Un meilleur taux...seulement si?
Sur le point de vous acheter une nouvelle voiture? Besoin d’un financement? Alors, soyez averti. Car il se pourrait que le concessionnaire essaie de vous en passer une vite. Et pas seulement chez ces marchands de véhicules d’occasion un peu douteux!
La pratique que je m’apprête à dénoncer est courante chez plusieurs concessionnaires et marchands de véhicules neufs et d’occasion bien établis.
- À lire aussi: Des aubaines... où ça?
- À lire aussi: Ouvrir son portefeuille aux années 80 et 90
Avant tout, j’insiste ici sur le fait que ce ne sont pas tous les marchands de véhicules qui ont recours à cette pratique. Il est clair que si certains propriétaires de concessionnaire s’y opposent, et d’autres ferment sans doute volontairement les yeux sur les pratiques malhonnêtes effectuées par certains de leurs directeurs financiers.
Alors, de quoi s’agit-il? Tout simplement, d’une diminution du taux de financement relatif à un prêt de véhicule automobile… si le consommateur accepte de se procurer une assurance qui viendrait le « protéger » pour la totalité du terme. Qu’il s’agisse d’une assurance vie, invalidité, d’une assurance de remplacement ou encore d’une garantie prolongée.
Voici un exemple concret qui m’a récemment été exposé. Celui de Nancy, qui a choisi de se procurer une voiture malgré sa cote de crédit entachée. Elle a jeté son dévolu sur une petite Honda Civic, avec un équipement minimaliste. Coût initial de la voiture? Autour de 22 000 $. Maintenant, parce que Nancy a déjà une faillite à son actif, il lui faudra avoir recours à la deuxième chance au crédit. On lui dresse donc chez le concessionnaire le portrait d’un financement à un taux de 14,99%, sur un terme de 84 mois. La voiture qui coûtait un peu plus de 25 000 $, en incluant les taxes, exigerait en fin de compte une somme totale qui dépasse légèrement les 40 000 $.
Or, le directeur financier lui propose à ce moment une solution qui « lui plaira ». Un taux abaissé à 9,99%, mais à condition que le prêt soit protégé au même titre que la voiture, pour la durée complète du terme de financement. Cela signifie donc une assurance de remplacement, une assurance vie et invalidité ainsi qu’une garantie prolongée qui viendront, selon les dires du directeur financier, rassurer la banque, afin que cette dernière offre un taux à la baisse.
« On ne fait pas ça avec tous nos clients, mais comme vous semblez être quelqu’un de bien qui reprend sa vie en main, je vais faire un effort pour que tout ça fonctionne ». Tels ont été les termes du directeur financier, qui a rappelé la cliente le lendemain pour lui annoncer la bonne nouvelle. Maintenant, quelle était donc cette bonne nouvelle? Une approbation de crédit pour un financement sur 84 mois à 9,99% de taux d’intérêt, ce qui allait cependant impliquer des mensualités de 601,21 $. Coût total de cette Civic LX : 50 502 $. Ou si vous préférez, 10 000 $ de plus que si la cliente avait simplement choisi un taux de financement à 14,99%.
Dans la liste des additions se trouvent une assurance vie à 1 950 $, une assurance invalidité à 2 820 $, une garantie prolongée à 2 250 $, ainsi qu’une garantie de remplacement à 1 635 $. Puis, comme si ce n’était pas assez, la cliente a aussi ajouté un traitement antirouille à 899 $.
Le mensonge
Vous trouvez sans doute que le directeur financier de ce concessionnaire Honda a pesé très fort sur le crayon. Qu’il a littéralement abusé d’une cliente naïve pour son profit personnel , sans penser deux secondes aux besoins réels de cette dernière. Je suis aussi de cet avis.
Maintenant, il n’y a rien d’illégal dans cette pratique, même si ce n’est aucunement moral. Toutefois, l’autorité des marchés financiers est catégorique. Il est illégal et mensonger d’affirmer qu’une institution financière exige l’achat de produit dans l’optique d’une réduction de taux. Jamais une entreprise de financement n’exigerait de telles conditions, ce qui ramène dans la cour du concessionnaire la discrétion ou non d’offrir un taux à la baisse.
Comprenez ainsi que dans le cas ci-haut énoncé, le directeur financier a volontairement choisi de hausser le taux de financement à 14,99%, pour ensuite faire pression sur la cliente en lui faisant miroiter tous les bienfaits des produits nécessaires à l’abaissement d’un taux qui, finalement, allait revenir à un niveau raisonnable. Autrement dit, le concessionnaire aurait très bien pu lui offrir à la base un taux à 9,99%, sans devoir se lancer dans un long épisode mensonger. Certes, le profit généré par un financement à 9,99% aurait été moindre, mais cela n’allait pas ensuite l’empêcher d’offrir à la cliente une partie de ces produits d’assurance, qu’elle aurait pu choisir en toute liberté.
Bien que la cliente soit en période de « reconstruction » de son crédit, il est effectivement prudent pour elle de se protéger. Qu’elle le fasse par le biais de son assureur personnel ou de son concessionnaire, le choix lui revient. Maintenant, qu’on l’ait obligée à prendre l’ensemble des produits en lui faisant croire que la banque l’exigeait afin qu’on puisse abaisser le taux de financement, c’est inacceptable. Et c’est sur ce point que j’insiste. Parce que plusieurs concessionnaires tenteront de vous faire croire qu’ils peuvent abaisser le taux à l’achat d’un ou de plusieurs produits, poussant parfois la chose jusqu’à impliquer la décision de l’institution financière. Et attention, on ne le fait pas qu’en deuxième chance au crédit. Un ami personnel a fait face au même stratagème lors de l’achat d’une voiture d’occasion, qu’on lui finançait à 4,99%, ou 2,99% à l’achat d’une garantie prolongée.
Comprenez ainsi que le concessionnaire obtient une commission sur la vente d’un financement. Plus le taux est élevé, plus c’est payant. C’est donc le concessionnaire qui, sachant qu’il lui est possible de proposer un taux plus bas, entame la transaction à un taux non escompté, pour ensuite proposer des produits encore plus payants. En vendant ces derniers, il accepte alors de baisser sa commission sur le financement. Un bien maigre sacrifice par rapport aux gains qu’il fera en vendant des produits d’assurance et des garanties.
Retenez donc ceci. Jamais une banque n’abaissera un taux de financement en raison de l’achat de produits. La décision revient toujours au marchand, qui a des ententes avec les institutions financières, qui connaît leurs produits et qui sait très bien comment jongler avec eux. Car oui, le financement est aussi un produit. Un produit lucratif, comme tout le reste.