Pneus d’hiver : la foutaise du pictogramme
Plus de trois millions de pneus d’hiver sont vendus chaque année au Québec. Et pour cause, une réglementation de la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) qui stipule que tous les véhicules de promenade doivent être chaussés de pneus d’hiver, cette fois à compter du 1er décembre.
Mais, qu’est-ce qu’un pneu d’hiver? Selon le Code de la sécurité routière, un pneu d’hiver s’identifie par un pictogramme logé sur le flanc du pneu, « certifiant » qu’il s’agit d’un pneu sécuritaire pour l’hiver. Hélas, on comprend aujourd’hui que ce pictogramme ne vous indique pas que vous êtes armé pour braver les hivers québécois.
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Ayant travaillé de pair avec l’équipe de J.E. qui nous a livré cette semaine un intéressant reportage sur le sujet, nous avons d’abord découvert cette nouvelle mode du pneu baptisé « tout climat ». Un quatre saisons, à peine plus performant sur une surface enneigée, sur lequel on appose le fameux pictogramme.
Or, il est clair que ces pneus, qu’ils soient de marques chinoises bon marché ou de grandes marques nationales, ne sont pas adaptés à nos hivers. De véritables savonnettes qui, à de très froides températures, deviennent aussi rigides que les routes sur lesquelles ils entrent en contact.
Pourtant, certains commerçants vous mentionneront que ces pneus ont l’avantage d’être efficaces l’hiver, vous évitant du coup le manège des changements de pneus tous les six mois. Pire encore, Transports Canada considère que ces pneumatiques sont adéquats pour notre climat, alors que tous les experts en la matière évoquent leur dangerosité. Cette affirmation tirée d’un porte-parole de l’organisme gouvernemental qui, visiblement, en connaît autant sur sujet que j’en connais sur le ballet classique, nous prouve également l’insouciance de Transports Canada pour la sécurité des automobilistes.
En toute logique, il faudrait donc différencier avec une certification distincte un pneu dit « tout climat » d’un authentique pneu d’hiver, qui devrait pouvoir être efficace sur la glace, la neige et surtout, lors de froids extrêmes, là où le pneu « tout climat » échoue lamentablement.
Le pictogramme se retrouve donc sur une quantité considérable de pneus qui ne sont pas adaptés à notre climat. Maintenant, parce que ce symbole vous évite une amende de 200 $ plus les frais si un policier effectue une vérification, et qu’ils ont l’avantage de pouvoir demeurer sur le véhicule toute l’année durant, plusieurs consommateurs insouciants ou mal renseignés optent aujourd’hui pour cette avenue. Une situation alarmante, qui peut évidemment faire la différence entre un impact, une perte de contrôle, ou leur évitement.
On constate que plusieurs importateurs, surtout dans le domaine du camion léger, réussissent avec grande facilité à faire apposer des pictogrammes sur des pneus, provenant généralement de Chine, lesquels n’ont aucune efficacité à basse température.
En effectuant des recherches, j’ai même pu mettre la main sur deux pneus parfaitement identiques destinés à des camions légers, conçus à la base comme pneus tout-terrain. Un avec, l’autre sans pictogramme. Eh oui! Ces deux pneus de marque différente, mais en tous points identiques, sont distribués par différents commerçants, chez nous, au Québec. Le premier vous sera vendu comme pneu d’hiver à prix un peu plus élevé, alors que l’autre, comme simple pneu hors route.
Le comble, c’est que certains marchands de véhicules neufs ou d’occasion proposent à l’achat d’un camion (gratuitement ou à faible coût), ce jeu de « pneus d’hiver », probablement même moins efficace que la monte d’origine. Imaginez alors un Ford F-150, sur lequel vous accrochez une remorque de 8 000 lb, avec un chargement de 1 000 lb dans la caisse, et qui part en dérapage avec des pneus dont le mordant est équivalent à celui d’une rondelle de hockey. Dangereux vous dites?
D’un ridicule…
Transports Canada, qui n’a visiblement pas le désir ou même les compétences pour sévir dans ce dossier, pousse le ridicule jusqu’à laisser au soin des fabricants et aux importateurs de pneus la responsabilité de respecter une norme, éminemment obsolète. À la demande de Transports Canada, le fabricant devrait ainsi pouvoir fournir la preuve que le pneu est conforme. Or, jusqu’ici, un seul pneu parmi les innombrables faux pneus d’hiver offerts sur le marché, a échoué, signe que les vérifications ne sont presque jamais faites.
Vous en conviendrez, l’amende de 200 $ que vous pourriez recevoir si vos pneus ne sont pas décorés de ce pictogramme magique est également ridicule, sachant que de nombreux pneumatiques techniquement certifiés sont aussi ou presque aussi inefficaces que des pneus quatre saisons ordinaires.
Morale de l’histoire, ne vous fiez pas à une norme bidon lorsque viendra le temps de faire l’achat de pneus d’hiver. Fiez-vous plutôt à des spécialistes du domaine qui, idéalement, vendent plus que quelques marques. Ces derniers pourront vous conseiller le meilleur pneu adapté à vos besoins et votre budget. Faites aussi vos recherches sur le web, où vous trouverez d’innombrables tests et analyses.
J’ajouterais que de choisir le pneumatique le moins cher n’est pas à conseiller. Parce qu’un pneu de qualité vous offre non seulement plus de sécurité sur la route, mais contribue aussi à améliorer le comportement et l’agrément de conduite.
N’oubliez pas que le pneu demeure le seul lien direct entre la route et le conducteur. Croyez-moi, vaut mieux choisir de très bons pneus sur une voiture à roues motrices avant que de débourser 2 000 $ pour l’option du rouage intégral, en chaussant son véhicule de pneus « économiques ». Tous les experts vous le diront.
Sur ce, n’oubliez pas qu’il ne vous reste maintenant que trois semaines avant la date limite de cette réglementation… que vous savez maintenant discutable.