Encore 15 M$ de fonds publics pour de l'asphalte sur le circuit Gilles-Villeneuve
Par François-David Rouleau
Montréal s’apprête à dépenser encore 15 M$ de fonds publics au circuit Gilles-Villeneuve, entre autres pour repaver entièrement la piste de course même si certaines portions avaient été refaites pas plus tard que l’an dernier.
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C’est donc dire qu’après avoir butiné aux quatre coins du tracé depuis des années, les paveuses y feront leur grand retour pour réasphalter la totalité des 4,36 kilomètres après le Grand Prix du Canada qui sera disputé dans un mois.
Des travaux de drainage et d’éclairage sont aussi prévus dans le chantier qui devrait démarrer le 10 juillet, selon les documents consultés. Exécuté en deux phases, celui-ci obstruera le circuit jusqu’à la fin novembre. La circulation y sera d’ailleurs interdite, tant pour les piétons que pour les cyclistes, a prévenu la Société du parc Jean-Drapeau (SPJD).
Selon une compilation des dépenses publiques sur le circuit réalisée par notre Bureau d’enquête, la SPJD a maintenant injecté plus de 110 M$ dans ses infrastructures depuis 2017. À ce montant s’ajoute l’entente hors cours de 6 M$ conclue entre la Ville de Montréal et le Groupe Geyser. L’entrepreneur poursuivait la Ville pour les frais supplémentaires engendrés par la construction des paddocks bâtis au coût de 60 M$ en 2019.
De ce montant, plus de 25 M$ ont été investis dans l’aménagement de la piste. L’an dernier, rappelons que la ligne des puits avait été totalement restaurée après une seule course, celle de 2019. La pandémie avait forcé l’annulation des éditions 2020 et 2021.
Pour satisfaire la FIA
La SPJD affirme qu’elle exécute les travaux à la suite des recommandations que la FIA lui formule après chaque course afin de « répondre aux critères de sécurité et de confort du circuit ».
« Le dernier resurfaçage complet du circuit Gilles-Villeneuve date d’au moins 19 ans, a indiqué la conseillère du SPJD, Jessica Gaulin. Ces travaux sont exécutés pour répondre à de nouvelles exigences de la Fédération internationale de l’automobile (FIA) dans le cadre d’un rapport d’après course. »
Parmi ses recommandations après l’édition 2022 du Grand Prix du Canada, la FIA aurait demandé de corriger l’ergonomie du circuit.
Déjà ce printemps, la SPJD a investi près de 780 000 $ pour satisfaire les exigences de la FIA entre la ligne de départ et le troisième virage. Ces travaux ont nécessité de l’asphaltage dans l’accotement des courbes 2 et 3 en plus du prolongement du muret de la ligne des puits.
Encore à refaire
Même si la SPJD se défend d’avoir effectué un pavage complet il y a 19 ans, elle a quand même effectué de nombreux travaux de pavages depuis ce temps. Chaque année, les contribuables vivent le jour de la marmotte.
En 2019, les 14 virages du circuit avaient été repavés pour respecter les exigences de la FIA. Même si « un bitume de qualité supérieure » avait été utilisé, certains des virages avaient malgré tout à nouveau subi des correctifs par la suite après une seule édition du Grand Prix du Canada.
La ligne des puits, refaite aussi à neuf l’an dernier après une seule course, ne fait toutefois pas l’objet des travaux à venir cet été.
Selon le Programme décennal d’immobilisations (PDI), le Grand Prix du Canada continuera à puiser dans les poches des contribuables, car la Ville de Montréal prévoit des investissements de 226,8 M$ dans l’ensemble du parc Jean-Drapeau jusqu’en 2031.
Cette date concorde aussi avec l’échéance du contrat conclu entre le promoteur, Bell, et Formula One World Championship (FOWC). L’entreprise de François Dumontier, Octane, continue de veiller à l’organisation de l’épreuve en vertu de son entente avec le géant des télécommunications qui en avait pris le contrôle l’an dernier.
Hormis les rénovations aux infrastructures, les améliorations au circuit et les dépenses annuelles liées à l’organisation de la course, il faut rappeler que les trois paliers de gouvernement versent un montant annuel à FOWC pour l’inscription de l’épreuve au calendrier des courses.
Pour celle qui sera disputée à la mi-juin, Ottawa, Québec et Montréal ont versé un cachet d’un peu plus de 20 M$.
L’Australie paie cher aussi
Le Grand Prix du Canada n’est pas la seule épreuve à l’horaire à profiter des deniers publics. Celui d’Australie exige aussi de massifs investissements des contribuables.
Le tracé semi-permanent de Melbourne appartient à l’État de Victoria alors que la présentation de course est gérée par une corporation publique.
Pour l’édition 2022, la piste avait été rénovée, modifiée et entièrement repavée pour la quatrième fois de son histoire, soit depuis 1995. Avec des dépenses de 153 M$ pour organiser la course, les Australiens avaient englouti 78 M$, avait rapporté le quotidien The Age.
Les coûts des travaux effectués sur le circuit avaient été évalués à environ 20 M$, aux dires du chef de la direction de la société du Grand Prix, Andrew Westacott.
Ils seraient inclus dans les pertes de 2022, selon les documents financiers.
En 2014, près de 64 M$ avaient aussi été investis par le gouvernement. Cette édition avait été la plus onéreuse de l’histoire sur ce circuit, selon le New York Times et des médias australiens. Le Grand Prix de Melbourne est à l’horaire du cirque de la F1 depuis 1996. De 2012 à 2022, l’évènement aurait pompé 537 M$ d’argent public, a compilé The Age.