Loi anti-citrons : plus que jamais le temps d’agir, dit l’APA
Contrairement aux États-Unis, ni le Canada ni ses différentes provinces n’ont adopté jusqu’à maintenant une loi qui protège les consommateurs contre les véhicules gravement défectueux ou irréparables, aussi appelés citrons, pendant les premières années de possession.
Alors qu’une nouvelle élection approche au Québec et que les principaux partis y vont de nombreuses promesses, l’Association pour la protection des automobilistes (APA) insiste une fois de plus sur la pertinence d’une telle mesure.
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« Les constructeurs automobiles ne sont tout simplement pas prêts à reprendre les véhicules gravement défectueux ou irréparables, même si les garanties provinciales sur les produits reconnaissent le droit de le demander », dénonce George Iny, directeur de l’APA.
Celui-ci constate que les changements rapides de la technologie ont contribué à mettre hors service de tout nouveaux véhicules de plusieurs marques pendant de longues périodes, tandis que les concessionnaires attendent les pièces et le soutien technique du constructeur pour résoudre les problèmes. « À un moment donné, le client mérite le droit de remettre le véhicule sans attendre de subir un procès lorsqu’un véhicule est gravement défectueux », affirme George Iny.
Une pétition a été lancée plus tôt cette année par un consommateur québécois, Guillaume Eckerl, dans le but de forcer le prochain gouvernement à légiférer dans ce sens. Au moment d’écrire ces lignes, plus de 500 personnes l’avaient signée.
Un nouveau cas probant
Cette nouvelle pression de l’APA fait suite à la décision rendue par la Cour du Québec dans l’affaire Caroline Simard c. Subaru Outaouais et Subaru Canada le 15 juillet dernier. La cliente, qui avait fait l’achat d’une Subaru Outback neuve en 2015, s’est tapée 26 visites au garage en quatre ans parce que son véhicule consommait de l’huile à outrance. Aucun remède n’a fonctionné et le moteur est toujours défectueux.
À plus d’une reprise, elle et son mari ont demandé au concessionnaire de reprendre le véhicule qu’ils considéraient être un citron, mais en vain. On leur a offert 14 000 $, une somme dérisoire pour un véhicule payé 33 000 $, et laissé entendre que leur Outback serait revendue sans réparations.
À l’été 2019, Caroline Simard s’est tournée vers les tribunaux pour demander l’annulation du contrat d’achat, sous motif de déficit d’usage et de vices cachés, ainsi que 25 000 $ en dommages-intérêts.
Lors du procès, Subaru Canada et le concessionnaire ont prétendu que le moteur fonctionnait très bien en novembre 2019 et que ce n’était pas un gros problème d’ajouter de l’huile « de temps en temps ». Leur dernière offre se limitait à un rabais de 20% sur le prix d’achat initial et 6 000 $ supplémentaires pour les inconvénients.
Finalement, le juge Luc Huppé de la Cour du Québec a annulé la vente – chose très inhabituelle après près de cinq ans et 100 000 kilomètres d’utilisation – et accordé à Caroline Simard 20 000 $ pour troubles et inconvénients, encore là un montant peu commun dans ce genre de dossier.
À qui la faute?
En matière de citrons, les problèmes peuvent être connus ou non par le fabricant. Dans le cas présent, la consommation d’huile abusive des moteurs de Subaru, causée par la conception des segments de piston qui assurent l’étanchéité de l’huile du moteur, est bien documentée, surtout dans les modèles 2011 à 2015. Subaru a bonifié sa garantie à 8 ans ou 160 000 km, mais l’APA continue de recevoir des signalements sur des modèles 2016 et 2017, la plupart impliquant des véhicules à boîte manuelle.
« Les concessionnaires ont parfois une marge de manœuvre limitée dans des situations comme celle-ci : ils sont tenus d’utiliser les pièces d’origine et d’appliquer les politiques dictées par leur constructeur pour les réparations sous garantie. Et lorsqu’un concessionnaire est coincé, la solution la plus simple est parfois de blâmer le client plutôt que de subir une perte sur la vente », remarque l’APA.