L’époque, le responsable de la compétition s’appelle Ferdinand Piëch. Son nom vous dit quelque chose? C’est normal, il s’agit de l’homme qui deviendra le PDG de Volkswagen dans les années 1990.

Fermement convaincu par ce projet, Piëch fait tout ce qu’il peut pour le faire aboutir. La validation est finalement acquise en juin 1968. Comme Ford pour le programme GT40, Porsche dépense des sommes astronomiques (15 millions de deutsche marks, soit 27 millions de dollars canadiens d’aujourd’hui) en vue d’un engagement pour la saison 1969.

Photo: Porsche AG

Un V12 de feu!

Le moteur de la 917 est sans aucun doute la pièce centrale de l’auto. Appelé « Type 912 », il est conçu par l’équipe du célèbre ingénieur Hans Mezger (à qui l’on doit aussi le moteur de la 911 ainsi que le bloc TAG-Porsche de formule 1).

Généralement désigné comme un 12 cylindres à plat, il s’agit en réalité d’un V12 à l’angle très ouvert. En effet, son concepteur, Hans Mezger, préfère le terme de V12 à 180° étant donné que les bielles (disposées par paires) partagent un même maneton. Une solution technique retenue pour réduire le nombre de pièces en mouvement et les frictions à l’intérieur du moteur.

Le moteur possède le même alésage et la même course que le 8 cylindres de la Porsche 908 qui court déjà au Mans à cette époque. Mais le moteur Type 912 n’est pas un moteur de « 908 et demi » (huit cylindres plus quatre pour arriver à douze) comme on l’entend souvent. La base est semblable, cependant il y a eu tant de modifications réalisées que Mezger trouve ce qualificatif inapproprié.

Photo: Porsche AG

Au niveau du haut moteur, les quatre arbres à cames (2 par banc de cylindres) ouvrent et ferment deux soupapes par cylindre. Ils ne sont pas entraînés par une courroie ou une chaîne mais par une cascade de pignons. L’alimentation en essence est confiée à Bosch qui a mis au point un système d’injection mécanique associé à un allumage électronique.

Le moteur est refroidi par air. Porsche n’a pas développé de refroidissement liquide car le temps manquait et il souhaitait participer au Championnat du monde d’endurance dès la saison 1969. Pour évacuer les calories générées par le 12 cylindres, une turbine en plastique se charge de souffler de l’air frais sur le moteur, comme dans une Porsche 911.

Un choix technique qui aurait fait dire à Enzo Ferrari « qu’il n’y a rien à craindre d’un moteur refroidi par air ». L’histoire allait bientôt lui donner tort…

Passé au banc de puissance pour la première fois en décembre 1968, le bloc de 4,5 litres de cylindrée libère 520 chevaux dès son premier passage!

Après quelques améliorations suite à des fissures repérées au niveau du carter, l’équipe de Hans Mezger arrive rapidement à 542 puis à 580 chevaux grâce à des échappements optimisés.

Photo: Porsche AG

La sécurité, quelle sécurité?

Vu la taille du moteur, le pilote se retrouve littéralement coincé à l’avant de la voiture. Une fois assis dans la 917, ses pieds dépassent largement la colonne de direction! Mais à une époque où la sécurité des pilotes n’était pas vraiment prise au sérieux, cela ne posait pas de problème particulier.

Le châssis est un modèle tubulaire en aluminium. Inspiré de ceux des 907 et 908 qui courent déjà aux 24 Heures du Mans, sa rigidité a été augmentée pour encaisser le surplus de puissance.

Et pour savoir si le châssis connaît une éventuelle faiblesse, Porsche a développé une technique astucieuse : des tubes mis sous pression. Grâce à une jauge indicatrice, il est possible de détecter une fuite et donc des fissures sur le châssis. Le poids a été optimisé au maximum, à tel point que le châssis ne pèse que 50 kg!

Photo: Porsche AG

Une fois équipée de sa carrosserie en polyester (renforcé avec de la fibre de verre) et de tout l’équipement nécessaire à la course, la 917 pèse 800 kg au total (830 kg pour la version à carrosserie longue).

Pour améliorer la vitesse de pointe sur les circuits rapides, la 917 est prévue avec une carrosserie longue. Au niveau aérodynamique, la voiture hérite d’appendices mobiles pour optimiser les performances.

Grâce à un système de tiges métalliques reliées aux suspensions, des volets situés à l’arrière pouvaient se redresser au freinage pour augmenter la force de ralentissement de la 917. Un système qui fera l’objet d’une controverse lorsque la Fédération décidera de les interdire, en laissant toutefois une dérogation à Porsche!

Photo: Porsche AG

La Commission sportive méfiante

La Porsche 917 est présentée aux responsables de la Commission sportive internationale le 21 avril 1969. Sa conception a été réalisée en un temps record. En effet, Porsche a mis moins de 10 mois pour concevoir et construire les autos.

C’est peut-être aussi ce qui a poussé les inspecteurs de la Commission à faire démarrer toutes les voitures disposées dans la cour de l’usine.

Le moteur des 25 bagnoles sera allumé et le fonctionnement de la boîte de vitesses vérifié. Histoire de s’assurer que Porsche n’a pas été tenté de produire une « vraie » 917 et 24 « fausses » voitures qui ne seraient pas capables de courir.

Prête à prendre la piste, la 917 va donner du fil à retordre aux pilotes et aux ingénieurs. Instable, indomptable et mauvaise freineuse lors des premiers essais, elle ne fait pas vraiment des débuts fracassants. Mais elle va très rapidement progresser et atteindre les objectifs fixés par Porsche : la victoire aux 24 Heures du Mans, toutes catégories confondues, en 1970.

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