Ford Bronco : GM doit s'en mordre les doigts

Publié le 16 juillet 2020 dans Blogue par Antoine Joubert

En juin 2018, General Motors nous avait conviés à un dévoilement d’importance, du côté d’Atlanta en Géorgie. On nous promettait alors une belle surprise, mais, disait-on aussi, une révolution dans le monde des VUS intermédiaires.

Quelques jours avant d’effectuer le voyage, l’information coulait. Nous apprenions le grand retour du Blazer, ce 4x4 tant aimé des amateurs qui avait timidement terminé sa carrière en 2005.

Évidemment, mes collègues et moi imaginions le retour d’un authentique tout-terrain venant rivaliser avec le très populaire Jeep Wrangler, un peu comme l’avait fait le Blazer des années 70 et 80 face aux Dodge Ramcharger, Ford Bronco, Jeep Cherokee et à l’International Scout. Il faut dire que Jeep, seul dans son créneau, écoulait en 2018 pas moins de 265 000 Wrangler à l’échelle nord-américaine. Un succès monstre, considérant de surcroît que ce modèle conserve sur le marché d’occasion une excellente valeur de revente, et qu’il s’agit également du véhicule le plus accessoirisé de la planète!

Après notre arrivée dans l’enceinte, le journaliste que je suis s’est immédiatement dirigé vers le véhicule, alors recouvert d’une housse. Cette dernière, sans dévoiler le produit, laissait toutefois présager une forme qui n’avait rien de ce à quoi nous nous attendions, au point où on s’interrogeait sur sa véritable identité.

Photo: Antoine Joubert

S’agissait-il d’un véhicule concept, d’un autre produit Chevrolet qu’on allait nous présenter avant le grand dévoilement? Hélas non, à la levée de la couverture, Chevrolet dévoilait…une voiture. On avait greffé le nom Blazer à un autre insipide multisegment, se voulant un compétiteur des Ford Edge, Nissan Murano et même du GMC Acadia, qui ne se vendait déjà pas très bien. Une formule trop facile, dans laquelle Chevrolet nous disait réincarner la Camaro en VUS. Ouaip!

Jusqu’à un certain point, il est facile de comprendre les besoins de Chevrolet face à un tel véhicule, visant à combler le vide entre l’Equinox et le Traverse. Mais pourquoi utiliser une nomenclature qui ne cadre pas du tout avec le produit? Et puis, à la lumière du succès mitigé de ce « Cross Blazer », s’agissait-il finalement de la bonne stratégie à adopter?

Photo: Antoine Joubert

Ford fait les choses autrement

Chose certaine, Ford a fait les choses de façon bien différente avec cette nouvelle famille de Bronco dévoilée cette semaine. Non seulement revient-on avec un produit qui s’inspire directement du premier Bronco, lancé à la fin des années 60, mais on propose pour la première fois un véritable concurrent au Jeep Wrangler. Un produit à ce point innovateur et désirable qu’il est facile de parier sur les prix qu’il remportera dans la prochaine année. Camion nord-américain de l’année décerné par le jury du NACTOY (North American Car and Truck of the Year), prix qui sera sans doute aussi repris par les magazines Motor Trend, Truck Trend, 4-Wheeler magazine, et peut-être même… par le Guide de l’auto!

Le nouveau Bronco, sur lequel Ford risque de capitaliser, créera sans doute une situation rêvée pour l’industrie. On pourra attirer de nouveaux acheteurs par pure passion, sans toutefois voler d’énormes ventes à Jeep. Parce que les puristes de Jeep n’iront pas nécessairement massivement chez Ford.

Toutefois, le Bronco ravivera le segment, un peu comme l’avaient fait les Colorado/Canyon en 2015 face à la catégorie des camionnettes intermédiaires. En effet, c’est à partir de 2015, et en grande partie grâce à GM, que le genre a regagné en popularité. Même la vieillissante camionnette Frontier avait vu ses ventes grimper cette année-là, signe que l’engouement d'un modèle peu même raviver celui de ses compétiteurs.

Une occasion ratée

En y pensant bien, il aurait donc été logique de développer le Blazer à partir des bases de cette camionnette Colorado, comme l’a fait Ford en faisant appel à la plateforme dérivée du Ranger. Le succès aurait alors pu être au rendez-vous, ce qui aurait en revanche impliqué des coûts de développement beaucoup plus élevés. Ce fut d’ailleurs certainement le cas chez Ford, qui a travaillé ces cinq dernières années au développement du Bronco, en juchant au centre de ses studios de design un modèle de 1966 en guise d’inspiration.

Puis, en faisant appel à l’architecture et aux moteurs du Ford Escape, les ingénieurs ont aussi conçu le Bronco Sport. Un véhicule radicalement différent de l’Escape et qui risque certainement de lui voler des ventes, mais qu’on aurait à mon sens pu baptiser Bronco II. Bien sûr, en référence à ce modèle des années 80, mais aussi parce que le Bronco Sport est assurément moins « Sport » que le « vrai » Bronco.

Chose certaine, les ingénieurs de Ford ont dû se taper sur les cuisses en assistant comme nous au dévoilement du Blazer, été 2018. Deux ans plus tard, et avec seulement 61 000 ventes effectuées en 2019, GM doit admettre que cette stratégie n’était pas la meilleure.

Or, il faut croire que chez ce constructeur, on n’apprend guère de ses erreurs, puisqu’on la répète cette année en apposant le nom Trailblazer sur un multisegment urbain à moteur à trois cylindres, qui vise à séduire les anciens acheteurs de Chevrolet Cruze. À croire qu’on préfère regarder passer la parade plutôt que de s’y joindre…

En vidéo: Antoine Joubert présente le Chevrolet Blazer

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