Ford Taurus 2010: enfin!

Enfin! La Taurus est ce qu’elle mérite d’être. Et pas qu’à moitié. Certes, Ford en aura mis, du temps, à trouver le bon filon pour sa Taurus. Voiture la plus vendue aux États-Unis (quand même!) dans les années ’90, la berline qui célébrera ses 25 ans l’an prochain a pris de l’âge au fil du temps et a dû céder son titre à la… Toyota Camry. En êtes-vous surpris?

Soucieux de redonner un second souffle à sa Taurus, Ford l’a métamorphosée en 2005 en une Five-Hundred qui est passée complètement à côté de la « track ». Sous-motorisée, bien mauvaise transmission CVT, traction intégrale inefficace, laide à faire peur… À l’époque, l’auteur de ces lignes avait d’ailleurs titré : « ‘F’ comme dans… faillite ». Ce qui lui avait notamment valu, par un beau samedi matin, un coup de téléphone d’Alain Batty, alors président de Ford Canada… Heureusement pour tout le monde, La Five-Hundred n’a pas fait long feu. Vrai qu’on a rigolé lorsque Ford a décidé d’en revenir à la désignation Taurus il y a deux ans : « Ils ne savent plus quoi inventer! » se moquait-on. Mais aujourd’hui, c’est Ford qui rigole : sa nouvelle Taurus 2010 dépasse les attentes, américaines ou pas et ce, avec grand style.

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Ça déménage

D’abord, les lignes extérieures musclées en imposent sur la route. Il faut savoir que la berline n’a plus rien d’une intermédiaire : elle se classe désormais parmi les grandes, aux côtés des Toyota Avalon, Chrysler 300, Nissan Maxima et Buick Lacrosse/Allure. Même qu’avec ses 5,2 mètres, la Taurus est plus longue que la concurrence, ce qui se traduit par un vaste dégagement aux têtes et aux jambes, tant à l’avant qu’à l’arrière. Plus de dégagement que ça, et ça tiendrait de la limousine – enfin, presque. Le coffre? Avec sa bouche géante qui s’ouvre sur 569 litres, il accepte un tiers plus de chargement que la moyenne de la catégorie, ce qui n’est pas peu dire.

Malgré ces larges dimensions et un poids qui, on s’en doute, n’est pas plume (à presque 2000 kilos), la Taurus en déménage, de l’air. Son moteur V6 de 3,5 litres, que l’on encense chez les cousins utilitaires Edge et Flex, est rarement essoufflé. Pour tout dire, il semble plus puissant que les 263 chevaux annoncés. Le 0-100km/h s’effectue au son d’une belle sonorité en moins de huit secondes et ce, dans une accélération linéaire qui est habilement secondée par une boîte automatique six rapports.

Automatiquement vôtre

Cette boîte automatique n’offre pas, dans la version de base (SE, à partir de 29 999$), le passage manuel. En temps normal, on pourrait chialer un peu sur cette absence mais pour une fois, retenons-nous. Car ici, la boîte est étagée de façon à ce qu’on ne ressente pas le besoin de se mêler de sa course. Le passage des rapports est imperceptible et les reprises sont dynamiques au bout du pied droit. D’ailleurs, sur les versions plus étoffées où ce mode manuel est permis, on ne l’utilise même pas. C’est qu’il faut passer de la position « D » à la position « M » pour que les palettes au volant entrent en fonction et il ne suffit pas de pousser ou de tirer le levier, il faut carrément l’engager. Psychologiquement, le geste n’est pas instinctif et immanquablement, lorsqu’on revient à « D », on passe tout droit et on tombe… au neutre. Pas bon, pas bon.

Pas « pépère »

Sur la route, la suspension a beau être tout confort, elle se replace vite et fermement sur les cahots. Étonnement, pas de roulis en virages serrés. À grande vitesse sur des chemins tortueux, on a l’impression de ne filer qu’à 50km/h, tellement l’ensemble est rigide et assuré. On est loin de la conduite « pépère »… La direction est lourde mais précise – une chance, parce qu’avec presque deux mètres de large à piloter, on a vraiment besoin de savoir où l’on s’en va… Le freinage, qui pourrait décevoir en raison du poids du véhicule, est non seulement convaincant, il est également progressif et bien dosé. On arrête pile poil là où l’on veut, même après une envolée bien au-delà des limites de vitesse. Dans les stationnements, la petite lunette arrière qui handicape le champ visuel et la longueur hors tout du véhicule imposent, évidement, des manœuvres prudentes. Ne dénigrez pas le radar de recul, qu’il soit sonore ou en images : il est essentiel.

Habitacle irréprochable

On le dit depuis plusieurs années, Ford sait vraiment y faire, côté intérieurs automobiles. Ici encore, les matériaux sont d’excellente facture et la finition est de qualité – mieux, en fait, que l’assemblage extérieur, qui laisse paraître quelques tôles mal accolées. Le tableau de bord est ergonomique, l’instrumentation est moderne et l’ensemble livre non seulement une belle impression de luxe, il reste sympathique et facile à apprivoiser. L’insonorisation est exceptionnelle et le mot n’est pas trop fort : une fois les vitres et portières refermées, on est complètement coupé des bruits extérieurs. Ford dit avoir pas mal bossé sur sa Taurus en soufflerie et ça s’entend dans le grand silence qui règne à bord.
Par ailleurs, les sièges sont moelleux et très confortables. La version essayée les offrait tout de cuir vêtus, chauffants et proposant, de surcroît, une fonction massage fort bienvenue. Le paradis au volant, quoi…

La vraie « patente »

La traction intégrale peut monter à bord de la Taurus mais pour ce, il faut choisir au minimum la variante SEL. Et c’est une bien bonne chose parce que c’est là que se trouve la vraie « patente ». À partir de 32 299$, la grande berline SEL s’amène alors avec la climatisation automatique, les sièges chauffants et la radio satellite, sans compter le démarrage sans clé et l’optionnel Sync (on l’aime, ce dispositif de communication). D’autres gadgets technologiques à la mode qui ne sont pourtant pas l’apanage des grandes berlines non luxueuses peuvent être choisis avec les variantes Limited et SHO (cette dernière hérite du V6 bi-turbo à injection directe pour 365 chevaux et de roues de 20 pouces). On pense ici au régulateur de vitesse adaptatif (un dispositif très réussi chez Ford) et à l’avertisseur d’angles morts.

Se tirer dans le pied ?

Ceci dit, peut-être que Ford se tire dans le pied. En effet, c’est à se demander pourquoi les acheteurs iraient reluquer du côté de la Lincoln MKS quand la nouvelle Taurus 2010, avec son agréable personnalité « américainement contemporaine » fort différente de tout ce qui se fait sur le marché, en offre tout autant.

Sadiques, les gens chez Ford? Et comment!

Fouettée d’une cravache d’acier, heurtée à répétition par des paniers d’épicerie, tirée à bout portant... Martyrisée, la nouvelle Ford Taurus? Et comment! En effet, les ingénieurs de Ford ont voulu faire de la Taurus 2010 la berline la plus résistante qui soit et ils lui ont donc fait vivre… la torture. Ils l’ont entre autres bombardée de gravier, une épreuve destinée à sélectionner la peinture de carrosserie la plus tenace. Ils l’ont ensuite aspergée d’eau salée, avant de la conduire hors des sentiers battus, pour finalement la laisser cuire à haute chaleur et dans l’humidité. Cette série d’opérations, qui avait pour but de tester la résistance à la corrosion, a été répétée 24 heures sur 24, jusqu’à ce que soient simulés dix ans de bien mauvaises conditions météorologiques. Des robots ont également ouvert et refermé portières, capot et coffre plus de 84 000 fois, tant par des températures nordiques que par des chaleurs dignes du Sahara. Et ce n’était qu’une partie des supplices infligés…

Ford soutient qu’il s’agit là de tests beaucoup plus intensifs que ceux normalement imposés à une voiture en phase de développement. Il faudra mettre une note à l’agenda de 2025 afin de vérifier si les efforts ont porté fruit…